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Les jours s'enchainèrent et se ressemblèrent tous.

Mathieu passait son temps au studio ou à rendre visite à sa mère. Le peu de temps libre disponible était passé au quartier, à faire de l'argent pour sa grand-mère. Cette dernière occupation lui permettait d'oublier sa peine et de décharger sa colère sur quelqu'un d'autre. Il aurait aimé donner ses poings à Julian mais ses amis l'avaient prévenu, avec son casier judiciaire, il risquait bien trop. Si sa victime portait plainte, il était certain que le blond, cette fois, ne s'en sortirait pas avec une simple tape sur les doigts. Ainsi, ils l'avaient convaincu, temporairement de ne pas envoyer sa vie ou sa carrière en l'air.

Madeline, elle, passait son temps enfermée dans son appartement avec pour seule visite, Thomas. Par son comportement, elle avait réussi à l'inquiéter, lui qui ne se préoccupait que de lui même depuis toujours. Il lui faisait quelques courses qu'elle grignotait pour tenir le coup, préférant s'endormir grâce aux pilules. Son ami restait parfois, des heures durant, à surveiller qu'elle respire toujours. Pourtant, il ne l'empêcha pas, ni ne la dissuada et un soir, il eut beau la secouer, elle ne se réveilla pas, ni ne grogna. La panique s'infiltra dans tous ses pores et il se releva pour la faire réagir mais rien n'y faisait, Madeline restait immobile, inconsciente. Il cria sur elle, la brusqua mais finalement, il la prit dans ses bras et l'emmena jusqu'à la salle de bain. Il la déposa sous le jet d'eau froide avant de prendre directement le pommeau pour le passer sur son visage. Il lui fallut plusieurs minutes pour émerger, manquant d'air et ayant l'impression de se noyer. Elle se débattit de toutes ses forces pour se délier de lui et reprendre son souffle.


« Laisse moi ! » Elle tenta de se relever mais ses muscles étaient encore endormis tandis que ses sens étaient pris dans un nuage cotonneux. « Arrête, laisse moi tranquille, laisse moi partir ! »


Il arrêta le mitigeur mais elle continua de sangloter, s'écriant qu'elle voulait seulement partir, partir loin d'ici, loin de la réalité. Il tenta de la serrer contre lui mais elle refusa, ne souhaitant aucunement son contact. Elle voulait être seule et se sentir seule, cherchant presque à se punir pour ce qui s'était passé avec Julian, avec son meilleur ami et pour tout autre raison, avec Mathieu. A cette dernière pensée, un sanglot s'échappa parce que le sortir de sa vie avait surement était la pire douleur qu'elle s'était infligée. Seulement, contrairement aux autres, physiques qui avaient provoqué une montée d'endorphine, celle ci n'était que peine et souffrance. Toutefois, elle ne fit aucun mouvement pour réparer son erreur, préférant le laisse loin d'elle, certain qu'elle terminerait par le blesser bien plus.


« Madeline, il faut vraiment que tu arrêtes d'en prendre autant. » Thomas sortit de la douche pour sortir deux serviettes. « Tu vas finir par crever. » Il retira ses vêtements trempés pour s'essuyer, restant dans un simple caleçon. Il tenta de l'aider, la voyant frigorifier mais elle se replia sur elle-même, refusant d'être touchée. « Mais laisse toi faire, tu vas attraper froid ! » Il s'approcha d'elle et l'enveloppa de force avant de la porter pour la sortir. « Il faut que tu te changes. »


Elle secoua la tête, refusant de se déshabiller devant lui. Il souffla, de manière exagérée, espérant lui faire comprendre son agacement. Il sortit de la salle de bain, la laissant un instant seule pour chercher des habits pour elle et pour lui. A peine il passa l'encadrement de la porte, qu'elle la claqua derrière lui avant de la verrouiller. Elle attrapa son portable avant de s'allonger au sol. Elle débloqua Mathieu et reçut plusieurs messages de sa part. Il les lui avait envoyé lors de ses nuits, pleine d'insomnie, d'alcool, de joint mais surtout de solitude. Quelques larmes s'échappèrent en lisant ces sentiments étalés à l'écrit. Elle fut interrompu par Thomas qui cogna contre la porte tout en criant. Elle ferma les paupières tout en posant ses paumes contre ses oreilles.


« Va t'en ! » Elle tapait ses pieds contre le bois, espérant l'effrayer. « J'veux que tu t'en ailles ! »

« Madeline, arrête, putain, ouvre. »


Elle déverrouilla son téléphone pour appeler Mathieu, le rendant complice de cette scène chaotique. Il répondit immédiatement, une sonnerie particulière installée pour elle, pour ne pas louper un quelconque retour de sa part. Il était chez sa grand-mère, allongé dans son lit sans pouvoir fermer les yeux, pensant notamment aux derniers mois. Face à son nom sur son écran, il s'était redressé brusquement, les mains tremblantes et le cœur revivant.


« Madeline ? » Il sentit sa voix trembler et dut souffler pour reprendre un peu de constance. Elle ne répondit pas, collant le plus possible le téléphone contre son oreille pour l'entendre lui et non pas Thomas. « J'entends quelqu'un qui crie avec toi ? Est-ce que tout va bien ? Est-ce que t'as besoin que je vienne te chercher quelque part ? » Le silence s'imposa. « Si tu ne peux pas parler ou ne veux pas, tu peux seulement partager ta position et je viendrai, ça te va ? »


Elle raccrocha, sans un mot mais lui envoya sa localisation. Il enfila rapidement des vêtements avant de descendre les étages par les escaliers, ne perdant pas une seconde. Il se rendit compte seulement sur la route qu'il se dirigeait  vers son appartement. Il accéléra alors, connaissant le chemin. Il se gara juste devant l'immeuble, presque sur le trottoir, se moquant de se faire embarquer sa voiture par la fourrière, voulant seulement la retrouver et la mettre en sécurité. Il fut soulagé de voir que la porte n'était pas verrouillée. Il entra brusquement et fut surpris de voir Thomas. Il préféra l'ignorer complètement, le doublant pour faire le tour de l'appartement. Il s'arrêta rapidement devant la salle de bain mais fut bloqué. Il toqua, doucement, son oreille contre le bois pour l'entendre.


« Madeline, c'est moi, Mathieu. » Elle fit l'effort de se lever pour lui ouvrir. Il passa rapidement avant de refermer derrière lui, refusant que Thomas s'approche. « Putain.. » Face à elle, il ne put s'empêcher de jurer. Elle avait perdu beaucoup de poids mais ce qui le choqua plus était son visage, si terne et triste. Ses lèvres étaient gercées tant elles avaient été mordues tandis que ses yeux étaient injectés de sang, leurs pupilles grandement dilatées. Il n'eut le temps de continuer de la regarder qu'elle s'avançait pour se reposer contre lui. Il fut surpris du geste mais l'accepta, incapable de refuser la proximité avec elle. « T'as besoin de te changer. »

« Il m'a mis sous l'eau. » Il s'était déshabillé devant elle puis avait voulu qu'elle se change dans un épisode de confusion. Elle en avait été terrifié et l'avait appelé. Il passa une main contre sa tête pour s'arrêter à sa nuque, y décollant les petits cheveux trempés. « J'ai cru me noyer. Et il s'est mis en caleç.. »

« Est-ce qu'il t'a touché ? »

« Non, non. » Il ne put cacher son soulagement. « Il n'est pas comme ça. »

Il se délia malgré lui. « J'arrive. Je vais te chercher des vêtements et je dégage ce crétin, ok ? »

Elle hocha la tête, se remettant au sol alors qu'il fermait la porte, n'essayant plus de se débattre. Mathieu était là dorénavant, elle se préoccuperait du reste plus tard.

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