- Tu crois que quelqu'un va venir nous chercher ? demanda Kharg la bouche pleine d'un épais morceau de brioche moelleuse recouverte de pâte à tartiner à la noisette.
Sans attendre la réponse de son colocataire, le fermier aux cheveux tressés trempa la viennoiserie largement enduite d'agrément onctueux et sucré dans un gros bol de chocolat au lait de soja parfumé à la vanille.
En haut, Sabrefield hennit soudain.
- Je vais lui apporter des pommes, décida son nouveau maître.
Au passage, il lui offrit également une bassine remplie d'eau fraiche.
Tandis que le cheval petit-déjeunait à distance, Harry réfléchissait.
Au bout de quelques instants, il donna enfin l'idée dont il était le mieux convaincu :
- Touche ta pierre.
Ce que l'éleveur de cochons fit.
Effectivement, Kharg avait tout bonnement oublié l'existence de cet étrange objet magique.
En l'effleurant avec la paume de sa main, il croisa le visage fermé à la beauté froide de Nerthus Salazar.
La vision était si précise qu'on la voyait attablée au sein d'un salon aristocratique autour d'une table chargée de mets divers et compliqués.
- La fille du carrosse, cracha alors Harry.
La peste leur ayant hurlé de s'endormir, qui avait également perdu son chien suite à la fugue de celui-ci - si même son familier ne voulait pas d'elle... - en plus de s'être éclipsée pour aller on ne sait où au moment où elle aurait dû se trouver avec le convoi en train de se reposer.
Et quid des coups de fouets qu'elle avait agréablement donné avec grande générosité lors de leur séquestration dans l'enclos d'Attica ?
Bien heureusement, ni Kharg ni Harry n'en avaient bénéficié, néanmoins...
Un détail attira l'attention du jeune homme dépourvu - à cet instant - de familier.
- Pourquoi elle nous a libéré ? remarqua-t-il.
En effet, la vipère aurait tout simplement pu éviter leur enlèvement.
À moins que...
- On lui posera la question, acheva cette conversation étrange l'homme au cochon à ressort.
Une fois repus, le choix fut fait d'attendre sagement la venue de Nerthus pour Kharg, mais pas pour Harry.
- Tout ceci sent très mauvais, pressentit-il.
Puis il remonta effectuer sa toilette, non sans avoir caressé quelques instants le beau cheval au passage.
Kharg assis sur le canapé, son spoink sur les genoux ne savait que faire.
Se débarrasser de la pierre et s'enfuir comme Harry le prévoyait ?
Mais si leur pierre s'était retrouvée d'elle-même dans leur poche, peut-être leur localisation était-elle accessible de partout pour cette Nerthus...
Aidé de son premier familier, le jeune fermier - qui fantasmait à l'idée de retourner à l'élevage de ses parents mais craignait de les mettre en danger - farfouilla un peu partout dans la maison à la recherche d'un indice permettant de connaître l'identité du véritable propriétaire des lieux.
Il chercha encore et encore mais ne trouva rien.
C'était comme si cette maison confortablement meublée, totalement propre et aux placards et réfrigérateur plein à craquer n'avait été établi qu'en vue de les accueillir lui et Harry.
Soudain, ce dernier descendit les marches, livide.
- Je crois savoir à qui appartenait cette maison, dit-il légèrement horrifié.