Confessions de deux condamnés à mort

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Alors qu'Anna et Nicole menait une bataille contre les lois impénétrables du temps, Julian était tranquillement assis sur un sol glacial avec le dos appuyé contre une porte métallique. Avec des regards perdus, il fixait la cigarette qu'il roulait entre son pouce et son index.

Le long et étroit couloir qui séparait les deux immenses caves à vin du manoir des Urman était plongé dans une terrifiante obscurité. Même les nombreuses petites lampes soigneusement alignées sur les murs glaciaux du sous-sol accentuaient l'épouvante des lieux au lieu de la soulager.

Julian avait toujours vécu sa vie avec l'obsession d'être au-dessus de tout le monde. Son bureau à la tour dominait tous les gratte-ciels de la ville de New-York, et son appartement résidentiel de Manhattan se trouvait au dernier étage du plus grand building de la région. Ce besoin névrosé lui avait même fait ressentir que le fait de poser ses pieds sur le sol était dégradant et avilissant pour un être supérieur comme lui.

Curieusement, alors qu'il était désormais privé de la lumière et de la chaleur du soleil, que ses poumons n'avaient plus droit à l'air pur et frais des hauteurs, et que son corps entier était déjà comme enterré sous les pieds des êtres humains les plus minables, Julian se sentait enfin à sa place.

À quelques minutes d'en finir avec la vie, il commençait déjà à ressentir les bienfaits de ce plaisir qu'il avait cherché toute sa vie sans jamais le trouver...le sommeil. Savourer ce moment de paix et d'abandon de soi fut hélas gâché par le regret de laisser Anna derrière lui.

Les joie de l'amour et les délices de bonheur étaient fort irrésistibles, ils l'invitaient encore à revoir sa décision, et à rester en vie pour Anna et Mathilde, ils le laissaient voir les scènes d'un mari amoureux qui retrouvait sa belle et douce épouse après une journée de travail, d'un père aimant qui s'impliquait dans la vie de ses enfants, d'un fils digne qui prendra soin de sa mère, d'un homme heureux et libéré de tous ses tourments.

Malheureusement, sa vie sera un spectacle qui le condamnera à jouer un rôle sans avoir le droit d'être lui-même. Aux yeux de tous, alors qu'il était un assassin paranoïaque et schizophrène, il incarnera l'image parfaite d'un mari, d'un père et d'un fils idéal. Et c'était tout ce que Julian ne supportait plus...vivre dans le mensonge.

La volonté de Julian restait inébranlable même face à l'amour. Rien ni personne ne pouvait le dissuader de tuer son père, et de se donner la mort pour ne plus reproduire le même parcours et le même schéma sur ce dernier.

__ Julian ! Julian !

Les appels horrifiés de GP Hunter arrachèrent Julian de ses pensées. Il tourna légèrement sa tête vers la porte métallique qui tenait son père prisonnier dans une cave à vin sombre et frigorifique. Un sourire satisfait se dessina alors sur son visage avant de reporter toute son attention sur sa cigarette.

__ Tu es enfin réveillé, mon cher papa ? Tu en as mis du temps. Se moqua-t-il sournoisement.

__ Où suis-je, Julian ? Fais-moi sortir d'ici tout de suite !

__ Tu es bien bavard pour un claustrophobe. À moins que tu aies menti sur ça aussi.

__ Julian. Je t'en prie. Sors-moi d'ici et je ferai tout ce que tu me demanderas. Je...je vais même quitter le pays si tu le souhaites.

__ Si ma volonté se limitait à te chasser du sol Américain, tu n'y serais déjà plus.

__ Julian, par pitié ! Sors-moi d'ici ! On peut s'arranger ! On peut tout arranger.

__ Ce n'est pas avec moi que tu dois trouver un arrangement. Si lui accepte de négocier avec toi, je le ferai aussi. Je serai même capable de te pardonner et de tout recommencer à zéro.

Pour te quitter dis-moi je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant