Pour te quitter dis-moi je t'aime

Le meilleur des deux

Au retour d'Anna à la pizzeria, monsieur Ernesto la fit entrer puis s'assoir dans son petit bureau.

— Je te donne ce qui sera, je l'espère, ton dernier jour de travail. Tu vas rester ici pour lire tranquillement et attentivement ton futur contrat de travail. Tu ne quitteras cette pièce qu'une fois ta décision concernant l'offre d'emploi de Julian Hunter sera prise. Si tu te décides à quitter cette pizzeria pour la plus grande entreprise du pays, j'organiserai ce soir le plus inoubliable pot de départ.

Une fois seule, et avec un coeur battant la chamade, et un souffle terriblement lent, Anna sortit le contrat de sa grande enveloppe. Rien qu'en voyant le logo du Hunter Group, elle tressaillit en sentant la présence de Julian. Elle eut même l'impression que son spectre se tenait derrière elle, et que, penché sur elle, il la surveillait durant sa lecture.

— Grand Dieu ! Est-ce un homme ou un démon ? Se demanda-t-elle en repoussant le contrat loin d'elle.

Une fois de plus, alors que le besoin l'incitaient à entrer dans l'univers de Julian, la sagesse lui recommandait de s'en éloigner. Malgré le dilemme qui créait la discorde en elle, la jeune femme trancha rapidement entre ses folles espérances et son mauvais pressentiment.

Elle ne perdra rien en tentant sa chance. Si travailler avec Julian s'avérerait impossible ou pénible, elle n'aurait qu'à démissionner.

Peu enthousiaste, Anna commença à lire son contrat en apportant une minutieuse attention à chaque mot inscrit dessus. Comme elle s'y attendait, le document était rédigé avec une précision qui ne laissait aucune place à des failles ou à de l'ambiguïté. Même les ponctuation soutenait la puissance de chaque paragraphe. Tout était clairement détaillé pour défendre les droits du groupe pétrolier, ainsi que pour souligner les engagements et les avantages des employés.

Arrivée enfin aux clauses du code vestimentaire, la jeune femme découvrit à quel point sa réaction était excessif et démesurée. Elle s'étonna même de la patience et de la compréhension observées par Julian alors qu'elle doutait de ses intentions.

En lisant chaque ligne de ces clauses atypiques, Anna prit conscience que le groupe Hunter donnait effectivement une importance plus que capitale pour l'apparence physique de ses employés, et que dans le but de soigner et de promouvoir l'image d'une firme puissante et florissante aux yeux de ses interlocuteurs directs et indirects, et afin de satisfaire les exigences physiques et vestimentaires de la direction du groupe Hunter, une prime nommée "Dress Code" était mensuellement garantie à tous les employés selon le poste et les responsabilités de chacun.

Même s'il lui avait pardonné son emportement,  Anna regretta amèrement sa réaction agressive envers Julian. Elle conclut, avec une certaine amertume, qu'elle avait mal jugé l'homme d'affaire, et que cet homme déstabilisant et froide
était finalement un patron qui prenait en considération le bien-être de ses employés, et qui veillait à les soulager de certaines exigences du groupe en ajoutant des primes conséquentes sur leurs salaires.

Soulagée d'être débarrassée d'une des boules d'angoisse qui lui gâchait sa joie, Anna poursuivit sereinement la lecture des clauses du code vestimentaire comme si elle était déjà une salariée chez Hunter Group. Elle lut que les employés avait la liberté de choisir entre les nombreux modèles des tenues sobres, classiques et élégants que proposaient les boutiques conventionnées avec le groupe.

Quand la jeune femme tomba sur la liste des magasins où elle aura l'obligation de faire ses achats, elle redressa brutalement le haut de son corps. Elle eut du mal à le croire, mais en devenant l'assistante de Julian, elle sera en mesure de faire du shopping dans des boutiques de prêt-à-porter qui portaient les enseignes des plus grandes maisons de couture au monde. Elle qui bavait depuis des mois devant la vitrine d'un petit magasin de vêtements de son petit quartier, se payera des tenues de créateurs.