-Elsa-
Je me réveillai en sursaut.
L'image de ces yeux noirs hantait encore mon esprit quand j'ouvris les miens brusquement. Je pris une grande bouffée d'air pour me calmer. Ce n'était qu'un cauchemar. Pourtant, je sentais encore mon cœur battre à toute allure alors que je regardais l'heure projetée au plafond. Elle affichait 6:30... Il était encore tôt mais je décidai tout de même de me lever, trop effrayée de refermer les paupières.
En tirant les volets, je clignai des yeux pour m'habituer à la lumière. J'ouvris ensuite la fenêtre et m'accoudai sur le bord. L'air était chaud de si bon matin mais une légère brise venait me rafraîchir le visage. Ça faisait du bien. C'était si calme que je restais comme ça un moment, regardant le terrain vague.
On avait bien un are de surface qui ne servait plus à rien. Avant, on avait une jolie pelouse. Ma mère y avait planté des fleurs et quelques fruits sur une partie. Mon père avait acheté une balançoire et des buts de football qu'il avait installés sur une autre. Il avait même dessiné un petit terrain. Et juste derrière la maison, il avait fait construire une piscine creusée. Je revoyais ma sœur allongée sur un matelas gonflable vert, lisant un livre avec d'énormes lunettes de soleil sur le nez. Ma mère jouait avec mon petit frère au ballon, un chapeau de paille sur la tête. Quant à mon père, il était assis sur un transat, short et maillot de foot, faisant mine de faire l'arbitre. En vérité, il était sur son ordinateur à refaire les comptes de son entreprise. Mais au moins, il était là.
De cette époque, il ne restait plus qu'un terrain sans vie. Mon père payait une personne tous les mois pour passer un coup de tondeuse. Il rasait tout, même les fruits qu'avait plantés ma mère. Dommage, j'aimais bien les manger tout frais. La balançoire, elle, était toujours là, au fond, qui commençait à rouiller. Pas l'un de nous deux ne prenait plus la peine de la recouvrir d'une bâche les jours de pluie. Quant aux buts, ils étaient rangés dans l'abri installé près du potager, qui n'était plus. De toute façon, les marquages du terrain s'étaient effacés. Et la piscine était toujours là, mais vide.
Je refermai la fenêtre. Tous les matins, c'était la même chose, je me rappelais que j'avais été heureuse à une époque. Enfin ! Peu importe, aujourd'hui, j'allais commencer quelque chose de nouveau. Bon, ok, mon père m'y avait forcé mais, au moins, je verrais quelque chose de neuf.
Je descendis au rez-de-chaussée et appuyai sur le bouton pour ouvrir les volets. Je franchis ensuite la marche pour accéder au salon et attrapai la télécommande sur la table basse. J'allumai la télé fixée au mur et démarrai une playlist. Une musique douce s'immisça alors dans toutes pièces. En fredonnant maladroitement la chanson, je rejoignis la cuisine. Bon voyons voir ce qu'on a, là... J'ouvris le frigo et pris une brique de lait, de jus d'orange, une brique de chocolat froid et je posai le tout sur le plan de travail. Dans le placard, il y avait une boîte de céréales, et des biscottes. Je les pris aussi et les posai avec le reste avant d'aller chercher du Nutella et de la confiture.
Ma mère raffolait de confiture, elle les faisait elle-même. Ça faisait bien longtemps que je n'en avais pas mangé, d'ailleurs. De ma mère, je veux dire. En continuant d'assassiner la chanson, je me mis à tartiner les biscottes. Une à la confiture de fraise puis une au Nutella, et ainsi de suite. Je les disposais ensuite en cercle sur une assiette plate que je poussais au milieu du plan de travail. Peut-être que mon père en prendra une ce matin. Peut-être qu'il mangerait même avec moi, s'il était de bonne humeur. Après tout, j'avais fini par accepter de travailler dans son entreprise, alors que je prévoyais carrément un autre avenir. Il avait gagné, comme toujours. Il avait intérêt à être de bonne humeur !
Au moment où je remplissais mon bol de céréales, il arriva, déjà vêtu d'un costume. Un nouveau.
— Salut, lançai-je.
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Perte de contrôle
General FictionElsa est la fille de Benjamin Saphyr, grand PDG de la chaîne hôtelière de renommé mondiale. Née avec une cuiller d'argent dans la bouche, elle a tout pour être heureuse. Et pourtant, un jour, sa bulle de bonheur a explosé et, depuis, elle n'a de ces...