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Un mois plus tard, Madeline put reprendre son semestre manquant pour valider son année. La reprise était difficile, bien plus qu'elle n'avait osé l'imaginer. L'absence de cours pendant plusieurs mois puis l'incapacité de se concentrer très longtemps n'étaient qu'une partie minime de tous les freins à sa réussite. Néanmoins, elle continuait d'y aller, sans relâche, espérant que le temps et ses efforts face le travail. 
Elle sortit de ses cours, épuisée, filant tout droit pour ne discuter avec personne. Elle resserra son sac contre elle jusqu'à sortir du bâtiment. Arrivée dans la rue, elle s'arrêta pour prendre à manger pour Mathieu et elle, attendant son uber pour le retrouver au studio. Elle arriva à peine vingt minutes plus tard, un peu plus endormie, rêvant de s'allonger sur la banquette. Lorsqu'elle entra, elle ne fut pas surprise de le retrouver concentré sur son ordinateur, casque sur les oreilles. Elle déposa le sachet de nourriture sur la table basse derrière lui avant de poser ses mains sur ses épaules. Il sursauta brutalement tout en se retournant.


« Tu veux me tuer ? » Il attrapa une de ses mains et elle se pencha pour embrasser ses lèvres. « Ca va ? » Elle haussa les épaules, préférant ne pas détailler l'angoisse, la fatigue et la frustration qu'elle ressentait. Néanmoins, ça ne passa aucunement auprès de Mathieu qui se tourna complètement pour lui faire face. « Tu prends le rythme ? » 

« Non. J'vais jamais réussir, je te jure. J'suis à la ramasse. » Il l'invita à s'asseoir sur ses genoux et elle céda. Il passa une main dans son dos pour caresser sa peau, l'incitant à s'exprimer. « J'arrive pas à me concentrer plus de cinq minutes. Et j...j'angoisse. J'ai sans cesse peur de les voir... »

«...Julian n'a pas le droit d'y aller. » 


Il essaya de la rassurer mais c'était vain, s'il y avait bien quelque chose que Julian ne respectait pas, c'était la loi. De plus, ses amis, complices, voire acteur comme son meilleur ami, étaient toujours dans les parages, complètement libres. Et puis, il y avait aussi Thomas. Ce campus n'apportait plus rien de bon pour Madeline et si elle reprenait ses études, c'était seulement par fierté, pour faire quelque chose de sa vie. Elle voulait avoir un autre statut, montrer qu'elle avançait, qu'elle allait mieux mais tout semblait être plutôt un échec. 
Il n'eut la chance de trouver les mots qu'elle quittait ses genoux pour attraper le sachet.


« J'ai emmené à manger. » Elle sortit deux burgers et une barquette de frites. « J'espère que ça te va. »

« Bien sûr que ça me va, Maddie. » Néanmoins, il resta penché sur son fauteuil, inquiet. « J'peux te dire un truc ? » Elle releva le nez, les sourcils froncés de confusion. Jamais ils n'avaient eu besoin de prendre des précautions pour discuter. Ils avaient discuté de choses bien plus difficiles que ses études. « Peut-être que tu pourrais faire tes études ailleurs ? »

« Et que ça soit moi qui prenne la fuite ? »

« Il faut choisir ses batailles. » Il haussa les épaules. « J'dis ça pour toi. Si j'étais à ta place...j'aurai même pas eu le courage d'y remettre les pieds. J'vois pas le mal à simplement prendre une meilleure décision pour toi, pour ton bonheur. Je sais que tu voulais reprendre...une vie...normale mais c'est loin de l'être en retournant là-bas. Et puis, franchement, est-ce que ces études te plaisent ou moins ? » Elle ne répondit pas. C'était un sujet dont ils n'avaient jamais parlé. « Qu'est-ce que tu me dis pas ? » 

« J'ai...pas choisi mes études. » Il plissa les yeux, ne comprenant pas comment elle pouvait terminer dans de telles études sans le vouloir. « C'est le rêve de mes parents et...ils me payent mon loyer tant que je continue. » 

« Je comprends mieux. » Il attrapa deux sodas de son placard avant de lui en tendre un. Elle l'essuya anxieusement, essayant d'évacuer son angoisse et non pas à cause d'une possible drogue dessus. « Tu sais que tu pourrais choisir des études qui te plaisent ? J'ai pas pris d'appartement parce que je squatte chez toi mais...on avait ce projet ensemble alors peut-être qu'on pourrait maintenant ? Et te libérer de tes études ? Et si tu veux être complètement indépendante, tu peux prendre un petit job. » 

« Je...Ouais ? Tu crois que c'est possible ? Que je peux ? »

« J'te soutiens, quoi qu'il en coûte. » Elle abandonna son burger sur la table basse pour le rejoindre, ayant besoin d'un contact physique dorénavant. Elle reprit place sur ses genoux, entourant de ses bras sa nuque. « Qu'est-ce que tu aimerais faire ? »

« J'en sais rien, j'y ai jamais pensé. » 

« Tu peux faire tout ce que tu veux, princesse. » Elle leva les yeux au ciel, gardant un sourire béat néanmoins. « T'es intelligente, forte, trop belle. » Elle posa sa main sur sa bouche pour le faire taire. Il mordilla ses doigts mais elle n'abandonna pas. 

« J'abandonne la fac et mon appartement. » 

« Il faudra que tu en parles à ta famille. » Elle hocha la tête. Ca ne l'inquiétait pas plus que ça. Contrairement à lui, elle choisissait de les garder dans son entourage, ce n'était pas une obligation mais un accord de les accepter comme ils étaient s'ils faisaient de même. Elle n'avait pas de fissure interne comme Mathieu, ce besoin d'affirmation. « Est-ce que tu te sens mieux ? »

« Ca fait peur mais...oui. » Elle reposa son front contre son épaule et il enroula ses bras autour de son buste. « Merci d'être là pour moi. »

« Toujours. Tu le sais bien. » Il l'embrassa, tout d'abord chastement. Néanmoins, les choses s'envenimèrent rapidement et le baiser devint rapidement langoureux jusqu'à devenir fougueux. Il ne tarda pas à la porter pour l'allonger sur le canapé. Au-dessus d'elle, il s'arrêta un instant pour la regarder. A part dans leur confort de leur lit, ils n'avaient jamais été plus loin, n'avaient jamais tenté plus.


« Merde. »

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