105 : ophelia

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- Où est-elle ? demande Hécate à Poséidon lorsqu'elle arrive dans son palais sous-marin

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- Où est-elle ? demande Hécate à Poséidon lorsqu'elle arrive dans son palais sous-marin.

- Qui ça ?

- Ne fais pas l'imbécile, je sais que c'est toi qui l'a récupérée. La mortelle. L'amie de ma fille.

Poséidon se fend d'un grand rire.

- Tu sais qu'elles étaient plus qu'amies, hein ?

- Je ne suis pas stupide, assène Hécate en envoyant l'un de ses regards noirs caractéristiques. Alors ? Je dois l'accompagner, c'est la règle. Je ne vois pas quel intérêt tu aurais à garder une mortelle décédée, mais tu sais très bien que si tu le fais, c'est Hadès qui se pointera à ma place pour te la prendre de force.

- Toujours autant à cheval sur le protocole, toi.

- Quand on n'est pas né frère de Zeus, on a plutôt intérêt, figure-toi.

Poséidon se contente d'un nouveau sourire, et invite Hécate à le suivre dans les couloirs de son palais. Ils arrivent finalement à une pièce discrète, où ils entrent dans un grand fracas, le dieu des océans ayant poussé la porte de toutes ses forces.

Hécate pose immédiatement les yeux sur le corps inerte qui repose sur le lit. Elle reconnaît Ophelia malgré sa peau bleuie par la noyade, et s'avance vers elle d'un pas certain.

Elle prend la main de la défunte dans la sienne et exerce une légère pression. Aussitôt, Ophelia s'anime et se redresse dans un sursaut. Son regard fixe le visage d'Hécate d'un air interrogatif.

- Je suis Hécate, dit sobrement la déesse. Je suis venue te guider au royaume des morts.

- Oh. Je n'ai pas survécu à la tempête ?

- Non, je suis désolée.

Mais Ophelia sent dans le ton de la déesse qu'il s'agit juste d'une réponse générique, qu'elle donne à toutes les personnes qu'elle est chargée d'emmener auprès de Hadès et de Perséphone.

- Lève-toi et suis-moi.

Hécate tourne la tête et s'adresse ensuite à Poséidon.

- Merci. À bientôt.

- Hmm. Dis-moi, maintenant que Circé se retrouve de nouveau seule...

- Hors de question. Ça n'a pas marché la première fois, je ne vois pas pourquoi je te donnerai ma bénédiction.

- Hécate, allons, pourquoi tu ne veux pas que-

- Pas la peine d'être mielleux, Poséidon. Toi comme moi savons que je ne t'apprécie pas, et que Circé pas davantage. Au revoir.

Elle attrape de nouveau la main d'Ophelia.

- Prête ?

La mortelle hoche la tête. Et à l'instant où elle referme la bouche, elle disparaît.

Une fraction de seconde plus tard, Hécate et elle se trouvent sur une plaine plongée dans l'obscurité, dans laquelle serpente un immense fleuve dont Ophelia ne voit pas les extrémités.

- C'est le Styx ? demande-t-elle.

Hécate acquiesce. Elle agite la main en direction d'un point invisible. Ophelia lui lance un regard à la dérobée.

- À propos de ce que Poséidon a dit sur Circé... Vous savez qu'elle... Je l'ai blessée, elle est inconsciente, je voulais seulement aller chercher de l'aide...

- Je sais. Mais ma fille ne va pas mourir. Il faudrait vraiment une blessure divine pour la tuer. Elle va simplement mettre du temps à se remettre.

- Mais... J'ai été maudite par les dieux, alors est-ce que ce n'est pas une blessure divine ?

Hécate secoue la tête et répète simplement :

- Elle n'est pas morte.

Ophelia baisse les yeux vers le sol.

- Est-ce que... Est-ce que si je n'étais pas partie, elle aurait fini par se réveiller et on aurait pu continuer...

Au moment où la déesse ouvre la bouche, elle reprend :

- Non, finalement, je ne veux pas le savoir.

Si elle avait encore été en vie, des larmes auraient coulé sur ses joues, mais maintenant qu'Ophelia n'est plus qu'une forme immatérielle, ses yeux sont plus que secs.

Elle remarque alors une barque qui s'avance vers elles, et une silhouette encapuchonnée qui immerge de la brume.

- Charon, l'interpelle Hécate lorsqu'il arrive à la berge. Je te charge d'accompagner la demoiselle Ophelia aux champs d'asphodèles.

Elle lui tend un petit objet brillant, qu'il enfouit tout de suite dans sa poche. Hécate se tourne vers Ophelia.

- Tu ne devrais pas pouvoir passer le Styx, puisque tu t'es noyée et que personne n'a glissé de pièce dans ta tombe. Mais disons que je fais une petite exception pour toi.

Ophelia ouvre grands les yeux.

- Oh, merci Hécate, je...

- Inutile de me remercier.

La déesse redevient sèche, froide. Elle lui fait signe de monter dans la barque, et Ophelia s'exécute. Mais avant que Charon reparte, elle lance :

- Hécate, si vous voyez Circé, dites-lui que je suis désolée ! Pour tout, la blessure, le fait de l'avoir abandonnée... Et dites-lui aussi que je l'aime.

- Je commence à m'en rendre compte, je crois. C'est entendu, je lui transmettrai.

Et Hécate reste sur la berge, jusqu'à ce que la barque du passeur se soit complètement évanouie dans la brume.

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