Il s'en voulait de plus en plus de l'avoir mal jugé. Il ne serait pas si gentil s'il avait de mauvais intentions ou s'il était à la solde de Jean.
-D'accord, dit-il. Il y avait très longtemps que je n'avais pas passé une aussi bonne journée.
-Quel dommage que vous ne profitiez pas plus souvent d'une région aussi magnifique ! C'est très différent de... où déjà ? La Californie ?
D'instinct, le jeune homme se raidit. Mais il parvint presque aussitôt à se raisonner. D'une part, la question n'avait rien d'indiscret et, de l'autre, la Californie était immense.
Tout les jours, il y avait des gens qui en partaient. Il n'avait aucune raison de nier.
-Oui. La seule cascade que j'ai vu là-bas est celle du parc de Yosemite.
Cela faisait parti de ses plus beaux souvenirs d'enfance.
-Je n'y suis jamais allé, avoua Livai.
-Nos parents nous y ont emmenés, un été. Nous avons campé. Mon père faisait cuire des brochettes au barbecue pendant que ma mère nous surveillait. Mais, comme c'étaient les vacances, elle nous laissait relativement libre de nos mouvements.
Il se tut, étonné de lui en avoir tant dit. Cela faisait si longtemps qu'il vivait seul et caché qu'il avait presque l'impression de parler une langue étrangère en lui faisant ces confidences.
-Qu'est-ce qui vous a poussé à partir ?
Cette fois, il ne put juguler la peur qui le submergea.
-Pardon ?
-Vous aviez une vie plutôt agréable, non ?
-En effet. C'était une vie très agréable mais tous ceux qui la rendaient si plaisante sont partis.
Il lui fit grâce des platitude de circonstance et secrètement il lui en sut gré.
-Ren...
Il y avait une vraie chaleur dans sa voix. Presque de la tendresse. Brusquement, il s'avança vers lui, récupéra le casque et le posa sur la selle de la moto.
Puis il le prit dans ses bras.
En lui, la voix de la raison l'enjoignit de le repousser.
Mais le désir qui pulsait au creux de son ventre l'incita au contraire à se blottir contre lui.
Il était petit, il était fort et si gentil, si doux... Il ne pouvait résister. Mais le mal n'était pas bien grand, s'il s'abandonner juste un instant... Ne pouvait-il s'octroyer un peu de chaleur et de réconfort, après tous ces mois de solitude ?
Il avait posé sa tête sur son torse et se contentait de le tenir dans ses bras. Sans rien dire.
Combien de temps ils restèrent ainsi, Ren n'aurait su le dire.
Au bout d'un moment, il constata que ses forces diminuaient, que ses jambes devenaient de plus en plus molles. Sa méfiance semblait s'être endormi. Tout velléité de résistance momentanément neutralisé, il se pressait contre Livai, cherchant d'instinct la tendresse dont il avait tellement besoin.
Dans un éclair de lucidité, il prit soudain conscience de son extrême vulnérabilité. Il fallait qu'il se ressaisis. De toute urgence.
Il s'écarta. Livai ne le lâcha pas tout de suite. Quel plaisir aurait-il pu trouver dans cette étreinte ? demanda-t-il, persuadé qu'il se faisait des idées.
-Merci encore. Il faut que j'y aille parce que demain je travaille et que mes affaires ne sont pas prêts.
Il mentait. Ses t-shirts à l'effigie du Waterfront étaient lavés et repassés. Mais c'était tout ce que son esprit embrumé avait trouvé pour lui sauver la mise.
Sur ce, il tourna les talons. S'il ne s'était pas retenu, il serait parti en courant.
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Identité secrète.
FanfictionSe cacher, et changer de ville et d'identité tous les 2 mois... Telle est la vie que mène Ren, la peur au ventre, depuis la nuit où Jean, son mari, a tenté de l'assassiner. Installé depuis peu à Port Murphy, il se tient sur ses gardes : Jean le traq...
