l'elfe dans ma tête

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16 oct 2024
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Il y a un elfe qui danse dans ma tête.
La fatigue alourdit tout, mes yeux se closent d'eux-mêmes. Il danse, danse, danse, le petit elfe, sur le rythme de Dancing Queen. Tout est bleu et délavé ; humide. Je me suis perdu une fois encore : je ne devais pas être assez cramponné au gouvernail aujourd'hui. Je voudrais dormir et me réveiller en ayant tout oublié. En me sentant reposé et en paix, avec moi-même et avec tout ce monde qui tourne et fourmille sans cesse. J'ai l'impression de me tenir debout à l'envers sur un plafond de verre, j'ai des vertiges et les passants me brûlent la peau en m'effleurant. Il fait gris dans le ciel et dans ma tête, juste gris : pas de pluie ni d'éclaircies, juste un temps las et monotone, toujours le même, une litanie qui m'entraîne dans un abysse d'ennui profond. Quand est-ce que tout s'arrête ? Ce sont toujours les mêmes choses qui reviennent en boucle, ce sont toujours les mêmes personnes qui viennent sous un visage différent ; toujours les mêmes émotions vaguement réchauffées au micro-onde qui se pointent en moi et me donnent l'illusion que je ressens quelque chose ; toujours les mêmes trajets, les mêmes obligations, les mêmes espoirs et les mêmes peurs. Les mêmes angoisses, que je connais si bien qu'elles me sont presque égales.

Ça faisait longtemps que je n'avais pas écouté ABBA. La saveur de l'enfance en filigrane.

Et peut-être que je ne suis voué à rien de spécial, peut-être que je me résignerai un jour et que je passerai ma vie comme tout le monde, à peu près satisfait et à peu près apaisé. Peut-être que mes aspirations grandioses retrouveront pied, que je me convaincrai enfin que je ne sors pas du lot, que j'accepterai de me salir pour le capital encore et encore, chaque jour entre deux métros et deux nuits de sommeil sans rêves.

Mes ami·es gravitent ici et là, flottent dans l'univers et me tendent des mains ; j'en tends en retour sans être certain de pouvoir garder prise, je ressens tout trop fort et fais des allers-retours pour échapper à la douleur qui vient avec l'amour. Je me sens mieux quand je ne les vois pas, en réalité ; mes jours de sevrage sont souvent les moins pires. Je vais au cimetière et je parle au morts, je marche et marche et marche et écoute de la musique qui me rassure ; je lis, peins, j'existe entièrement. Fébrile, j'arpente ces rues, ces parcs, ces champs, tandis que les couleurs s'effacent et que l'hiver menaçant se pointe à l'horizon, massant ses nuages furieux.

Je tourne sur moi-même les yeux clos jusqu'à tomber à la renverse.

L'anxiété fait surface lorsqu'on stagne, alors on bouge pour toujours être un pas devant elle. Le moindre regard par-dessus l'épaule me donne la nausée. Je voudrais que quelqu'un trouve la solution pour moi ; que quelqu'un me tienne fort contre lui pour m'aider à me tenir tranquille ; que quelqu'un m'aime suffisamment pour tout réparer. Puis je lève les yeux, croise mon regard dans le miroir, et puis je me tiens dans mes propres bras, j'empile les couvertures jusqu'à suffoquer, j'essaie de me réchauffer moi-même. On n'est jamais mieux servi que par soi-même ; alors aime-toi toi-même, Arlo, n'attends pas que qui que ce soit le fasse pour toi. Ils ne seront jamais assez.

Je m'effondre au milieu de la route sous les lampadaires. Le ciel pleure sur mes joues.

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