L'alter-ego

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__ Si tu n'as pas été en mesure de la séduire dès le premier soir, tâche de te rattraper. Je veux que tu te rendes à la soirée organisée à la chambre du commerce en sa compagnie. Je veux que les objectifs des caméras révèlent au monde entier que tu la fréquentes. 

Julian sourit en repensant au coup de fil échangé avec son grand-père. Le vieux Hunter s'imaginait encore qu'il pouvait avoir le moindre ascendant sur lui, et il s'obstinait toujours à le traiter comme les énergumènes qui se trémoussaient à ses pieds afin de gagner ses faveurs, et d'éviter sa fureur.

Fixant son reflet face au grand miroir de sa chambre à coucher, Julian ne voyait rien de ce que les autres pouvaient admirer ou même détester chez lui. À ses yeux, il n'était pas cet homme riche et puissant qui tenait les rênes de la bourse pétrolière, il n'était pas non plus ce séduisant célibataire qui fondait les cœurs, il n'était même pas cet orgueilleux et prétentieux marionnettiste qui manipulait les autres.

Julian n'avait jamais su apprécier ce que les gens aimaient chez lui, ni voulut changer ce que les autres détestaient en lui. Toute sa personnalité s'était forgée autour d'une seule et unique nuit qui avait figé son enfance et son innocence à tout jamais.

À quelques années seulement d'une quarantaine prometteuse, il ne voyait aucun intérêt à se faire aimer ni aucun problème à se faire haïr. Il était comme il était, et c'était aux autres de s'adapter à lui, pas l'inverse. Tanpis si parmi ces autres se trouvait l'homme qui l'avait aimé et élevé, et qui lui avait abondamment tout donné.

Son grand-père pouvait, à sa guise, croire que leur relation privilégiée lui permettra de le contrôler. Il ne se gênera pas de lui montrer le contraire.

__ Tu es si sexy dans tes costumes Julian, mais je te préfère nettement en jean moulant et en T-shirt !

Cette voix suave et mielleuse tira délicatement Julian de ses pensées. Il envoya aussitôt son regard vers la belle blonde qui s'avançait vers lui en tenant sa chemise dans la main.

__ Quoique...te voir sans rien du tout est plus excitant encore. Lui dit la jeune femme en glissant le doigt sur la ligne de la colonne vertébrale de son dos nu et bien musclé. Dommage que je suis arrivée juste après que tu aies enfilé ton pantalon.

__ Tu peux toujours me l'arracher. Tu en seras capable. Lui proposa Julian avant de lui tirer délicatement la chemise des mains pour l'enfiler.

__ À quoi bon ? Ce n'est pas une insulte ni un dénigrement, mais tu dois savoir que sans ton esprit, ta virilité et ta nudité manqueront de puissance et de fougue. Quand ta tête est ailleurs, elle emporte avec elle ton corps.

La sublime blonde se mit entre Julian et le miroir pour pouvoir l'aider à boutonner sa chemise. Elle en profita pour le contempler d'aussi près.

__ C'est étrange de te voir en blanc. Cette douce couleur dévore toute l'obscurité qui t'entoure. Ton visage paraît si lumineux, si...apaisé.

__ Et tu n'aimes pas ça.

__ Je n'aime pas les artifices. Je n'aime pas les habits de moines. Le noir te sied mieux, Julian. Ça reflète tellement ce qui se passe au fond de toi.

__ Personne ne sait ce qui se passe au fond de moi.

__ Personne, sauf moi. Rétorqua la jeune femme avant de s'asseoir sur le lit de Julian. Je sais exactement ce que tu es, et même à quoi tu penses en ce moment même. N'est-ce pas pour cela que je suis la seule femme que tu aimes vraiment ?

Occupé à placer sa montre autour de son poignet, Julian releva un œil vers le miroir, et adressa un regard glacial au reflet de la jeune femme. Loin d'en être intimidée, cette dernière continua de défendre sa supposée place dans le cœur de Julian.

Pour te quitter dis-moi je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant