23 octobre 2022
__________J'aimerais te comprendre, tu sais.
J'aimerais comprendre pourquoi tu écoutes si peu.
J'aimerais savoir à quoi te sert ta tonne de livres de développement personnel : à faire joli ?J'aimerais savoir pourquoi tu veux me faire comprendre que ma voix n'a aucun poids. Que les conseils que je te donne te sont inutiles. Que je suis inutile. Que mes mots te passent par-dessus la tête. Que mes appels à l'aide entrent par une oreille et ressortent par l'autre.
Je ne me sens pas écouté chez toi.J'aimerais que nos discussions ne soient plus centrées sur ce que je n'ai pas fait dans la journée. J'aimerais bien que tu remarques un peu plus ce que j'ai accompli que ce que j'ai oublié ou ce que je n'ai pas eu le courage de faire. Si tu savais l'énergie et la force que ça me demande de me lever le matin en sachant que je vais te voir et que le même schéma se répétera... C'est un peu ce que je fais ce soir en écrivant ce chapitre : je repousse le moment de m'endormir parce qu'ainsi le réveil arrivera dans plus longtemps, en quelque sorte. Je sais que demain matin, j'attendrai de t'entendre partir de la maison pour oser sortir de mes draps, la boule au ventre, et je prendrai ma douche en vitesse et en silence pour vite retourner dans ma chambre. Puis j'aurai cette angoisse de t'entendre toquer à la porte pour venir me demander de faire quelque chose...
J'aimerais que tu comprennes que quand je te dis que tu me fais peur parce que tu ressembles à papa, je le pense, je ne dis pas ça pour t'embêter, j'exprime simplement ce que je ressens, je t'explique juste pourquoi j'explose en larmes quand tu t'énerves. Et je voudrais que tu en tiennes compte.
J'aimerais que, quand je te donne des conseils sur un sujet que je maîtrise et toi non, tu m'écoutes. Que tu arrêtes de prendre cet air exaspéré et ce ton moqueur, mesquin, à chaque fois que je te parle un peu plus sérieusement que d'habitude.
Ça me pèse, tous ces comportements.
Ça me pèse de savoir que mes deux parents ont encore cinq ans dans leur tête.
Ça me pèse de savoir que vous êtes drôlement similaires quand on s'autorise le rapprochement.
Ça me met en colère que tu refuses justement ce rapprochement, et avec tant d'énergie. Qu'est-ce qui te fait donc si peur, si ce n'est la vérité ?Et bon sang, pourquoi en neuf ans et demi aucun de vous deux n'a réussi à tourner la page ? Pourquoi vous me faites encore payer les pots cassés de votre mariage foiré et de vos traumatismes et rancœurs à vous ?
Ne comptez pas sur moi pour vous reparler une fois mes dix-huit ans fêtés. Je me barrerai bien loin d'ici, avec mon chien et mes futurs vingt ans de thérapie. Merci bien !
Ce qui me fait le plus mal je crois, c'est qu'aucun de vous n'a fait de son mieux pour moi. En quelle année avez-vous abandonné ? Sans doute l'année du divorce, où vous avez commencé à donner plus d'importance à l'autre qu'à vos propres enfants.
Comme parents vous êtes à chier, je vous jure, vous avez une incompétence extraordinaire.