71 - Maze Wesson

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Aydan

La mélancolie s'est installée au fur et à mesure que nous avalions les kilomètres pour rentrer à Creil et a pris de l'ampleur lorsque Zorah m'a demandé de m'arrêter chez la fleuriste.

Je me parque devant ce lieu culte où repose notre petite Maze. Aucun de nous trois ne parle, le véhicule est à l'arrêt depuis cinq minutes, pourtant aucun de nous ne sort. Je brise le silence parce que je ressens la peine de mes princesses en plus de la mienne et ça me fait mal de les savoir dans cet état.

- On peut revenir un autre jour.

- Non, répondent-elles en chœur.

Elles se regardent, un tout petit sourire apparait sur les lèvres de Zorah, qui tend aussitôt sa main à Malia pour la caresser dans un geste que je devine réconfortant en la voyant faire dans le rétroviseur.

J'acquiesce alors.

- Allons-y, murmure Zorah dont le timbre de voix chevrote.

Malia se détache, je sors et lui ouvre la portière, je pose ma main sur son épaule en attendant que Zorah nous rejoigne avec une gerbe de fleurs aux couleurs douces et pastel. Ensemble, nous nous dirigeons vers l'entrée du cimetière. Malia glisse sa main chaude dans la mienne avant de répéter son geste avec sa mère. Malgré moi, sentir sa paume dans la mienne me renvoie au jour où j'ai dû dire adieu à ma fille, tout en implorant Zorah de revenir parmi nous. Mes yeux se voilent, tandis que j'entends renifler à ma gauche. Je baisse aussitôt la tête vers cette fillette que j'aime comme la mienne, et caresse le dessus de sa main, comme sa mère le fait souvent avec moi, j'espère être un minimum réconfortant pour elle. Sa tristesse me déchire l'âme.

- Ça va, mon chat ? Aydan a raison, nous pouvons revenir une prochaine fois.

La petite secoue la tête, tandis que nous remontons l'allée qui mène à la tombe de Maze.

- Non, c'est bon. Je veux y aller.

- D'accord. Et n'oublie pas, tu peux pleurer autant que tu le veux et si tu as besoin de parler de ta sœur, je suis là, Mal. Je serais toujours là pour toi, mon amour, qu'importe mon état d'esprit. Tu n'as pas à t'inquiéter pour moi, ton bien-être prônera toujours sur le mien.

- Oui, maman. Je le sais.

Zorah acquiesce, puis me regarde avec un air interrogateur. Je hoche la tête pour lui indiquer de ne pas s'inquiéter. Très vite, nous arrivons aux pieds d'un monument funéraire blanc. Une forme ondulatoire jailli de la pierre, on pourrait penser à une flamme, qui renferme en son sein, un cœur sur lequel est inscrit en lettres dorées « Maze Wesson », « 2019 », « Pour toujours et à jamais ». Sur la pierre tombale, une lune creusée et fleurie attire l'œil. Des crocus blancs forment son contour, tandis que d'autres, aux pétales striés blancs et violets, la remplissent. Le résultat est majestueux, il renvoie une certaine douceur. Celle que l'on assimile à un enfant.

- Ils sont beaux. C'est toi qui les as plantés ? demandé-je à Zorah.

Elle acquiesce sans me regarder.

- Oui, en février, annonce Malia.

Je prends alors conscience que la dernière fois que je me suis recueilli sur la tombe de ma fille était au mois de décembre. La culpabilité m'envahit aussitôt.


- Je ne viens pas ici, avoué-je. Je fais un piètre père.

- Ça ne dit absolument rien sur tes qualités de père, Aydan. Tu n'as nullement besoin de te rendre au cimetière pour penser à elle ni de fleurir sa sépulture pour prouver que tu aurais fait un bon papa.

Nous Étions Destinés | Tome 1 et 2 |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant