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Mathieu essaya au mieux de profiter de sa soirée. Il avait bu plusieurs verres d'alcool, avait participé à chaque joint ou danse. Il avait même crié lors de l'arrivée du champagne pour se fondre dans la masse. Toutefois, le cœur n'y était pas et rien n'y faisait. Ses amis l'avaient incité à se détendre et à se mettre dans l'ambiance mais dès qu'ils tournaient le dos, le blond se réfugiait sur une banquette de la boîte de nuit ou sur le patio extérieur dans l'ombre afin qu'on le laisse tranquille. Certains de ses amis abandonnèrent l'idée de changer son humeur. Toutefois, ce ne fut pas du goût de Walid et Lisko qui le regardèrent de loin tout se questionnant sur son comportement. Finalement ce fut le premier qui se décida à le rejoindre, certain d'être plus diplomate que le second qui souhaitait seulement le secouer jusqu'à ce que la lumière y entre.

Son ami prit place à ses côtés et Mathieu ne put s'empêcher de fuir son regard et de s'ancrer dans le ciel sombre. Les étoiles étaient invisibles ici, le ciel était plombé et de toute manière, les néons de la salle pollué l'atmosphère. Il inspira profondément, rien que cette pensée le frustrant. Il n'était pas à sa place et cette idée fit battre son cœur désagréablement.

« Qu'est-ce qui se passe ? » Walid le poussa d'une épaule tandis que le blond semblait pâlir à vue d'œil. « J'vois bien que tu t'amuses pas. » Il regarda ses ongles, arrachant à vif les peaux. « C'est un moment important dans ta carrière solo, Polak, tu t'en rends compte ? Flav parle déjà de produire un second projet. » Il hocha la tête, conscient de cette chance. Ses mots eut l'effet d'un coup d'épée dans le dos. Il n'avait besoin de plus de culpabilité. « Tu veux rentrer ? »

« J'veux pas être ici. »

« Tout le monde est venu pour toi. On est tous heureux pour toi. On te soutient, tu sais. » Il hocha la tête. « Parle mec, tu peux pas rester dans ton coin. Si tu veux pas être là, ça me va, j'te fais sortir en douce et je trouve une excuse pour les autres mais dis-moi pourquoi. » Il hésita à mentir et sa posture courbée ainsi que sa nouvelle cigarette le trahirent. Walid connaissait ce genre de regard parce qu'il avait eu le même quelques années auparavant. « Tu sais, mes parents sont encore ensemble. Ils sont genre super heureux mais pourtant, j'ai jamais cru que ça m'arriverait. Pas après la prison, après toutes les merdes et les folles. Mais Jelila, elle est tombée comme ça, sur mon chemin et j'ai tout donné pour elle. Parfois, il faut pas louper les occasions, même si on croit ne pas en valoir le coup. » Mathieu voulut rétorquer qu'il ne comprenait pas où il voulait en venir. Toutefois, son ami ne lui laissa la possibilité. « J'ai vue comment tu regardais Madeline pendant tout le repas. »

« C'est pas ce que tu crois. »

« Je crois bien que si. » Walid haussa les épaules. « Ca fait flipper, j'le sais, mais c'est peut-être la plus belle histoire qui peut t'arriver. »

« Elle a besoin de mieux. » Mathieu pinça ses lèvres un instant tout en fixant l'horizon d'un air absent. « Toi, c'est complètement différent. Tu peux pas comprendre. Jelila n'a pas la même vie que Madeline. »

« Tu te soucis d'elle, pas de doute. » Le blond tourna la tête. Cette déclaration était d'une stupidité profonde. Il voulait bien plus que le bonheur pour Madeline. Il voulait changer le passé et même le présent afin qu'elle puisse avoir un futur apaisé. « Alors qui de mieux placer que quelqu'un qui se soucie d'elle pour s'assurer qu'elle tombe sur le bon gars ? » Son ami se leva. « Deviens ce gars là, c'est simple. »

« C'est complètement stupide. » Il le suivit tout en secouant la tête, refusant d'écouter de tels propos. « J'peux pas devenir mon opposé. J'vais juste boire un autre verre et ça ira. Elle sortira de ma tête et c'est tout. »

Son ami ne prit pas la même direction, le laissant littéralement mijoter dans son discours. Mathieu s'approcha du bar mais n'eut la chance de commander une autre liqueur qu'il se faisait accoster par une jeune femme. Il n'évita pas son regard et les deux se jugèrent. Elle était jolie, tout aussi ivre que lui mais pour sûr, elle le connaissait. Il le voyait seulement à la manière dont elle le scrutait comme s'il était une sorte d'objectif à atteindre. Elle s'appuya contre le bar, espérant que sa tenue et son maquillage parfait attireraient le blond.

« T'es bien Polak ? » Il hocha la tête, un léger sourire sur les lèvres, appréciant d'être reconnu comme lui-même, en solo, et pas dans le Panama Bende. C'était un signe qu'on le connaissait, dorénavant et c'était rassurant après tout le travail. « Félicitations pour ton album. »

Il ne la rectifia pas, la remerciant seulement poliment. Comme si sa politesse fut une invitation à être plus amicale, elle posa une main sur son avant-bras et comme si une pulsion lui prit, il se retira tout se redressant. Il ne prit pas la peine de répondre, de d'excuser ou même de la rectifier sur son comportement, réalisant qu'il y a quelques semaines, il aurait pris cette occasion pour profiter et oublier ses problèmes. Toutefois, les mots de Walid semblaient s'être ancrés douloureusement sous sa peau et quand celle-ci avait été touchée, un électrochoc désagréable l'avait prit.

Il chercha du regard son ami avant de le rejoindre. Il s'approcha de son oreille pour murmurer.

« Je rentre, je suis crevé et... »

Il ferma les paupières, les lèvres pincées. Il avait la nausée et l'envie d'oublier la personne qu'il était. Il avait conscience de ne pas mériter Madeline depuis le début mais cette soirée était bien plus que douloureuse. Les deux semaines de promotion lui revenaient en tête désagréablement.
Il se dégoûtait.
Pendant que lui avait profité, jusqu'à perdre le sens de la réalité, Madeline, elle l'avait perdu tout autrement. Baignée de ses traumatismes, elle avait cherché sa vengeance jusqu'à oublier qui elle était vraiment.

« Et j'ai juste envie de rentrer. »

« Ok, pas de soucis. Préviens moi quand t'es arrivé, seulement. »

« Je rentre chez ma grand-mère. Ne te fais pas d'idée. »

« Je ne me fais aucune idée. Je sais très bien que tout arrive à qui s'est attendre. » Ils se firent une accolade rapide. « Pense un peu à toi, t'es pas ce que tu crois. Pense à ce que tu veux, à ce que t'as besoin. C'est tout ce qui compte. »

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