23 février 2024
___________J'enregistre mon dernier vœu sur Parcoursup, la mélancolie de Torna a casa dans les oreilles. Je me sens immensément abattu, le poids du futur s'écroulant sur mes épaules.
Je rédige les lettres de motivation, cynique devant cet enjouement feint et ces fleurs balancées à la figure de licences qui me donnent vaguement la nausée.
Je réponds de plus en plus précisément à la fameuse question « qu'est-ce que tu feras l'année prochaine ? » et je contemple cet horizon infini, ce futur qui me tourne le dos et avance sans moi, de sorte que je ne le rattrape jamais.
Ça me fait tout drôle, de grandir, de prendre de colossales décisions, d'expérimenter les responsabilités. Déjà que je n'étais pas censé arriver jusque là... Ça me paraît difficile de croire qu'il y aura bel et bien un après bac. Ça y est, le printemps est là, les démons s'en vont, il faut déplier les longs membres ankylosés, faire quelques pas, sortir de la grotte, fermer les yeux sous la violence des rayons solaires. On est tirés d'affaire, on dirait, au moins jusqu'à l'automne prochain.
Personne ne les lira, mes lettres de motivation trop joyeuses pour être sincères. Elles resteront là à peser gentiment sur ma conscience, à me susurrer que je suis capable de produire de belles merdes, quand même (et le pire c'est que je m'en contente sans vouloir les améliorer). Elles seront avalées par la bête de Parcoursup, qui les mâchonnera lentement pendant que les formateurs trieront parmi la masse d'étudiants déjà largement écrémée par l'algorithme.
Et moi, salopard de lycéen pétri de flemme, je serai à l'autre bout du serveur, prostré là, attendant la sentence.