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Les 2 postes d'amarrage réservé aux bateaux de passage étaient occupés. La saison touchait à sa fin, pourtant. Une place aurait pu se libérer.
Dommage, songea-t-il hypocritement, car tout au fond de lui-même il avait espère qu'il n'y aurait pas de place.


Quel idiot tu fais, mon pauvre garçon ! se tança-t-il avec sévérité.

Mais il avait beau être averti et avoir juré ses grands dieux que jamais plus il ne tomberait amoureux, l'homme à la moto, avec sa silhouette élancée, son sourire en coin et son allure décontracté, c'était insinué dans ses pensés et il pressentait qu'il ne s'en laisserait pas facilement déloger.


S'il savait, il se moquerait de moi, se dit-il, mortifié.

Il s'était tellement enlaidi qu'il ne ressemblait plus à rien. Quel homme pouvait s'intéresser à lui, ou simplement le remarquer ? Sûrement pas ce beau brun aux traits virils et aux yeux gris. Il ne fallait pas rêver. S'il bavardait avec lui, c'était pour passer le temps. Un peu comme un chat qui jouerait avec une souris.


Ou plutôt comme un tigre qui chipoterait avec sa proie, songea-t-il, réaliste.

Mais pourquoi penser à mal ? S'il lui faisait la causette, c'était peut-être simplement parce qu'il s'imaginait qu'il pourrait l'aider. À trouver un mouillage, par exemple.
Il y avait une demi-douzaine de bateaux ancrés à l'année dans la marina. En ce début d'octobre, le temps commençait déjà à se dégrader, mais Pixis lui avait dit qu'ici les plaisanciers sortaient en mer hiver comme été. Ce n'était pas la pluie qui les arrêtait.
Il chercha des yeux le poste d'amarrage le plus au large, là où l'homme lui avait dit avoir ancré son bateau. Son regard balaya 2 vedettes, un chalutier, trois voiliers. Amarré à la toute dernière bouée, un bateau à la coque bleu marine et au toit blanc retint son attention. Autant qu'il puisse en juger à cette distance, il avait plutôt fière allure. Rien à voir avec une péniche, constata-t-il, étrangement soulagé.


La corde à linge tendue d'un bout à l'autre du pont, ce n'est pas son genre. Il navigue et donc, forcément, il entretient son bateau.


Voilà ce qui arrive quand on ne regarde pas où on va, songea-t-il encore lorsqu'il mit le pied dans une ornières et trébucha.


Tu ferais décidément mieux de t'occuper de tes affaires.

Cela faisait presque huit mois qu'il ne fréquentait aucun homme - Pixis mis à part, mais cela n'avait rien à voir - et il ne s'en portait pas plus mal. Il n'allait pas laisser cet inconnu tout chambouler. Ce serait trop bête.
Mais il se savait faible. Il savait aussi ce qu'il en coûtait de perdre la tête pour un homme. La dernière fois qu'il était tombé amoureux, sa vie avait viré au cauchemar.
Et son frère y avait laissé la sienne.

Identité secrète.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant