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Mathieu avait espéré passer une soirée tranquille avec Madeline, manger quelque chose et peut-être enregistrer un peu pendant qu'elle écouterait ou se reposerait derrière lui, sa présence comme inspiration. Seulement, ce studio était devenu un refuge pour tous les amis du blond. Alors, sans même prévenir, ils arrivèrent tous un par un, chacun avec une livraison de nourriture et de boissons.

Plus le lieu était envahi, plus la brune se faisait petite, espérant ne pas attirer l'attention, recroquevillée entre son l'accoudoir et le locataire. Ses jambes n'étaient plus étendues à son aise, elles étaient repliées sous le plaid, se protégeant presque par la couverture. Et, malgré la présence de Mathieu à ses côtés, de quelques personnes qu'elles connaissaient dorénavant, elle n'arrivait à se détendre. Il chercha par tous les moyens de l'aider, même en lui glissant une part de pizza dont il avait déjà mordu dedans. Elle en grignota un bout sans pour autant  être convaincu, prenant juste un peu avant de lui rendre. Il s'inclina vers elle pour susurrer à son oreille.

« Tu veux que je commande un truc ? Ou que j'aille chercher un truc dans mon placard ? » Elle secoua la tête, refusant de l'embêter, ayant l'impression de faire un caprice. Alors, elle reprit sa part sans un mot. « Te force pas à te rendre malades ok ? »

« Ca va, ne t'en fait pas. » Elle regarda la nourriture comme si elle sortait d'une poubelle. « Je risque rien, je le sais. »

Elle termina rapidement et Mathieu glissa sa main dans son dos légèrement, juste un instant, avant de s'appuyer contre le dossier du canapé et de reprendre une conversation, interpellé malgré lui. Madeline, elle, resta immobile, la nausée au creux de son estomac et un vertige en tête. Le jeune homme le perçut à sa pâleur mais malgré un nouveau geste vers elle, elle ne répondit pas, incapable. Son cœur commença à brûler dans sa poitrine alors qu'elle semblait refaire un deuxième épisode, en sa présence. Elle ne lui avait aucunement expliqué quoi faire mais il savait  ce qu'elle vivait maintenant. Il voulait qu'elle sorte d'ici, qu'elle se retrouve dans un lieu calme et réconfortant, sans que les autres ne voient sa vulnérabilité, certaine que Madeline en serait malade.

« On fait une partie de fifa ? »

Les garçons mordirent à l'hameçon et il profita du mouvement créé pour prendre la main de Madeline et l'accompagner dans le petit studio. Elle le suivit sans réfléchir, presque complètement absente, en incapacité de prétendre que tout allait bien. Il ferma derrière lui et elle resta immobile, là où il l'avait abandonnée juste pour la porte. Il s'approcha à elle jusqu'à ce que le front de Madeline touche son sweater. Et, comme s'il réveillait quelque chose en elle par ce rituel entre eux. Elle tira sur le tissu de son haut et il profita de se réaction pour l'enlacer contre elle.

« Je suis là, Madeline. » Il la serra un peu plus fort pendant qu'elle pleurait. « Dis-moi ce que je peux faire pour toi. Est-ce que tu veux qu'on s'en aille ? » Elle secoua la tête, tout ce dont elle avait besoin, c'était un morphinique pour s'endormir, mais elle savait très bien qu'il refuserait. La main du blond passa de ses épaules au bas de son dos pour la guider sur le canapé, ses propres jambes tremblantes. Ils prirent tous les deux places sur le canapé. « Est-ce que tu sais où tu es ? Tu le sens ? Je... »

Madeline se recroquevilla contre lui, ses pieds sous ses cuisses, sa tête sur son épaule tandis qu'il caressait sa nuque tendrement, espérant ne pas l'effrayer par ce geste mais elle en fut rassurée. Elle avait connu des gestes doucereux, notamment par Thomas mais ceux de Mathieu semblait différent. Elle n'en connaissait pas la raison mais c'était simplement pare que ce dernier ne demandait rien en retour, seulement soucieux de son état. Elle ne répondit pas à ses questions, se rapprochant seulement de lui jusqu'à reposer sa tête sur ses jambes, s'endormant presque par sa réassurance, si ce n'était la nausée qui la rongeait ainsi que la peur de perdre connaissance.

« J'ai la tête qui tourne. »

« Parce que tu es stressée. »

« Ou parce que j'ai mangé la pizza. »

« Il n'y avait rien dans cette pizza, j'te le jure. » Du bout des doigts, il dégagea son visage de sa nouvelle frange. Cette proximité le rendait un peu plus amoureux. Il n'avait jamais connu ces instants affectueux, que ce soit dans sa famille, avec un ami ou même avec une femme. Et il fut comblé, au-delà du contexte, que ce soit elle. « Ton cerveau te joue des tours parce qu'il a vécu beaucoup de traumas et il veut te protéger pour ne pas revivre tout ça. Tu vois ? C'est comme quand tu reviens de guerre, ton inconscient prend le dessus. »

« J'ai pas été en guerre. »

« Je sais mais les syndromes post-traumatiques sont pareils Madeline. Enfin, je crois. » Il haussa les épaules. « J'ai regardé sur internet l'autre jour, pour... t'aider, tu vois ? Pour appréhender, voir les signes... ne plus merder encore et encore.. avec toi. » Il tira sur le haut de la brune pour recouvrir le bas de son dos. « J'veux que tu te sentes mieux et j'peux pas faire beaucoup plus mais... j'essaye. »

Elle se redressa pour le regarder, à quelque centimètres de son visage. Ses vertiges lui donnaient l'impression que ses grains de beauté étaient des sortes d'étoiles filantes. « Pourquoi est-ce que tu me repousses pas ? » Il fronça les sourcils confus face à ce changement de discussion soudain. « Pourquoi est-ce que tu es gentil avec moi ? Est-ce que t'agis seulement parce que tu te sens coupable d'avoir été témoin ? »

« Tu penses vraiment ça ? »

« C'est ce que je ressentirai à ta place, je crois. Je me.. dégoûte moi-même alors.. à part un geste de charit.. »

« Hors de question que tu finisses cette phrase. » Il quitta son regard pour observer le mur derrière elle, quelques secondes, certain que son cœur allait sortir de sa poitrine pour rejoindre le sien, une bonne fois pour toute. « Tu me dégoûtes pas. Loin de là. Je te trouve magnifique, même là-dedans. » Il posa un instant son index contre sa tempe. « Dès que je t'ai vu dans la cuisine à essayer d'ouvrir cette bière, j'ai eu un.. putain de bug... même pas un coup de foudre parce que ça, ça dure pas, non, t'as été... bien plus... j'venais à chaque fois en espérant t'y voir, juste pour échanger deux mots. J'ai jamais ressenti ça, j'te le promets, pour personne. » Il descendit sa main pour rejeter en arrière ses cheveux bruns. « Je n'ai pas pitié de toi. T'entends ? Si quelqu'un devait avoir pitié, c'est toi pour moi, parce que j'ai été un putain de lâche du début jusqu'à la fin. J'me rendais pas compte, j'ai préféré nier les faits parce que personne ne peut faire ça, j'peux pas imaginer quelqu'un faire tout ça... » Elle attrapa sa main pour entrelacer leurs doigts. « Alors oui je me sens coupable mais c'est pas pour ça que je suis là, à tout faire pour que tu sois près de moi. J'ai ce putain de truc pour toi. Et ça s'en va pas. J'ai besoin que tu sois là, avec moi, tout le temps. Et crois moi, c'est  bien plus qu'une simple adoration passagère. »

« Non ? »

« Non, t'es dans ma peau, jusqu'à la fin de mes jours, j'le sais. »

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