L'ombre d'un homme (Partie 1)

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Il était presque onze heures du soir. Les serveurs de "Ernesto's Delizia" débarrassaient les dernières tables, et se préparaient à quitter leur travail après une longue journée de labeur. Leur gentil patron les aidait volontiers dans cette tâche quand il remarqua que sa meilleure serveuse était debout face à la grande vitrine de la pizzeria. Le visage de son reflet lui fondit le cœur.

Anna était plus dévastée et plus désespérée que la vieille. Sa volonté de cacher sa peine échoua face à la puissance de son abattement. Même son éblouissant sourire s'était éclipsé de toute la journée comme le soleil un jour de pluie.

En père bienveillant et attentionné qu'il s'était juré d'être pour tout son personnel, Ernesto se dirigea vers sa serveuse, et posa sa main sur son épaule.

— Il ne répond toujours pas ? Lui demanda-t-il pour lui signifier qu'il connaissait l'origine de son mal-être.

Comme seule réponse, Anna hocha la tête pour lui faire comprendre que Liam refusait encore de répondre à ses coups de fil.

— Je suis sûr qu'il est occupé, Anna. Préparer une campagne publicitaire ce n'est pas comme préparer une pâte à pizza. Ça demande énormément de travail, et exige beaucoup de temps et de concentration.

— Même occupé, Liam répondait toujours à mes appels ne serait-ce que par un message. Pour je ne sais quelle raison, il me tient responsable de ce qui est arrivé hier. Se confia la jeune femme avant de s'asseoir sur l'une des chaises du restaurant. Je me suis même excusée alors que je ne savais pas pourquoi je devais le faire. Que veut-il de plus ?

Ernesto lui répondit par un sourire, puis s'assit à ses côtés pour la réconforter.

— Ce n'était pas à toi de t'excuser, Anna. Liam n'a pas à te reprocher son altercation avec le frère de Mégane.

— Pourtant, il m'en veut tellement qu'il m'évite comme la peste. Il n'est pas venu travailler ce soir, et il n'a même pensé à passer me raccompagner chez moi comme d'habitude.

— Il faut le comprendre aussi. Il s'est senti délaissé après ce qu'il a fait. Ce n'est pas facile de se trouver blâmé par tout le monde, tu sais ? Il estimait qu'il était dans son droit, et il était choqué puis déçu de notre réaction. Cela n'empêche pas qu'il était dans le tort, et que nous avions l'obligation de le rappeler à l'ordre.

— Je crains fort que l'incident d'hier n'a rien à voir avec son attitude. Liam est devenu plus irritable depuis qu'il a commencé à travailler dans cette agence de marketing.

— Comment ça ?

Anna soupira tristement avant de baisser la tête. Elle hésita un moment à se confier à son patron, mais elle finit par lui ouvrir son cœur. Elle l'avait toujours considéré comme un second père, et sage comme il était, il donnait toujours les meilleurs conseils à ceux qui faisaient appel à lui.

— Je crois que Liam développe un sérieux complexe d'infériorité. Dit-elle avant de lever ses regards tristes vers Ernesto. Depuis qu'il côtoie les riches clients de l'agence, il se comporte étrangement. Et je suis prête à parier que si le frère de Mégane n'avait pas une si luxueuse voiture, il ne l'aurait jamais provoqué.

— Liam est un jeune homme ambitieux, Anna. Il rêve depuis toujours de sortir de la précarité et de vivre une vie aisée. Ceci n'est pas une tare, bien au contraire ! J'admire le fait qu'il travaille si dur pour atteindre le sommet de ses ambitions et de ses rêves. Tu dois être fière de lui, et tu as le devoir de le soutenir.

— Je fais de mon mieux, je vous le jure. Mais ce n'est pas facile tous les jours. Rétorqua Anna tout en fuyant les yeux de son patron. Il me fait souvent sentir que je suis l'obstacle qui l'empêche d'aller plus loin, plus haut et plus vite surtout.

Pour te quitter dis-moi je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant