Le père, le fils et l'esprit diabolique (Partie 5)

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__ La dernière fois que je t'ai vu, tu me fixais avec des regards méprisants. Tu savais que c'était moi. Tu étais certain que c'était moi qui t'a empoisonné. Comment pouvais-tu l'ignorer après ce que tu m'as fait quelques semaines plutôt ? Oui, je t'ai tué car je voulais te voir faible et démuni face à moi. Mais même en agonisant, même sur le point de mourir, tu étais resté toi-même. Fort, orgueilleux et surtout dédaigneux. Il m'a fallu plus de quatre-vingts ans pour pouvoir te regarder, enfin, droit dans les yeux en étant certain que tu es accablé par la honte et la décadence. J'ai fait mieux que toi, et ça, tu ne peux pas le supporter ou le nier. Tu me disais quoi déjà tout en me battant et en me rabaissant ? Que ça sera moi qui ruinera ton héritage ? Que je ne suis qu'un fils à maman ? Qu'un abruti qu'une femme peut manipuler ? Qu'un être insignifiant qui n'engendra que des mauviettes comme lui ?

Le vieux Hunter se leva de son siège, et passa sur le corps inerte de Greta avant de s'approcher de son interlocuteur. Un énorme tableau d'un homme aux regards durs.

__ Aujourd'hui, personne ne se souvient de toi ou de ton nom, père. Aujourd'hui, le nom des Hunter est à tout jamais associé à moi. Tu as beau trimer des années et des années pour élever le nom de notre famille. À présent, et pour l'éternité, je resterai le seul et l'unique symbole de notre dynastie. J'ai effectivement donné naissance à quatre loosers, mais mon cinquième fils, Julian, est une création qui m'offrira l'immortalité que tu n'as jamais eu. Si tu jubiles en pensant qu'il me trahirait, saches que, contrairement à toi, je peux encore avoir un autre héritier.

La surréaliste conversation entre le vieux Hunter et le portrait de son père prit fin avec l'arrivée des deux plus fidèles gardes du père de Julian qui lui annoncèrent l'arrivée de son fils.

__ Il était temps. Leur dit-il avant de leur indiquer le corps de Greta. Vous savez ce qu'il vous reste à faire.

Tels deux automates programmés, les deux gardes ramassèrent le corps de la pauvre infirmière, et quittèrent le bureau sans hésiter et sans demander des explications sur sa mort.

Le vieux Hunter trôna alors sur le siège de son énorme bureau, et attendit avec impatience la fracassante entrée de son fils.

__ J'espère sincèrement que tu sauras me surprendre, Julian. Si tu ne me bats pas, cela me prouvera que tu n'es pas digne d'être mon héritier.

Par sa nature sournoise et manipulatrice, GP Hunter avait appris depuis sa jeunesse que pour remporter une victoire il fallait prévoir à l'avance tous les coup de ses adversaires, mais alors qu'il espérait de tout son cœur que Julian pourrait faire preuve d'une intelligence hors du commun, il ne s'attendait nullement à voir un homme plutôt serein franchir la porte de son bureau.

__ Grand-père. Le salua Julian en se vautrant confortablement sur le siège visiteur.

__ Tu arrives plus tard que ce que j'ai prévu. Ça ne te ressemble pas. Rétorqua son père avec un sourire narquois.

__ Désolé de t'avoir fait perdre un temps précieux. À quelques années seulement avant de crever, chaque seconde compte, je suppose. Mais que veux-tu ? C'était plus fort que moi.

__ Dans l'ancien temps, j'aurai parié que tu étais avec une femme. Aujourd'hui, je m'interroge sur ce qui t'avait retenu alors que ton épouse court un grave danger ?

__ Qu'est-ce qui pouvait me retenir à part une femme, grand-père ? Si tu avais parié, tu aurais remporté le jackpot. Car, oui, j'étais avec une femme, et pas n'importe laquelle. J'étais avec ma mère.

Depuis la mort de son père, et son emprise totale sur les affaires de la famille, le vieux Hunter ne s'était jamais senti aussi déstabilisé devant quiconque.

Pour te quitter dis-moi je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant