10 - Je fais l'autruche

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Aydan

Je suis du genre à tout garder pour moi et je n'aime pas parler de ce que je ressens. D'autant que si je dois le faire, c'est avec Zorah et personne d'autre. J'ai donc suivi le conseil de ce connard de Sean et j'ai expliqué à mon entourage que je ne voulais plus parler de tout ça. Ils savent comment je suis, la dernière fois qu'ils ont essayé de me faire sortir les vers du nez, je me suis barré en Amérique pendant des mois. Un nouveau départ, c'est ce qu'ils appréhendent, ils me l'ont dit, c'est pour ça que j'ai insisté sur le fait que je ne voulais plus aborder le sujet. À mon grand soulagement, ils l'ont compris et ne le font pas, du moins pas devant moi.

J'ai repris le travail ainsi qu'un semblant de vie normale, Jay enfile les gants tous les soirs avant la fermeture, il m'aide à ne pas me laisser submerger par ma colère et je lui en suis reconnaissant, mais je n'oublie rien et j'ai mal à en crever. Je fais l'autruche comme on dit, je fais croire que j'essaie tant bien que mal d'avancer, mais la vérité c'est que chaque jour la vie me dégoute. Tant que je suis à For The Ragnarok, ça peut allait. J'ai peu de temps pour penser à ce que j'ai perdu, mais après 23 h quand je rentre chez moi, la musique est tout autre et tout me revient en plein fouet. Je n'ai jamais été du genre anxieux, pourtant ces derniers temps, je vis crise d'angoisse sur crise d'angoisse. Je ne dors pratiquement pas, dès que mes yeux se ferment, je revis tout avec tant de réalisme que j'en deviens fou. Alors je me lance corps et âme dans mon job.

Le commerce attenant à la salle était en vente, j'en ai fait l'acquisition sur un coup de tête, afin de réaliser mon projet professionnel. J'avais dit vouloir élargir les options sportives de For The Ragnarok et c'est ce sur quoi je bosse en ce moment. Ely et Jay me soutiennent comme toujours et pendant que je buche sur les plans de l'extension, Jay a repris ma place pour les cours de boxe et pour le reste. Je suis déjà passé par là, je sais ce que je fais et surtout, je sais ce que je veux.

Depuis une semaine, j'arrive dans mon antre à 6 h, je m'enferme dans mon bureau pour en sortir à midi et manger avec l'équipe. Je m'en passerai bien, mais pour avoir la paix, je dois aussi faire des efforts. Je retourne dans mon bureau à 13 h et n'en ressors que vers 22h30, parfois, je ne rentre pas et reste ici pour laisser libre cours à mon mal-être, au grand dam d'Ely.

Aujourd'hui, je suis à la recherche d'entrepreneurs pour les travaux que je ne peux pas effectuer seul, d'autant que j'aimerai pouvoir proposer les nouveaux sports pour le début de l'année. Le projet est ambitieux, mais réalisable et c'est ce dont j'ai besoin pour ne pas sombrer.

Des coups à ma porte de bureau retentissent, alors que j'épluche le bottin, à la recherche de quelques entreprises.

- Ouais !

Le minois d'Ely apparaît dans l'embrasure, elle m'informe qu'il est déjà midi. Je n'avais pas vu l'heure et devoir arrêter ce que je fais m'agace, toutefois le sourire de ma cousine, me pousse à le faire et je la rejoins pour retrouver les autres à l'annexe.

Lorsque je m'installe, Jay me demande comment ça avance, je lui explique où je suis et ma recherche d'entreprise en maçonnerie.

- Pourquoi tu ne fais pas appel à William ? m'interroge Ely.

- William ?

- Ton père !

- J'avais bien compris, mais pourquoi, je ferais appel à lui ?

- Parce qu'il est maçon, rit-elle.

Je l'observe incrédule.

- Je pensais que tu le savais, mais visiblement ce n'est pas le cas, reprend-elle. Et puis en le faisant intervenir, ça te permettrait d'en savoir plus sur lui, non ?

Nous Étions Destinés | Tome 1 et 2 |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant