L'invitation

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Extrêmement anxieuse et tendue depuis son arrivée à la tour, Anna ne tenait plus en place. Derrière son bureau, et en attendant l'arrivée de Julien, elle ne cessait de gesticuler sur sa chaise en claquant nerveusement ses ongles sur son bureau ou sur sa joue.

Sa confrontation avec Julian au sujet de l'invitation de l'émir promettait d'être violente. Elle s'annonçait même comme l'ultime affrontement entre elle et lui.

__ Bonjour, miss Carson.

Face à Julian, Anna resta dubitative. La jeune femme avait compris que quand il s'adressait à elle en tant que miss Carson, cela signifiait qu'il était en mode patron, qu'il exigeait d'elle d'être son assistante, pas plus, et qu'il mettait entre parenthèse la véritable relation qui les unissait.

Anna ne s'attendait pas à cela. En arrivant à la tour ce matin, elle fut persuadée que Julian commencera par lui rappeller qu'elle était la proie qui le fuyait, et lui le prédateur qui la pourchassait.

Plus étrange, Julian n'avait pas l'air contrarié. Il était, au contraire, détendu.

Cette confusion fit plonger Anna dans l'incompréhension et la méfiance la plus totales. À t'elle point, qu'elle eut un moment de flottement.

__ Se pourrait-il que l'émir ne l'ait pas encore informé de mon refus et de mon invitation à sortir ensemble un autre jour ? Douta-elle.

En remarquant son bouleversement, Julian se félicita d'avoir réussi à la perturber sans le moindre effort. Il ne put rater cette occasion pour s'amuser à ses dépens.

__ Tiens donc, miss Carson ? Comme l'élève modèle d'une classe d'école, vous ne vous levez plus quand votre directeur entre ? La taquina-t-il
avant de lui demander de le suivre
dans son bureau.

Avec des regards soupçonneux, Anna le suivit des yeux. Pour elle, il paraissait calme, étonnement calme, suspicieusement calme, trop calme pour que cette flegme soit naturelle et rassurante. Depuis le temps, la jeune femme n'ignorait plus que ce calme douteux précédait toujours la plus orageuse des tempêtes.

N'ayant plus le choix que celui de faire face à son destin, elle rassembla ses dossiers, et entra dans l'antre du diable.

Julian était confortablement assis autour de la table de réunion avec son ordinateur portable grand ouvert, et ses dossiers bien préparés.

__ Miss Carson, vous avez, hier, pris votre après-midi sans prévenir.

__ Je...Je...

__ Ce n'est pas grave. La reprise ne fut pas de tout repose pour vous. Cela dit, si je peux passer outre le fait que vous vous absentiez, je ne tolérerai plus que vous le feriez sans que j'en sois informé. Je suis votre patron, et pourtant, je vous rends des comptes concernant mes absences et mes retards pour la bonne tenue du groupe. J'exige la même chose de vous. Est-ce clair ?

Anna ne savait pas comment il put réussir cette prouesse, mais Julian parvint à lui donner l'impression qu'elle était vraiment et uniquement face à son patron.

__ Je suis désolée, monsieur Hunter. Je vous promets que cela ne se reproduira plus jamais.

__ J'en suis sûr. Bref, passons aux choses sérieuses. Hier, je n'ai pas eu le temps de vous tenir au courant du nouveau planning du jour. Nous ne ferons pas de tournée aujourd'hui. Il est temps d'aborder les grandes lignes de notre offre pour le projet Moyen-Orient. Je vous ai choisie pour constituer avec moi la première cellule d'urgence. Ensemble, nous allons préparer le brouillon de l'offre.

De surprise en surprise, Anna sentit que tout lui échappait. Dans ce bureau, elle ne savait plus ce qu'elle était, ce qu'elle y faisait, et face à qui elle se trouvait. Elle était venue en guerrière armée de sa haine et de sa colère, et la voici sommée de n'être qu'une assistante flanquée d'un stylo et du papier.

Pour te quitter dis-moi je t'aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant