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Après que je me sois préparée, l'Empereur et moi nous dirigeons vers la salle du trône. Ses plus importants sujets, ses ministres et ses sœurs sont tous présents.

Je marche à ses côtés, mon bras dans le sien, la tête haute. Tous sont heureux de le revoir en vie, mais je ne peux pas dire de même pour moi. Ils savent désormais que malgré la paix entre les deux peuples, les deux souverains, l'Empereur et moi, sommes toujours en guerre l'un contre l'autre. Je suis l'ennemie. Je suis le danger. Je suis la traître.

L'Empereur se poste devant son trône, ses sœurs et moi alignés de chacun de ses côtés. L'ambiance de la salle est assez pesante, et sans mots, je peux comprendre que ma place n'est pas ici. Je suis une étrangère. Toute la fausse sympathie qu'ils s'étaient construis pour moi au cours des derniers mois s'en est allé.

- Cher peuple, je vous revois aujourd'hui après un long moment où j'ai été prononcé mort. Dit l'Empereur d'un ton solennelle. Ma soeur, la princesse Illara, a dû prendre le trône durant mon absence mais aujourd'hui, je reprends ce qui me va de droit.

Illara s'avance alors, puis met un genoux à terre devant son frère. Elle retire la couronne de sa tête puis la tend à l'Empereur et prononce le serment d'honneur et du couronnement. Elle se relève ensuite, puis pose la couronne sur la tête de son frère.

- Moi, princesse Illara, je renonce à cette couronne. Dit-elle. Et je te déclare Empereur des vampires.

Une fois la couronne sur sa tête et Illara se remet à sa place, l'Empereur fait un sourire en coin. Il s'est fait couronner deux fois dans sa vie. Et bien que je n'étais pas présente pour la première fois, je peux voir dans son regard qu'il est fier que je sois là, cette fois. Que je témoigne de sa grandeur.

- Cependant, cette soirée ne se terminera pas qu'avec mon couronnement. Dit-il. Car certains ont profités de mon absence afin de calomnier ma tendre épouse.

Je fronce les sourcils. Calomnier ? Personne ne m'a calomnié. Tout le monde connaît la vérité, ici. J'ai tenté de tuer l'Empereur.

- Voyez, mon épouse me représente. Et tout ce qui lui est fait, m'est fait à moi également. Je n'apprécie aucun de vos regards à son égard.

Je ne comprends pas ce qu'il cherche à faire en prenant ma défense devant ses sujets. Cela ne le rendra que plus faible à leurs yeux. Il n'est pas capable de blâmer une femme qui a tenté de l'assassiner.

- Ma femme ne m'a pas tué. Dit-il. Si quoi que ce soit, elle m'a sauvé. Elle m'a aidé à garder le portail entre ce monde et le royaume des morts ouverts, jusqu'à ce que je puisse en sortir. Et puisque durant ces derniers jours les mortels l'ont accusés de traîtrise, elle n'a eu d'autres choix que de leur mentir, disant qu'elle m'a tué pour que le sort des traîtres ne s'applique pas à elle.

Il prend alors ma main dans la sienne, et je suis toujours autant confuse. Ce qui me rend d'autant plus confuse est lorsqu'il approche ma main de ses lèvres pour l'embrasser.

- Nous sommes très amoureux l'un de l'autre. Annonce-t-il sans gêne. J'aime profondément ma femme, et je ne tolérerais aucun manque de respect envers elle.

J'ai le souffle coupé pendant un instant, tentant d'assimiler ses paroles. Tout est faux, bien-sûr, mais l'entendre de sa part me paraît si étrange et me fait questionner le futur. Mon esprit se remplit de "et si ?", comme s'il était probable qu'un jour il prononce ce genre de mots pour de vrai.

- Alors pourquoi étiez-vous absent ces derniers jours ? Demande l'un de ses sujets. Et pourquoi votre épouse avait-elle besoin d'un médecin ? Avez-vous tentés de l'assassiner ?

Quelques personnes soutiennent sa réflexion, mais l'Empereur balaie rapidement leurs doutes.

- Le prince des fées a découvert que j'ai été en vie, il a de suite pensé que mon épouse a trahi son propre royaume et le royaume des fées. Répond-il. De plus... mon épouse était... enceinte. Elle portait notre enfant, et le prince n'a pas réfléchit. Il a tiré une flèche, causant la perte de mon enfant.

J'essaie de paraître neutre, mais je ne m'attendais pas à ce qu'il mente sur ce sujet. Maintenant, les mortels me détesteront à jamais. Si j'en suis arrivé à porter l'enfant d'un vampire, alors ils s'attendront à tout de ma part.

- Nous avions besoin de temps seuls. Continue-t-il. Maintenant que tous les doutes sont levés, je ne veux plus aucune rumeur dégradante sur ma femme soit répandue, sinon je n'hésiterais pas à recourir à mes propres moyens.

La mort.

Il n'a pas eu besoin de le dire pour que tous comprennent, laissant un frisson de peur quitter le corps de tous.

- Merci d'avoir été présent. Conclut l'Empereur. Profitez bien de la fête.

Et lorsque l'Empereur s'en va de la salle du trône, tout le monde vaque à ses occupations. Je m'empresse de marcher aux côtés de l'Empereur.

- Merci de m'avoir défendue. Dis-je, avec sincérité.

Il s'arrête alors d'un coup, puis se met face à moi.

- Tu es mon épouse, j'ai le devoir de te défendre. Me dit-il. Si je ne t'ai pas punis pour ton action, alors personne d'autre n'a le droit de te punir.

Je hoche la tête. Je sais que tout est une question d'honneur, mais pour cette fois, j'aurais aimé qu'il ne le fasse pas que pour ce prétexte... j'aurais aimé qu'il le fasse pour une autre raison.

Et je ne suis plus sûre si je veux qu'il me déteste ou bien qu'il m'aime. Je l'ai défié, certes, mais je ne suis plus très certaine. Plus il m'aimera, plus mon cœur parlera. Et la voix de mon cœur devient de plus en plus forte chaque jour, et je crains qu'il puisse dépasser la voix de ma raison, la faisant taire à jamais.

- Et cette histoire d'enfant... je sais que cela t'a rendu mal à l'aise, mais j'avais besoin d'avoir leur pitié pour toi. Me dit-il. Et j'avais besoin de faire taire les ministres, car ils me pressent depuis bien trop longtemps à avoir des enfants.

- ... Et si l'on a jamais d'enfants ?

- Eh bien, il va falloir que je trouve une rapide solution. Dit-il en soupirant. Ils me demanderont de prendre une maîtresse, ce qui est impensable, ou bien je vais devoir attendre une cinquantaine d'années.

Attendre ma mort aurait été plus précis. Mais je comprends, je suis son seul obstacle pour avoir des héritiers. Cependant, même si j'accepte d'avoir des enfants, ils souffriraient beaucoup trop si leurs deux parents sont ennemis.

Je pense que la meilleure solution est d'attendre ma mort...

Blood's CrownOù les histoires vivent. Découvrez maintenant