3 : Les passagers

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L'hélicoptère d'Ingmar Larsson rejoignit le chasseur de ses collègues Anselme Rojas et Izidor Kaluža qui voltigeait au-dessus de la passerelle à proximité de laquelle la berline au très singulier conducteur avait été engloutie

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L'hélicoptère d'Ingmar Larsson rejoignit le chasseur de ses collègues Anselme Rojas et Izidor Kaluža qui voltigeait au-dessus de la passerelle à proximité de laquelle la berline au très singulier conducteur avait été engloutie. Cinq fantassins dépourvus de Zaters, à partir de l'imposante machine ébène à voilure tournante, s'enrobèrent d'une lumineuse enveloppe brunâtre identique à celle qu'avait produis le matou et plongèrent à leur tour dans la Meuse. Après avoir activé les diodes électroluminescentes intégrées à leurs gants, ils retrouvèrent assez rapidement, au fond des flots troubles, le véhicule vide de ses occupants et entouré de quelques poissons curieux. Le chef des opérations au blouson d'aviateur, à cran, décocha brusquement un coup de poing sur la large surface vitrée devant laquelle il se trouvait posté dans l'hélicoptère. La vitre s'avérait, de toute évidence, être plus solide que ses phalanges proximales ; il grimaça et secoua ses doigts pour en dissiper la douleur. Il prit ensuite une profonde inspiration et navigua dans le menu de sa montre-bracelet. Il se retrouva de nouveau connecté à l'aérodyne des Commandants Rojas et Kaluža.

<< Vous deux ... Allez patrouiller plus loin en suivant le courant du fleuve. Le chat et le forçat doivent se trouver dans les environs.

— À vos ordres.

— À vos ordres ! >> répéta béatement le plus élancé du duo.


Zoran émergea des flots en gravissant une série d'échelons fixés à la berge. Son compagnon au pelage noir s'était accroché à son cou. La lumineuse membrane imperméable qui les enveloppait s'estompa. Le garçon au pantalon de visibilité fit promptement l'ascension des marches en brique qui menaient au trottoir de la route régionale qu'ils avaient précédemment empruntée. La circulation, dans cette précoce matinée, était relativement fluide.

<< Nous sommes pratiquement secs. constata-t-il. Tu es donc capable de générer une sorte de combinaison de plongée ...

— Nous sommes sortis à temps ... Mon interface graphique m'indique que l'azote commençait à manquer dans mes réserves. Apparemment, si j'en crois ce que je lis dans mon menu virtuel interactif, ce gaz s'associe à une technologie basée sur l'électrolyse augmentée qui récupère l'oxygène de l'eau en se débarrassant de l'hydrogène ; le mélange d'azote et d'oxygène nous a permis de respirer.

— ... Oui ... Tu es clairement un robot. >>

La petite bête sauta à terre. Le jeune évadé leva la tête et aperçut une partie de l'imposant hélicoptère d'intervention à quelques centaines de mètres de là, stationnant dans les airs, au-dessus de la passerelle auprès de laquelle ils avaient coulé. Un pont routier les protégeait du champ de vision des occupants de l'appareil. Néanmoins, ils purent entendre le ronronnement déplaisant d'un réacteur bien familier qui s'intensifiait.

<< Ils arrivent ! Cachons-nous ! >> alerta le matou.

Ils se réfugièrent sous le pont, échappant ainsi à l'angle de vue du chasseur grège qui filait comme une flèche au-dessus de leur tête.

<< Ils vont revenir ! signala le chat. Arrête l'automobile qui vient dans notre direction et arrange-toi pour qu'elle nous convoie le plus loin possible ! Il s'agit de deux personnes âgées ...

— ... Hein ? Tu parviens à voir qui se trouve à l'intérieur à une telle distance ?

— Oui ... >>

Zoran se plaça au beau milieu de la chaussée pour stopper l'automobile vermeille ; il put constater par lui-même que l'homme assis à la place du conducteur et la passagère installée à sa droite étaient bel et bien deux septuagénaires. Le volant directionnel était ployé sous le tableau de bord, ce qui signifiait manifestement que la voiture transportait les deux passagers en mode de pilotage automatique.

L'engin s'immobilisa.

<< Bonjour, jeune homme. En quoi puis-je vous aider ? demanda le conducteur - ou, tout du moins, le personnage assis à la place susdite - au vertex dégarni et au polo froissé après avoir abaissé la vitre de sa portière.

— Je dois partir avec mon chat ... Où allez-vous ?

— Nous partons en zone hollandaise visiter des musées ... Et toi, où vas-tu ? >>

Le mystérieux animal se rapprocha de l'évadé.

<< Impeccable ! Dis-lui que c'est là que nous allons ! lui souffla-t-il discrètement.

— ... C'est là que je dois aller ! Puis-je vous accompagner ? >>

Curieusement, la passagère à la face flétrie, maculée de lentigos séniles et tout aussi dénuée d'expression que le personnage à sa gauche, fixa silencieusement le forçat durant un moment.

<< J'aimerais venir avec vous en zone hollandaise. insista le garçon.

— C'est justement là que nous partons travailler. C'est notre chemin. déclara la dame sur un ton lymphatique. Tu peux monter.

— Ne vous inquiétez pas ! Vous allez travailler ? Monsieur vient de dire qu'il comptait visiter des musées ... >> questionna Zoran en ouvrant la portière donnant sur la banquette arrière.

Le chat le rejoignit sans que cela ne semble déranger les septuagénaires. Le véhicule redémarra et passa sous la passerelle, se retrouvant à présent bien en vue de l'hélicoptère dont ils se rapprochaient ; le vitrage les rendait néanmoins difficilement discernables à une telle distance.

<< Tu as bien dressé ton animal. fit remarquer la passagère.

— Il est bien éduqué. >>

Elle scruta de nouveau le jeune homme durant de longues secondes dans un silence pesant et embarrassant. Ils dépassèrent l'imposante machine à voilure tournante. Ils purent reconnaître l'aéronef grège qui patrouillait au loin.

KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant