The Beast

27 : ophelia

Le réveil est douloureux, comme d'habitude. Avant d'ouvrir les yeux, Ophelia prend le temps de fouiller dans ses souvenirs pour savoir où ils se sont arrêtés.

Tout lui revient avec une facilité déconcertante. Le baiser. Circé. Sa gêne pendant les jours qui ont suivi, ses déplacements ayant pour unique but d'éviter la magicienne.

Et puis, le noir.

Évidemment. Cela aurait été trop beau qu'elle se rappelle de tout.

Elle lâche un soupir.

Et soudain, un bruit parvient à son oreille. Elle n'est pas seule dans sa chambre. Et à en juger par ce qu'elle a entendu, l'autre personne s'est relevée en l'entendant soupirer.

Ophelia se crispe lorsque la voix de Circé prononce son prénom.

Elle ne répond pas, mais elle ouvre les yeux. Et découvre le visage alerte de sa compagne au dessus d'elle.

- Tu es réveillée, murmure Circé. Enfin, je vais pouvoir comprendre ce qui s'est passé.

Mais Ophelia n'en a aucune envie. Elle ne soutient pas plus longtemps le regard de la magicienne et se tourne dans le lit. Laisse-moi tranquille, bon sang. Tu n'as toujours pas compris que je n'avais aucune envie de parler ?

Elle se doute que Circé ne laissera pas tomber aussi facilement.

Et quelque part... Une partie d'elle aimerait tout lui confier. Sans secrets entre elle, leur relation redeviendrait-elle comme avant ?

Non, et tu le sais. Parce qu'il y aurait toujours ce baiser.

Avec embarras, elle devine que le rouge lui monte aux joues, et elle enfouit le visage dans son oreiller. Elle ne sait toujours pas ce qui lui a pris. Sur le moment, ça lui semblait être la chose à faire. Enfin, elle n'en sait rien. Elle n'a pas vraiment réfléchi. Et n'a pris conscience de son acte que lorsque ses lèvres ont touché celles de Circé.

Repenser à l'incident fait remonter une vague de sensations qu'elle préférerait ignorer. Elle n'arrive même pas à être en phase avec elle-même. Ses entrailles meurent d'envie de recommencer, quand sa raison lui crie de tout oublier.

Elle s'agite de nouveau dans les draps, et entend Circé se déplacer.

- Je serai dans le salon quand tu te décideras à te lever, lâche finalement la magicienne.

Puis ses pas s'éloignent, et la porte se referme.

Ophelia souffle. Il est bien plus facile de faire taire la vague lorsqu'elle est seule que quand elle est aux côtés de Circé.

Pourtant, elle sent qu'elle n'a pas le choix. À présent, deux options s'offrent à elle : rester et continuer d'ignorer sa compagne, ou bien fuir par tous les moyens l'île d'Aea.

Elle ne veut plus se laisser gouverner par ses émotions. Accoster ici l'a fait baisser sa garde. Finalement, ne s'est-elle pas, comme tant de gens avant elle, laissée prendre au piège de Circé ? Un piège plus sournois, plus doux, une approche subtile pour mieux la manipuler.

Ophelia se redresse dans son lit et tourne la tête pour regarder par la fenêtre.

Lentement, son cerveau s'agite et les prémices d'un plan germent dans son esprit. Il faut qu'elle quitte l'île.