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Madeline et Mathieu ne se virent pas pendant environ une semaine, loin de l'autre à essayer de retrouver un équilibre avant de perturber l'autre. Ce fut le blond qui craqua en premier, l'appelant en fin d'après-midi alors qu'il était au studio. Il était seul et la rythmique des mélodies réveillait un peu plus son besoin de compagnie, de sa compagnie. Elle avait été dans sa tête chaque jour mais sa propre humeur était tellement instable qu'il avait refusé de faire faire le premier pas. De plus, pour changer, il culpabilisait de lui avoir donner les cachets, bêtement, aveuglé par ses propres sentiments pour agir justement.

Toutefois, il céda à son propre besoin de la voir. Elle répondit quelques secondes plus tard, émergeant de son sommeil. La semaine de Madeline n'avait pas été aussi productive et les comprimés pris, presque de manière calculée pour rester dans un état second, lui avait permis d'être immergée dans une sorte de nuage cotonneux et imperméable à la réalité.


« Salut. » Il tourna sur sa chaise, une roulée entre les lèvres pour se détendre tandis que son cœur semblait se remettre en vie en entendant sa voix. Il n'avait plus de doute sur le manque de sa présence.

« Salut Madeline, ça va ? » Elle ne répondit pas. Leur dernière discussion n'avait pas terminé d'une mauvaise façon mais elle avait honte de son comportement, honte de lui avoir menti et de le faire encore. « Désolé, je t'ai pas appelé avant, j'ai passé une semaine de merde à régler les problèmes de famille. »

« Pas de soucis. »

« Je passe ma soirée au studio, tout seul, si tu veux venir. » Elle hésita, allongée dans son lit, ne se souvenant aucunement de la dernière fois où elle était passé sous la douche. Toutefois, comme si son cœur répondit avant sa tête, elle accepta. « Cool, je t'attends. »


Elle quitta son lit et passa sous la douche, essayant au mieux d'effacer son visage tiré par les larmes et les cernes. Elle ne prit la peine de se maquiller en se voyant dans le miroir, certaine que rien ne pourrait cacher ses excès et sa tristesse. Elle enfila une tenue confortable puis pris un taxi pour le retrouver rapidement. Elle entra dans le studio, étrangement à son aise, et retira le casque du blond alors qu'il ne l'avait entendu, trop concentré sur son écran. Il ne sursauta pas, se retournant seulement, un sourire sur les lèvres alors qu'elle enfilait l'accessoire, son sac à main déjà abandonné dans l'entrée.


« Fais comme chez toi. » Elle prit place sur le second fauteuil. « Tu veux écouter ? » Elle hocha la tête. Il avait écrit un texte rapidement avant qu'elle n'arrive. « C'est en construction et il y a juste ma voix, c'est pas ouf.. »


Elle ne prit pas la peine de répondre, retirant ses baskets pour se recroqueviller sur son siège. Lui, n'essaya pas d'argumenter plus, l'observant mais surtout, ne loupant aucunement ses yeux encore vitreux. Elle avait consommé, il n'avait aucun doute et à cette pensée, il rangea son pilon, refusant de l'allumer de peur de le partager et d'aggraver son état. Tandis qu'il attrapait une canette de soda pour elle, elle remit en boucle le passage, profitant de son inattention pour réécouter. Ce fut le blond qui lui retira le casque pour lui donner sa boisson.


« C'est juste un truc vite fait. T'attardes pas dessus. »

« J'aime bien. » Elle vérifia la canette encore et encore. « Même si je trouve le texte triste, sans espoir. » Il haussa les épaules tout en à l'observant alors qu'elle n'arrivait à combler son trouble. « D'habitude, il y en a toujours un peu. »

« La semaine n'a pas aidé mais je vais bien, si c'est ça qui t'inquiète. » Elle essuya avec sa manche une dizaine de fois avant d'enfin l'ouvrir et d'en boire une gorgée. « Un truc à manger ? »Elle hocha la tête, acceptant par politesse plus que par envie. L'absence d'appétit devenait une autre habitude. « Et... regarde. » Il ouvrit le placard. Celui-ci débordait, rien que pour elle. « Rien que pour toi. »

Un sourire apparut enfin sur les lèvres de Madeline. « T'es vraiment génial. » Elle s'inclina pour attraper un paquet de biscuits. « En plus, il y a mes préférés. » Il se pinça les lèvres pour se retenir de dire quoi que ce soit, son cœur palpitant seulement. « Merci, Monsieur Polak. »


Il haussa les épaules avant de s'allumer une cigarette pour cacher sa gêne. En achetant tout ça, il avait trouvé ce geste logique et normal mais en l'instant, il aurait préféré oublier ses gâteaux préférés pour pouvoir se barricader un tant soit peu face à elle. Comme s'il oubliait comment agir, il poussa d'un léger coup de basket son fauteuil avant de le rattraper pour la rapprocher jusqu'à ce que leurs accoudoirs se cognent entre eux. Elle pouffa tout en poussant de son pied sur sa cuisse.


« Ca me fait plaisir que tu sois venue. »

« Ca m'avait manqué de venir ici. » Elle lui donna un biscuit tout en gardant leur proximité, étrangement, bien ici. « »L'ambiance, les néons, le calme quand il n'y a que toi et moi... » Il resta silencieux, continuant de l'observer. « Je me sens en sécurité. »

« Tu peux venir quand tu veux, tu sais ? »

« Merci. » Ils se regardèrent dans les yeux, sans un mot. Elle tapota ses pieds contre la cuisse de Mathieu, soudainement gênée de ce rapprochement progressif. Elle n'était pas prête, elle n'avait pas envie d'une relation, ni qu'il y croit. Elle refusait lui donner de l'espoir. « Il faut que je te dise un truc. » Il fronça les sourcils face à son ton soudainement sérieux. « Je t'adore, vraiment, tu sais. J'ai confiance en toi et j'apprécie être avec toi mais je veux pas que tu te fasses d'idée. Je.. j'ai pas envie de relation, de me rapprocher plus qu'on ne l'est. »

« Madeline...Madeline.. T'as pas besoin de me dire tout ça, je le comprends, je le sais. » Il ne s'éloigna pas, à l'inverse, il ne la quitta pas des yeux, refusant de perdre sa confiance. En tombant pour elle, il avait compris que tout ne serait pas rose. Néanmoins, à l'heure actuelle, c'était elle ou rien. « Notre relation me suffit amplement pour le moment, comme elle est. » Il disait vrai, sans mensonge, sa présence le comblait et il voulait rien d'autre, plus personne d'autre. « Ne réfléchis pas à ça, reste toi-même et je ferai de même. »

« Ca me va. » Elle poussa une nouvelle fois sa cuisse de son pied. « Tu as autres choses à me faire écouter ? »

« Toujours. »

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