Check on me

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Mathieu fut incapable de s'endormir. Dès qu'il fermait les paupières, il se revoyait un instant plus tôt, Madeline sur elle. Il sentait encore sa peau, entendait encore ses supplications mais surtout il entendait les siennes. Malgré la fatigue, ça faisait fuir tout son sommeil. Il abandonna les draps, refusant de tourner en rond plus longtemps. De plus, la brune dormait paisiblement et s'il continuait à grommeler ou à se retourner, il la réveillerait pour sûr.
Il s'arrêta devant la porte, l'observant quelques secondes pour vérifier que tout allait bien. Elle ne bougeait pas, restant endormie alors il prit le risque de sortir de la chambre pour ranger quelques affaires du séjour. Il nettoya de fond en comble, passant à plusieurs reprises par la chambre pour s'assurer que tout y était calme. Il la rejoignit une heure plus tard, espérant trouver son sommeil plus aisément. Néanmoins, se rallongeant à côté de Madeline, celle ci sursauta comme si un étranger venait de la rejoindre.

« Hey, c'est moi...c'est moi. » Elle s'enfonça contre lui et il la serra contre lui, papillonnant ses lèvres contre son crâne. Entre deux sommeils, elle ne sanglota pas mais ses larmes coulèrent contre le cou de Mathieu. « C'était que moi, j'suis désolé. J'suis vraiment désolé. »

« J'en peux plus. »

« Tu dis ça parce que t'es crevée. Tout va bien. »

Elle ne répondit pas. Elle savait qu'il avait raison mais en l'instant, tout ce qu'elle voyait, c'était ses cauchemars à répétition, ses peurs lorsque la nuit tombait. Elle avait l'impression que dès qu'un mieux se présentait, dès qu'elle se battait contre ses propres démons, dès qu'une victoire se présentait, ils revenaient. Ils la ramenaient violemment à la réalité dans ses moments les plus vulnérables. Et c'était bien trop douloureux qu'elle en oubliait le bon.

« J'ai l'impression de revivre constamment ce qu'ils m'ont fait. » Il caressa sa nuque tendrement, l'écoutant. « J'ai envie d'abandonner. » Il serra la mâchoire, se retenant de l'interrompre. Il comprenait la douleur même il n'osait lui même imaginer ce qu'elle pouvait ressentir au quotidien. Ainsi, il comprenait que ses pensées pouvaient être légitimes seulement, elles étaient difficiles à entendre. « J'aimerais vraiment faire taire tout ça, dans ma tête. J'ai l'impression que ça serait le seul moyen...parfois. »

« Mais ça l'est pas. »

« Je sais. » Elle ne pleurait plus mais la tristesse restait bien présente au creux de son cœur. Elle aurait aimé la crier, la faire sortir complètement pour que plus jamais elle ne revienne. « Mais c'est plus fort que moi, je t'assure. »

« J'le vois bien et je te crois...mais je vois aussi à quel point t'es bien plus forte que n'importe qui. Tu te bats tous les jours et je sais que de te voir...avoir des difficultés sur certains points sont durs mais tu peux pas t'attendre à ce que les idées noires partent aussi rapidement, que ton cerveau ne te ramène pas quelques souvenirs alors qu'il essaye de te guérir. »

« J'veux juste pouvoir me reposer. »

« Certaine nuit, tu dors complètement. T'es bien trop dans ta tête pour le voir dans l'immédiat mais je t'assure que tout n'est pas aussi noir. » Elle attrapa son bras, tirant dessus, le suppliant d'être au dessus d'elle pour ressentir son poids contre elle. Il le fit sans hésitation, continuant ses tendresses sur son visage tout en la regardant. Madeline avait fermé ses yeux, se concentrant sur les sensations de son corps pour se rassurer. Le sentir contre elle était surement le plus efficace et sa cage thoracique s'en ouvrit, la faisait inspirer profondément. « Oublie pas tous les bons moments qu'on a vécu. »

« Dis moi tes préférés. »

« C'est une demande difficile. » Il grommela dans son oreille. « Déjà...déjà quand on s'est rencontré. Au-delà du fait que j'ai complètement...bugué sur toi...j'ai adoré discuté avec toi. Et c'est un truc que j'aime encore. Nos conversations sont honnêtes et simples. On se dit tout et j'ai pas besoin de réfléchir. Je pourrais le faire pendant des heures. »

« J'aurai aimé passer la soirée avec toi cette nuit là.» A la place, Julian était arrivé et avait mis quelque chose dans sa bière. Le reste n'avait plus besoin d'être raconté.

« Moi aussi, crois moi. » Il avait culpabilisé longuement de ne pas avoir mieux compris la situation, d'avoir été si aveugle. Il lui avait fallu un peu de temps pour comprendre que personne n'aurait pu voir les intentions de Julian, encore moins un inconnu. La sentant plus calme, il se retira pour s'installer de profil à ses côtés, sa main libre continuant de jouer avec ses cheveux. « Mais sinon...ah si...un truc qui m'a marqué...je sais pas pourquoi ça ressort en premier...peut-être parce que t'es allongée là.. mais...un moment que j'oublierai jamais, c'est la première fois que tu t'es endormie sur la banquette de mon studio. Je me suis retourné et t'étais là. Et je crois que je t'ai regardé super longtemps et tout ce qui me venait en tête, c'est que je voulais t'y voir encore et encore. »

« J'aime bien venir avec toi aussi. »

« Mais j'aime bien tout. » Il passa son index le long de la naissance de ses cheveux. « J'aime être dans le lit avec toi, j'aime cuisiner avec toi, j'aime...tout notre quotidien ensemble. » Il embrassa son front. « C'est toi que j'aime alors tous les moments qu'on passe ensemble sont mes préférés. Peu importe ce qu'on fait. »

« T'es bien trop fort avec tes mots. » C'était presque un geignement. « Merci. » Il déposa ses lèvres contre sa pommette. « Tu me fais du bien. »

« C'est tout ce que je veux. » Il vit ses yeux devenir larmoyants alors il passa son pouce sur son menton avant que celui-ci ne tremble. « Pleure pas. Tu vas finir par me faire chialer. » Il fronça le nez, sentant l'émotion le lui piquer. « Il faudrait que tu te rendormes princesse. » Il toucha du bout des doigts ses cernes.

« J'vais pas y arriver. »

« Qu'est-ce qui te ferait du bien ? »

Elle prit quelques secondes pour réfléchir. « Un bain...avec toi. » Il hocha la tête avant de se lever, prêt à tout donner pour la satisfaire. Dès qu'il disparut, Madeline sentit ses larmes couler, une vague d'amour débordant de son cœur.