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Troublé par l'acuité de ce souvenir, il se figea au milieu du cockpit. Il se rappelait parfaitement les circonstances dans lesquelles son père les avait prononcées. C'était à un match de la Little League. Une mère venait de récupérer son fils, à l'issue du match, et n'arrêtait pas de lui crier dessus tandis qu'ils regagnaient tous 2 le parking.

Elle est drôlement en colère, avait dit son père.

C'est parce qu'elle a eu peur, avait rétorqué Livai.

Son père avait eu l'air surpris.

Comment le sais tu ?

Pris de court, Livai n'avait pas répondu tout de suite. Sa remarque avait jailli spontanément, sans qu'il sache très bien pourquoi. Mais il ne voulait pas perdre la face. Il lui avait fallu quelques instant pour retrouver le cheminement de pensés qui l'avait amené à cette conclusion. Mais son père ne l'avait pas busqué.

Le t-shirt de son fils était tout déchiré. Il s'était fait mal au bras, apparemment. Il saignait un peu. Elle le tirait, mais pas par son bras blessé, et elle lui reprochait de ne pas faire assez attention. Elle a eu peur et c'est pour ça qu'elle criait si fort. Maman fait la même chose, parfois.

Cette analyse lui avait valu une accolade qui l'avait rempli de fierté. Et l'avait conforté dans l'idée que c'était ce qu'il voulait faire, quand il serait grand.
Moins de 6 mois plus tard, son père était mort.
Son téléphone portable émit un bip qui le tira brutalement de ses pensés. Livai en conclut que quelqu'un avait cherché à le joindre. Puis un second bip, d'une tonalité différente, l'avertit qu'il avait reçu un e-mail.
Celui-ci émanait de sa mère, qui se trouvait dans le Colorado et lui racontait avec force détails son séjour chez sa sœur. Il décida de lui répondre plus tard et écouta les messages qu'on lui avait laissés sur sa boîte vocale. Il y en avait deux de son copain de fac Erwin, qui l'appelait au sujet d'un match de base-ball la semaine suivante, et un de son dernier petit ami en date, qui lui annonçait à toutes fins utiles qu'il venait de se fíancer. Il y avait aussi un message électronique de Thomas Jaeger. Depuis quelque temps, ce dernier semblait privilégier ce moyen de communication. Il y avait plus d'une semaine que Livai n'avait pas entendu sa voix. Jaeger lui expliquait qu'il avait des réunions importantes en haut lieu mais qu'il espérait pouvoir se libérer le lendemain.

Identité secrète.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant