Chapitre 14

5.2K 312 5
                                    

-Elsa-

Le fait que mon père me propose de couper ce ruban m'avait paru étrange. D'habitude, je ne servais qu'à décorer, qu'à montrer qu'il était plus qu'un grand entrepreneur, qu'il était aussi un père aimant et attachant. En gros, je n'étais pour lui que le moyen de lui donner une bonne image devant les médias. Et bien sûr, en tant que gentille fille à papa, je me devais d'en avoir l'allure, même si je n'étais pas à l'aise dans ce tailleur et que ses collants me donnaient trop chaud !

Ma sœur avait toujours eu une facilité déconcertante dans ce genre d'événement, contrairement à moi. Mon père la laissait toujours prendre la parole pendant que j'amusais mon frère et ma mère finissait toujours par me reprenne d'un froncement de sourcils sévère.

Pendant que les clients, journalistes, stagiaires et tuteurs rentraient dans l'hôtel, je ressentis plus que jamais ce vide qui ne me lâchait pas. Je pouvais bien m'habiller avec élégance et couper un ruban insignifiant, je ne pouvais pas camoufler l'absence de trois personnes. Même si on trouvait que mon père accordait un peu trop de valeur à son travail, on mettait un point d'honneur à être tous présents pour la concrétisation de ses projets. Et puis, être là, devant tout ce monde, nous donnait de l'importance. J'avais l'impression d'être importante. Plus maintenant. Pas quand cette mascarade n'était que le reflet d'une famille brisée.

J'y avais pensé dès le moment où mon père m'avait annoncé qu'il me voulait à ses côtés pour cette ouverture. En me levant ce matin, je n'avais même pas envie de venir. Je voulais juste rester dans mon lit et attendre que cette journée passe. Cependant, quand mon père avait pris la peine de monter jusqu'à ma chambre pour me chercher, j'avais bien vu que, lui aussi, aurait préféré rester au lit.

Je me demandais bien pourquoi il se forçait à faire les choses en grand. Après tout, il pouvait tout aussi bien ouvrir l'hôtel sans en faire tout un plat. Mais bon, le travail était le travail, comme il le disait si bien. Quitte à ressentir un vide derrière lui pendant qu'il prenait la parole. J'avais bien vu que cela l'avait perturbé puisque, pour une fois, il n'avait pas fait de long discours. 

Ah oui, et il m'avait laissé couper le ruban. Ça ! C'était perturbant. Je me demandais bien pourquoi il me l'avait demandé. Bon d'accord, ce n'était qu'un ruban mais c'était symbolique ! Et mon père ne laissait jamais les choses au hasard. Ça, j'en fus convaincue dès lors qu'il vint vers moi et me demanda de le suivre.

On rentra donc dans l'immense hall où se trouvait la réception. Des tables étaient disposées sur un côté de la salle avec de quoi manger et boire. Je voyais déjà les invités un verre à la main. Ils regardaient partout, émerveillés par les lieux.

Mon père n'avait pas fait les choses à moitié. L'endroit était spacieux et harmonieux. Le sol était lisse et brillant, on pouvait s'y voir comme dans un miroir ! En montant un majestueux escalier central pour atteindre le premier étage, mes yeux s'accrochèrent au lustre qui pendait au-dessus de ma tête. Il était immense et brillait de mille feux.

Arrivés au premier, je compris que cet étage n'était pas prévu pour les chambres mais pour la restauration, le spa, la piscine intérieure et autres activités dont je devais encore ignorer l'existence.

Je suivais donc mon père qui, depuis le début, serrait quelques mains et ne manquait pas de me présenter à des hommes d'affaires. Je me contentais de dire bonjour sans oublier ce fichu sourire que je devais coller sur mon visage.

Après avoir traversé le restaurant aux nappages noirs et beiges, il me guida vers l'immense terrasse. Je m'assis à une table tout en regardant la vue. D'ici, on voyait la piscine creusée ainsi que le terrain de golf sur lequel des voiturettes blanches roulaient.

Perte de contrôleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant