Je retrouve mes sentiments que j'avais éteint depuis le départ, lorsqu'elle a confessé ce terrible aveux. Je pensais qu'une femme comme elle était chouchouté par ses parents, je pensais que le pire qu'il lui était arrivé est la mort de son père. Pas cela. Je savais déjà pour le suicide de sa mère, bien que j'avais quelques doutes, mais maintenant...
Maintenant, je reste immobile. Figé. Elle respire fortement, et je sens en elle le regret des paroles qu'elle a prononcé. Sans que je n'ai eu le temps de dire quoi que ce soit, elle sort de mon bureau en furie. Et je ne la rattrape pas. Je la laisse partir.
Chaque fois que j'éteins mes sentiments, je finis par le regretter. Je finis par la blesser. Alors que je commençais à vouloir faire marcher ce mariage. J'ai commencé à croire que même sans sentiment, je dois faire marcher ce mariage. Nous ne pouvions pas rester des ennemis à jamais. Nous ne pouvions pas vivre à jamais, craignant un coup bas de l'autre. Personne ne peut vivre ainsi.
La seule façon pour qu'elle puisse me pardonner serait de la libérer, ou du moins, elle me détesterait moins. Mais ce n'est pas une option. Venelia restera ma femme à jamais. Pour toujours. Ou en tout cas, pour les cinquante ou soixante prochaines années.
Je me rassois, regardant longuement la porte. Si ma mère était encore en vie, elle m'aurait sûrement poussé à lui courir après. A m'excuser, même si je devais me mettre à genoux. Et mon père m'aurait dit de ne pas être aussi faible. Que j'ai le pouvoir de la soumettre à ma volonté.
- Azaël ! M'écriais-je.
La porte s'ouvre, et Azaël entre.
- Où est partit la reine ? Lui demandais-je.
- Elle est retournée dans votre appartement. Me répond-il. Voulez-vous que je lui tienne compagnie ?
Je secoue ma tête.
- Non, laisse-la seule pour un moment, mais garde tout de même un œil sur elle. Le prévenais-je. Si jamais il lui arrive quoi que ce soit, préviens-moi directement.
- À vos ordres, votre Majesté. Me dit-il en hochant la tête.
Je l'autorise ensuite à sortir, après lui avoir ordonnés de demander à personne d'entrer, sauf si c'est d'une urgence extrême. Une fois sûr que la porte est fermée, je tourne la tête vers la fenêtre.
- Qu'est-ce que tu regardes ? Dis-je au vide.
- Je regarde ce que tu es devenu. Me dit-il. Un faible. J'ai si honte de toi.
Je ris jaune. Mon père est là. Bien-sûr, en tant qu'illusion. La plus réaliste des illusions. J'ai fais vivre le pire des cauchemars à Venelia, alors je dois m'infliger la même chose. Je me lève alors de ma chaise, et m'approche de lui.
Je retire mon haut, restant torse nu.
- Tu sais ce qu'il te reste à faire, père.
Un fouet se matérialise dans sa main.
- À genoux, chien. M'ordonne-t-il.
Sans dire un mot, j'obéis. C'est d'ailleurs la seule fois où j'obéis à quelqu'un. Dès que mes genoux touchent le sol, mon père se met derrière moi. Le choc de son premier coup de fouet me fait faire un léger gémissement de douleur. Cela fait si longtemps que je n'ai pas ressentis cette douleur.
Et les coups s'enchaînent. Je grince des dents, je serre la mâchoire. Bien que tout cela ne soit qu'une illusion, je sens chaque mouvement, chaque frappe. Je sens ma peau claquer. Je la sens s'ouvrir, saigner, et se refermer aussitôt. Au plus grand plaisir de mon père.
Il pouvait nous battre autant qu'il voulait, cela ne se voyait jamais. Nos blessures guérissaient rapidement. Très rapidement.
- Suis-je mort pour cela ?! S'écrie-t-il. Pour un moins que rien !
Au bout d'un moment, je retrouve cette habitude et les coups ne me font plus mal. Je baisse la tête. Même en faisant cela, je n'atteint pas la douleur que cette humaine a ressenti. Je ne peux pas la ressentir.
- Regarde-moi...
Je lève la tête, reconnaissant la voix d'une femme. Ma femme. Je cligne des yeux plusieurs fois en la voyant agenouillé face à moi. Il m'a fallu du temps pour comprendre qu'elle n'est pas réelle. Pourtant, elle me semble réelle lorsqu'elle pose sa main sur ma joue.
Dans la douleur, je ne contrôle pas mes pouvoirs. Et je dois mettre un terme à tout cela avant que je ne vive à nouveau une perte de contrôle totale...
Mais je n'y arrive pas.
- C'est assez, pour toi ? Murmurais-je.
- Non. Me répond Venelia. Tu souffrais bien plus quand ta mère prenait les coups à ta place. Je me trompe ?
- C'est cruel. Dis-je en secouant ma tête. Je ne peux pas. C'est cruel.
Elle me sourit, mais ce n'est pas sincère.
- Tu as voulu te faire du mal pour moi, non ? Me dit-elle. Alors continue. Fais revenir ta mère. Vois à nouveau tout cela.
- Disparais. Lui ordonnais-je. Je t'ai créé. Tu es mon illusion. Disparais !
- Je vais te faire souffrir à ma façon, alors.
Alors que mon père continuait de me frapper le dos, je la vois se munir d'un couteau. En face d'elle il y avait mes sœurs. Et elle les torture. Elle les poignarde au cœur. Je vois l'illusion de mes deux sœurs perdre la vie. Leur peau pâle devient grisâtre.
Tout est faux. C'est faux. Une illusion.
Je me le répète, mais la douleur est toujours présente. Mon père me bat, le corps de mes sœurs sans vie est au sol, et Venelia rit. Ce n'est que des illusions.
Je me lève difficilement, basculant d'un côté à un autre, puis prends une des pilules de mon tiroir, que le médecin m'a prescrit.
- Qu'est-ce que tu fais ? S'écrie mon père. Lâche ça !
Mais je ne l'écoute pas, j'avale une pilule. Puis deux. Puis trois. Puis quatre. Et rapidement, ces illusions s'en vont. Complètement. Et je suis à nouveau seul dans cette chambre. Je respire fortement, de la sueur coulant de mon front.
Cela faisait si longtemps que je n'ai pas perdu le contrôle de mes pouvoirs... cette perte de contrôle est semblable à la skizophrénie chez les mortels. Sauf qu'au lieu de n'entendre que des sons, je vois des images. Incontrôlables.
Et je n'oublierais jamais que Venelia en est la cause.
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Blood's Crown
RomanceLa Reine des humains et l'Empereur des vampires se retrouvèrent tous deux au cœur d'une guerre datant de plusieurs siècles, dès leur ascension au trône. Dès l'instant où la guerre prit fin, un des deux dû se soumettre à l'autre. Malgré leur haine et...