6.5 : La pale et la bouteille brisée

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Côte à côte, les deux pouilleux réalisèrent que la machine de l'ex-Lieutenant autrichien fonçait droit sur eux à toute pompe

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Côte à côte, les deux pouilleux réalisèrent que la machine de l'ex-Lieutenant autrichien fonçait droit sur eux à toute pompe. Ils l'esquivèrent en s'écartant l'un de l'autre avant de se réunir de nouveau. L'engin au châssis et aux éléments de carénage argentés dérapa, contourna une rangée d'aérodynes et se lança à leur poursuite. Le conducteur marqué d'une cible aperçut brièvement le singulier motard au pelage noir.

<< Purée ! On dirait un chat !

— Quoi ? >> demanda l'autre.

La petite bête les rattrapa et se plaça à la gauche du pouilleux qui venait de le discerner. L'homme, paniqué, essaya de le frapper à l'aveugle mais récolta un vif coup de griffe au travers de son gant de cuir capitonné. Il hurla. Le matou prit de la hauteur et se pencha quelques secondes afin d'entrer en contact, du bout d'une patte antérieure, avec le guidon du cycle à quatre roues, générant fugacement quelques légères étincelles bleuâtres.

<< Hé ! Qu'est-ce qui se passe ? >> fit l'individu aux commandes, à présent incapable de maîtriser son véhicule.

La machine de Friedrich s'éloigna. Le quadricycle accéléra brusquement et perdit vraisemblablement sa tenue de route.

<< Hé ! Je ne contrôle plus rien ! Les freins ! Ça va trop vite ! >>

Le pouilleux, dans une mauvaise manœuvre, se heurta violemment l'épaule à la queue d'un aéronef et chuta avec son véhicule. Son binôme ne put éviter le quadricycle et, dans le choc, fut expulsé du sien, atterrissant tête première à terre.

Les deux derniers compères motorisés toujours en piste croisèrent leurs camarades inanimés et s'échangèrent un regard, ébahis. Ils ramassèrent alors, en ralentissant un moment, des ustensiles trainant à terre ; le premier, aux incisives taillées en pointe et à la langue bifide, s'empara d'une bouteille de verre qu'il brisa illico contre son porte-bagages pour ne garder que le goulot ; le second, un barbu maigre comme une allumette qui portait un cache-œil, attrapa une pale d'hélice rouillée. Le chat les repéra.

Les autres pouilleux restés près du pauvre Klaus Friedrich étaient manifestement occupés à réaliser que de nombreux imprévus s'étaient invités dans la traque.

<< Il se passe quoi, Sterben ? hurla l'un d'eux, aux cheveux longs et verts, en direction de la tour de contrôle.

— Il y en a trois qui sont tombés. avoua le chef de bande via les haut-parleurs, observant l'opération au travers de sa lunette de vision nocturne. Quelle bande d'amateurs.

— Oui ... Quel bande d'amateur ! >>

L'ex-Lieutenant, de son coté, assistait au spectacle de son et lumière dans une mine toujours aussi interrogative.

La portière du sous-marin se releva. Zoran, haletant, se réfugia immédiatement dans l'habitacle et se coucha sur les deux sièges du vaisseau. Il s'était préalablement débarrassé de son pantalon de visibilité et agissait en caleçon, sans aucun doute pour éviter d'être repéré sur la plage. La marée était, pour l'occasion, nettement éloignée.

<< Allez ... >>

Il maintint la lampe-torche éteinte entre ses incisives et aventura ses deux mains sous la planche de bord, l'inspectant à tâtons. Il finit apparemment par sentir quelque chose du bout des doigts et déclencha l'ouverture d'une trappe dans la même zone. Il empoigna la lampe, l'alluma et se positionna à l'envers sur un siège, le vertex contre le sol, afin de jeter un œil sous la planche. Il se releva et, après quelques essais, parvint à détacher à cet endroit un long parallélépipède rectangle métallique aux embouts noirs. Il éteignit la lampe-torche et se retira du submersible avec l'objet, rabattant fermement la portière. Il tendit l'oreille, oyant des cris à peine couverts par le son produit par le clapotage des vagues et le souffle duvent mais provenant néanmoins d'une source relativement éloignée. Il longea le brise-lame hâtivement, le dos courbé. Il s'arrêta aux deux-tiers du long monticule en enrochements et observa silencieusement la digue. Un bruit de d'éclatement de verre retentit mais, de nouveau, sa provenance semblait distante. Il se précipita à toutes jambes, sur plusieurs mètres, en direction de l'escalier liant la plage à la promenade.

KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant