Chapitre 34

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-Chad-

Je posai mon bouquet de fleurs sur la tombe et me relevai. J'avais l'impression que tout mon corps était engourdi et que mon cerveau était en pause. Je traversais le cimetière d'un pas lourd, les mains dans les poches, la tête baissée. Je n'arrivais pas à arrêter ces images qui défilaient dans ma tête. Je sentais mes muscles se crisper. J'allais devenir fou ! Bon sang, je ne voulais pas y penser. Mais à quoi je m'attendais en venant ici ? C'était toujours la même chose !

Arrivé devant la grille, je relevai la tête et, à ma grande surprise, je vis Elsa qui me regardait de loin. Elle parut hésiter, mais finit par me sourire timidement avant de me rejoindre en quelques pas.

— Salut, me lança-t-elle d'une voix monocorde.

Je n'avais pas la tête à discuter, et encore moins dans cet endroit. Je me contentai alors d'un signe de la tête avant d'ouvrir la grille pour rejoindre le sentier qui menait au parking.

Sans un mot, elle restait à côté de moi, marchant au même rythme que le mien. Petit à petit, les images s'arrêtèrent, tandis que je me concentrais sur ses pas. Son parfum flottait juste à côté de moi, son souffle était régulier... Je crois que ça m'apaisait.

D'habitude, quand je venais ici, il me fallait bien une demi-heure pour retrouver mon calme...

— Qu'est-ce que...

Voyant que ma voix déraillait, je me raclai la gorge et me repris :

— Qu'est-ce que tu fais ici ?

Elle leva ses yeux vers moi. Je voyais bien qu'elle était réticente à parler. De plus, j'avais deviné qu'elle venait ici tôt le matin pour que personne ne la voie. Comme moi. Pourtant, si nous étions là, tous les deux, c'était forcément qu'on avait perdu un proche.

— Mon grand-père, finit-elle par répondre.

Son grand-père... Oui. Elle m'en avait déjà parlé ! Dans la salle piano.

— Celui qui t'as appris à jouer du piano ? demandai-je.

— Oui, celui-là...

Sa voix était faible et lointaine. Jamais, je ne l'avais entendu comme ça. C'était différent que ce jour où elle avait vraiment perdu pied à l'hôtel de Nice, au bord de la piscine. Là, elle était juste peinée. Enfin "juste". Je voyais bien qu'elle avait aimé son grand-père comme personne.

— Et toi ?

À sa question, ma bouche s'assécha subitement.

— Mon père.

— Oh, je suis désolée.

Je haussai les épaules, ne sachant jamais quoi répondre à ça.

— Tu as mangé quelque chose ? me demanda-t-elle, alors qu'on arrivait sur le parking.

— Non.

— Qu'est-ce que tu dirais de prendre un petit déjeuner ? me proposa-t-elle.

En vérité, je n'avais pas du tout faim, mais face à ce regard tendre, je me résolus à accepter. On traversa donc la route et on arriva devant un petit établissement qui semblait neuf. Ses vitres semblaient être nettoyées  à fond, tant elles brillaient au soleil. Et sa peinture d'un vert pistache semblait encore fraîche.

— L'eucalyptus, lis-je sur l'énorme enseigne qui brillait sur le front du magasin. Tu y es déjà venue ?

— Non, jamais. Allons voir !

— Je vois que tu te tentes à découvrir de nouveaux lieux !

Elle qui, lorsque nous étions avec Liam et que nous cherchions un restaurant, était réticente à l'idée d'entrer dans n'importe lequel.

Perte de contrôleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant