Chapitre 10

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-Elsa-

Quand je rentrai chez moi, il était déjà aux alentours des vingt heures. Je m'attendais à retrouver mon père sur le canapé, l'ordinateur sur les genoux comme d'habitude. Mais alors que j'ouvrais la porte, mon sac de voyage en main, je compris que ce n'était pas le cas en entendant des rires de femme. Quoi ? Qui ça pouvait bien être ? Je posai mon sac au bas des escaliers et m'avançai vers la cuisine. J'aperçus mon père, habillé décontracté (ça n'était pas arrivé depuis bien longtemps !) en compagnie d'Hélène qui n'était autre que la mère d'Aaron ! Ils étaient tous deux assis autour du plan de travail, un verre à la main. Ce qui me surprit, à part le sourire ridicule sur les lèvres de mon père, c'était la tenue de Mme Mathis. Son tailleur me semblait plus court que d'habitude et ne parlons pas de son chemisier au décolleté aguicheur. Mon père devait en avoir plein la vue !

Je choisis le moment où ils s'esclaffaient sur une affaire, que je ne saisissais pas vraiment, pour faire mon intrusion, tout sourire, ravie de les interrompre.

— Mme Mathis, dis-je poliment.

— Elsa !

Elle me sourit mais le regard déconcerté qu'elle envoya à mon père ne m'échappa pas.

— Qu'est-ce que... tu fais ici ? bafouilla mon père.

Je ne savais pas si je devais me sentir blessée ou pas. Qu'est-ce que je faisais chez moi ? Ben oui, bonne question, papa !

Cette journée m'avait épuisée. La discussion avec ma mère, la plage avec Liam, les heures dans ce train qui m'avaient semblé interminables ! Et voilà que mon père ne voulait pas de ma présence dans ma propre maison ! Je voulus rire mais j'étais si fatiguée que ça se transforma presque en un sanglot.

— Je me le demande aussi, soufflai-je en repartant.

Moi qui étais restée avec lui pour ne pas le laisser seul, finalement j'étais de trop, apparemment. J'attrapai ma valise et montai dans ma chambre en pensant que je ne devais même pas la défaire. Peut-être devais-je même ajouter deux trois petites choses et m'en aller loin d'ici. Ouais, ce n'était peut-être pas une si mauvaise idée. Je pourrais le faire le mois prochain, dès que je serais majeure !

Je ne pus m'empêcher d'aller à la fenêtre et d'y jeter un coup d'œil, comme j'avais pour habitude de le faire quasiment tous les matins. Même si ce terrain désert derrière la maison me faisait ressentir un vide, j'avais besoin de me rappeler les bons moments du passé. Cependant, cette fois-ci, ce ne fut pas le cas...

***

J'étais assise sur le transat, seule, à fixer le potager recouvert de neige au loin, sans vraiment le voir. Ma sœur arriva alors dans son gros blouson noir dont la fourrure ressortait autour de sa capuche.

— Mais qu'est-ce que tu fous, ici ? me lança-t-elle.

Elle tenait sa grosse capuche sur la tête comme si elle bravait une tempête de neige alors qu'il ne s'agissait que de quelques flocons. Ses cheveux châtains retombant sur ses épaules étaient cependant déjà humides. Livia avait toujours été frileuse et détestait l'hiver. Je me demandais bien ce qui l'avait motivé à me rejoindre.

— Rien. Je prends l'air.

— Tu vas attraper froid, oui ! Comme si tu n'avais pas de quoi t'habiller ! me reprocha-t-elle.

Je me regardai dans mon sweat bleu et, maintenant qu'elle le disait, je commençais à ressentir le froid.

Elle s'assit alors à côté de moi, en me poussant légèrement au passage, puis commença à fixer ses bottes, tout à coup plus songeuse.

Perte de contrôleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant