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La lumière autour de moi semble disparaître une par une, alors que le souvenir de Venelia hante mon esprit. Je me rappelle de son corps entre mes mains, de son sang qui ne coule désormais plus, ou bien de son âme qui tentait de s'attacher désespérément à son corps, refusant de s'en aller.

Je ne sais plus comment fonctionner. Mes actions semblent se répéter au cours des dernières minutes, comme si je ne savais rien faire d'autre. Je ferme les yeux, puis les rouvre, regarde Venelia, caresse ses cheveux et son visage avant de tenter de me rendormir avec elle.

Et dire qu'il y a quelques heures, elle et moi étions si heureux, ne nous doutant pas un instant que cela serait la dernière fois que nous allions être ensemble.

- Dors... dors, mon ange.

Cette fois, c'est la bonne, me dis-je. Je ferme les yeux, ne voulant plus vivre un instant de plus alors que ma Venelia a dû rejoindre le royaume des morts depuis longtemps... elle doit sûrement m'attendre devant la porte du royaume, se demandant si je vais continuer à vivre ou bien la rejoindre.

- Laissez-moi entrer !

Ma sœur. Illara. Elle est derrière la porte de ma chambre, retenue par mes gardes. Je souris légèrement, les larmes coulant de mes yeux. J'ai pu entendre sa voix une dernière fois. J'aurais aimé la voir, elle et Kayda, mais je n'ai plus de force. L'Empereur des vampires, le plus puissant être sur terre, n'arrive plus à porter son propre poids.

La mort l'a mis à genoux, et il n'arrive plus à se relever.

- Votre Altesse, l'Empereur l'a interdit. S'il vous plaît, ne nous forcez pas.

- Si mon frère meurt, je deviendrais impératrice, leur dit-elle, et mon premier ordre sera de vous exécuter ! Bougez, sinon je ne vous épargnerais pas !

Ma réponse en l'écoutant est de serrer Venelia contre moi. Son corps aussi froid que le mien.

- Grand frère ! Je sais que tu m'entends ! Pleure-t-elle. Pitié... pitié, ouvre cette porte !

Je suis désolé, Illara.

- Vous voulez perdre votre Empereur ?! S'écrie-t-elle. Je peux l'arrêter ! Laissez-moi entrer... je vous en supplie. Je peux sauver l'Empereur.

S'en suit un moment de silence. Et je me demande ce qui leur prend autant de temps de préparer mon cercueil. J'aurais dans mes bras Venelia éternellement. Mon âme ne sera plus là, mais mon corps le sera. Je tomberais dans un sommeil éternel, et ni mon corps ni celui de ma femme ne se décomposera. À jamais, elle et moi nous nous endormirons dans les bras l'un de l'autre. Même la mort ne nous séparera pas.

Puis la porte s'ouvre.

Ma sœur débarque, et je me force à ouvrir les yeux. Elle me regarde avec soulagement, mais lorsque ses yeux regardent Venelia, sa tristesse devient beaucoup plus visible.

- Revan... ne le fais pas. Me demande-t-elle.

Je tourne ma tête vers Venelia, le cœur toujours déchiré. Une vie sans elle est-elle possible ?

Illara s'approche. Elle ne s'approche pas de moi, mais de Venelia. Puis elle s'assoit à ses côtés, sur le lit. Je la regarde, sans dire un mot, caresser la joue de ma femme tendrement.

- J'ai sentis la terre se déchirer pour elle... chuchote-t-elle. Nous l'avons tous sentis.

Les larmes ne cessent pas, je les laisse couler librement de mes yeux, permettant à mon cœur d'exprimer une dernière sa douleur.

- Tout est sombre dehors. Les mortels ont abaissés leurs drapeaux du haut de leur palais, et nous avons abaissés le nôtre. M'informe-t-elle. Les habitants de l'empire ont tous un drapeau noir accroché à leur maison. Et les mortels se demandent si elle reposera aux côtés de ses parents.

- À mes côtés... Dis-je faiblement. Dans mon cercueil.

Les mots sortent de ma bouche si difficilement, comme un être mourant.

- Quelque chose s'est passé dehors... dans le jardin. Me dit-elle doucement. Tu devrais partir voir.

Je lève le regard vers elle, et il n'a suffit que d'un regard pour qu'elle se lève et s'approche de moi. Elle me serre fortement dans ses bras, et je peux sentir que tout son être est inquiet. Inquiet de la réponse que je lui donnerais. Inquiet de la suite des événements.

- Plus la force... Dis-je difficilement. Je... n'ai plus... la force.

Ses larmes coulent sur mon épaule, je me sens malheureux de leur faire autant de mal. Mais je n'ai véritablement plus de force. Je suis au bout du rouleau. Et je m'étonne même sur le fait que je sois toujours en vie.

- Renferme tes émotions un instant, dit-elle d'une voix douce, c'est important... s'il te plaît.

Je ne pouvais pas. Je ne pouvais pas m'imaginer vivre un instant sans cette douleur en moi. Vivre sans que la mort de Venelia ne fasse quoi que ce soit en moi. C'est impensable...

- Laisse-moi... avec Venelia...

- D'accord. Je vais te laisser. Dit-elle doucement. Mais d'abord, viens voir le jardin, ensuite je m'en irais.

Je soupire. Bien... je me lève du lit, les membres de mon corps tremblants toujours. Ma soeur pose mon bras autour de son épaule et je m'appuie sur elle. Elle m'amène jusqu'au balcon, ne sachant toujours pas ce que j'allais voir.

Je pouvais voir au loin le palais de Venelia, avec le drapeau des mortels abaissé. J'aurais dû la laisser vivre là-bas. J'aurais dû...

- Regarde à l'extérieur.

Je lève alors le regard par dessus le mur, et vois le jardin rempli de fleurs rouges. Je fronce les sourcils. Je ne me rappelle pas les avoir vu plus tôt. Je m'approche un peu plus, des lycoris. Des lycoris rouges peuplent le jardin entier. La fleur de la mort.

Mais à leur milieu, il y a une lumière. Une petite lumière.

- La lumière... ? Dis-je faiblement.

- C'est ce que je voulais que tu vois.

Je continue à la fixer, intrigué, alors que la lumière devient de plus en plus faible. Elle s'affaiblit au même moment où le soleil commence à se lever. Puis enfin, elle relève son secret.

Blanc.

Un seul.

Un seul lycoris blanc, au milieu de ses semblables de couleur rouges.

Au même moment, je sens l'âme de Venelia dans la chambre. Je tourne alors vivement la tête, et j'ai faillis trébucher à cette vue...

Sa poitrine.

La poitrine de Venelia vient de se soulever.

Blood's CrownOù les histoires vivent. Découvrez maintenant