Blood's Crown

107.

Tout s'est passée si vite. J'ai tué Edham. Son corps gît sur le sol de ma chambre, ses yeux toujours ouverts. Je ne regrette rien, cela devait arriver un moment ou un autre... mais je ne cesse de penser à ce que j'ai perdue à cause de lui. Mon père aurait pu être toujours présent... mes souvenirs avec Revan auraient pu me revenir plus tôt...

- Doit-on amener le corps jusqu'au royaume des fées, votre Majesté ? Demande un des gardes.

- Oui. Laissez-le à la frontière et ne la dépassez pas. Leur commande Revan. Ils vous tueront, sinon.

Ils hochent la tête avant de porter le corps d'Edham. J'ai l'impression que ses yeux me regardent toujours, me donnant une envie de vomir. Je vois son corps s'éloigner jusqu'à disparaître de mon champ de vision. Il n'a vécu que vingt-cinq ans. Il aurait pu vivre jusqu'à tant d'années... si seulement son obsession n'a pas détruit son cœur. Il a causé sa propre mort.

- Edham ! Dis-je en courant.

Mon rire faisait écho dans l'air, alors qu'Edham me courait après, riant lui aussi. Chaque semaine, lui et mes autres amis viennent jouer avec moi après mes cours.

- Attendez, dit une de mes amies, quelqu'un est là.

Je lève le regard face à moi, et vois un petit garçon caché derrière un arbre. Il semblait intimidé. Il semblait effrayé.

- Qui es-tu ? M'écrié-je.

Je m'approche de lui mais Edham m'arrête en me tenant par le bras.

- C'est un vampire. Dit-il. Papa a dit que les vampires sont méchants. Ne l'approche pas.

Mais je ne l'ai pas écouté. Je me suis approchée du garçon, silencieux et timide. Je finis par lui tendre la main.

- Moi, c'est Venelia. Dis-je en souriant. Tu t'appelles comment ?

- Re... Revan... Dit-il faiblement.

- Viens jouer avec nous. Lui dis-je. Ne reste pas seul.

Je l'attrape par la main et m'avance avec lui, vers mes amis. Il n'osait pas les regarder. Certains se sont cachés, par peur de lui. Edham, lui, était en colère.

- Il n'a pas sa place, ici ! S'écrie-t-il. On jouait si bien seuls...

Par la suite, j'ai bien-sûr refusé. Les enfants se sont enfuis, et Edham est partit également, avec déception. Il n'y avait plus que Revan et moi. Et je pense que ce jour-là a marqué la fin de mon amitié avec Edham. Mais je chasse ses souvenirs. Cela ne me fera pas de bien d'y penser.

Je me contente seulement de penser à Revan qui me serre dans ses bras depuis le moment où il m'a trouvé dans la chambre. Je n'ai pas pleuré. Pas une seule larme n'a quitté mes yeux. Je refuse de lui donner cette satisfaction, même après sa mort.

Mais c'est la première fois. C'est la première fois que j'ai tué quelqu'un. Quelqu'un que je connaissais. Et la sensation n'est pas satisfaisante. La vengeance n'est pas satisfaisante.

- C'est finis, Revan... Chuchoté-je. Edham n'existe plus. C'est finis.

- C'est finis, mon amour. Répète-t-il en me caressant les cheveux. Tu as bien fait.

Je ravale mes larmes qui menacent de couler un peu plus à chaque instant. Je ne me sens pas bien. Et je n'arrive pas à en savoir la raison. Est-ce la mort de mon père ? Le fait qu'Edham ait faillit me violer ? Ou bien sa mort ? Je ne devrais pas à me sentir mal. Cette mort, il la méritait. Il la méritait amplement...

- Edham était une bonne personne, tu sais... Dis-je d'une voix faible. S'il ne m'avait jamais connu, il aurait été en vie, il serait resté bon.

- S'il était bon, Venelia, il n'aurait jamais fait ce qu'il t'a fait. M'assure Revan. Son cœur était noir, mais c'était facile de le dissimuler avec un visage d'ange. Ne te blâme pas pour la noirceur des autres.

Peut-être qu'il a raison. S'il n'était pas mort, je serais recroquevillé sur ce lit en train de pleurer, après ce que m'aura fait subir Edham. Il était déterminé. Il ne se serait pas arrêté, malgré mes pleurs et supplications.

- Viens, je dois soigner ta blessure, puis on va se reposer. Me dit-il.

- ... Peut-on dormir dans une autre chambre ? Lui demandé-je. Juste ce soir. Juste le temps qu'ils nettoient ici et changent le lit.

- Bien-sûr. Bien-sûr, viens.

Je le suis lentement et dans le silence. Si Edham avait réussit ce qu'il avait en tête, il ne m'aurait pas que tué. Il m'aurait arraché des bras de Revan. Je n'aurais jamais été pareil avec lui, ma destruction l'aurait affecté, comme une maladie contagieuse.

Une fois dans la chambre, je me tourne vers Revan. Je dois être forte pour lui, je dois garder la tête haute. J'ai réussis à survivre, encore. Et je survivrais autant de fois qu'il le faudra. Pour lui. Pour moi. Pour notre futur.

- Embrasse-moi, Revan. Efface chaque trace qu'il a pu avoir sur mon corps, dis-je doucement, s'il te plaît.

- Venelia, je ne pense pas que ce soit le moment, je...

- S'il te plaît.

Je le suppliais presque. Je sais qu'il s'inquiète pour moi, mais moi, je le veux. Il n'y a que lui qui peut me faire oublier. Ses lèvres sur les miennes me feront oublier les lèvres d'Edham. Ses mains sur mes bras me feront oublier le touché des mains d'Edham. Son regard sur moi me fera oublier le regard d'Edham. Revan me fera oublier Edham.

Je le vois toujours hésitant, alors je me mets sur la pointe des pieds et pose mes lèvres sur les siennes. Il m'a fallu que de ce simple contact pour oublier la sensation des lèvres d'Edham.

- Venelia, tu ne vas pas bien... Dit-il d'une voix douce. Viens, repose-toi.

- Je vais bien ! Rétorqué-je. Je vais bien, seulement si tu es à mes côtés.

- Je suis à tes côtés. M'assure-t-il. Je n'irais nul part. D'accord, mon amour ? Je vais d'abord soigner ta blessure avant qu'elle ne s'infecte.

Je regarde mon coude et mes mains. J'avais oublié que je saignais. J'acquiesce alors, laissant Revan prendre soin de moi. Il était concentré sur ma blessure, mais je pouvais sentir qu'il se blâmait de ne pas avoir été là à temps. Il se blâme encore et encore.

- Merci. Dis-je doucement. Merci d'avoir été là, d'être là.

Il me regarde longuement, comprenant que j'ai cernée ses pensées qu'il tentait de dissimuler, en vain. Je le serre dans mes bras, ma tête contre son torse. Il me serre à son tour, fort, comme s'il avait peur que je disparaisse.

Notre cauchemar est terminé. Plus aucune menace ne plane au-dessus de nous, désormais. Plus de haine, plus de peur, plus de mort.

C'est tout ce que je demande.