Pour te quitter dis-moi je t'aime

Face au passé (Partie 1)

__ Comment va mon petit cœur, cher ami et frère ?

Telle la triste mélodie d'une boîte musicale, la question de Julian se répétait encore et encore dans la tête du pauvre Amjad sans qu'il ne put l'arrêter ou l'ignorer.

Pour se libérer de la voix culpabilisante de son ami Américain, l'émir choisit de se défouler sur son sac de boxe. Coup après coup, frappe après frappe, la répulsion du jeune émir s'accentuait alors qu'elle était sensée s'apaiser, sa conscience le lâchait au lieu de prendre sa défense, et bien qu'il l'espérait de tout son cœur, les sueurs froides lâchées par son corps ne purent éteindre les flammes des tourments qui ravageaient son âme.

Exténué au bout d'une heure, Amjad donna un dernier coup qui fit violemment basculer le sac de boxe, il ramassa ensuite une serviette qu'il posa sur sa nuque, puis prit siège sur le banc de sa salle de sport.

Tête baissée, il fixa ses basquettes de sport en pensant à son monde qui s'était écroulé en une fraction de seconde.

Tout était parfait durant le dîner organisé par sa sœur. Le destin avait brisé pour lui tout ce qui l'éloignait d'Anna. La jeune femme s'était séparée de sa bague, et avait même mis fin à son deuil. Quant à lui, sa noblesse fut enfin décimée par la volonté de son cœur, et sa langue s'était audacieusement libérée des chaînes de silence.

Quelques secondes seulement auraient suffit à mettre fin à l'enfer que l'émir vivait. Depuis qu'il avait découvert ses sentiments envers Anna, il savait qu'en avouant son amour pour elle, il risquait de tout perdre. La jeune femme pouvait le rejeter, et même émettre le désire de prendre ses distances avec lui. Julian, lui, était bien capable de le renier à tout jamais tout en lui déclarant une guerre dont il ne sortira émotionnellement sain et sauf.

À Amjad, il fallut donc six longs mois avant d'oser prendre tous les risques, et assumer l'amour qu'il portait à l'ex femme de son meilleur ami. Près de 200 jours à lutter contre lui-même, à se maudire, à se haïr, à réfléchir, à souffrir avant de trouver le courage d'avouer l'inavouable. Finalement, Julian n'avait eu besoin que d'un seul coup de fil, et que d'une unique question pour anéantir les espoirs de l'émir.

__ Comment va mon petit cœur, cher ami et frère ?

Honteux et abattu, Amjad releva la tête, et fixa le vide en repensant à ce message divin envoyé par Dieu le soir où il avait essayé de convoiter la femme d'un autre homme.

" Tu n'es et tu ne resteras que le lien qui unit les deux cœurs de tes amis ".

Comment Amjad pouvait-il échapper à cette vérité ? Non seulement, Julian l'avait appelé alors qu'il s'apprêtait à avouer ses sentiments à Anna. Cette dernière s'était approchée de lui en remarquant la pâleur de son visage.

__ Tout va bien, Amjad ? Lui avait-elle demandé sans savoir que ce fut Julian qui avait troublé l'émir.

__ C'est elle, Amjad ?! Lui avait demandé Julian en entendant la voix de la jeune femme. C'est Anna ? Je t'en prie, fais-moi entendre sa voix une nouvelle fois.

La culpabilité d'Amjad fut si grande à ce moment là, qu'il n'avait pas pu décliner la demande de son ami. Il avait donc fit mine de raccrocher, et il s'était ainsi retrouvé à assurer la connexion entre Julian et Anna.

Tourmenté par la fin tragique de sa soirée, Amjad prit une douche froide avant de s'allonger sur son lit dans l'espoir de trouver le sommeil.

__ Tu savais bien que j'allais lui avouer mes sentiments, n'est-ce pas Hunter ? Tu m'as appelé pour m'arrêter, et pour me rappeler qu'elle était à toi, et qu'elle le sera pour toujours. Tu es puissant, Hunter. Oh oui, tu es bien puissant ! Pensa-t-il avant de se redresser et de se regarder dans le miroir. Tu as complètement perdu la tête, Amjad ! Comment as-tu osé faire une chose pareille ?