7.5 : Les tentacules

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Klaus Friedrich nageait seul et entièrement habillé dans les eaux salées qui séparaient la prison insulaire de l'Allemagne continentale, une machette à la main

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Klaus Friedrich nageait seul et entièrement habillé dans les eaux salées qui séparaient la prison insulaire de l'Allemagne continentale, une machette à la main. L'humeur sereine de la mer lui facilitait sa progression et son éloignement des côtes. Son champ visuel, entièrement bleu de bas en haut, commença à se troubler par l'étrange animation, à plusieurs mètres de lui, d'entités semblables, de prime-abord, à de gigantesques bulbes transparents.

<< Les voilà ... >>

Les ombrelles gélatineuses et tentaculaires s'élancèrent à toute vitesse vers la proie autrichienne.

<< Je répète : tu appuieras sur ce bouton dès que j'aurai sauté dehors ! La portière se refermera ! >> commanda le félin noir à l'ex-forçat.

Le vaisseau submersible dans lequel les deux compagnons d'aventure avaient réembarqué se mouvait sous les flots. En levant la tête, ils pouvaient déjà distinguer, au loin, des cnidaires robotiques qui fonçaient droit sur une silhouette humaine située à la surface.

<< J'ai mal au ventre ... confia le jeune homme.

— Tu préfères rester à Borkum ?

— Franchement, non ... >>

Une dizaine de méduses s'étaient déjà regroupées et se trouvaient à présent à une distance relativement dangereuse du sexagénaire qui, à présent, faisait du surplace.

<< Allez ... Qu'est-ce qu'ils font ? Ils ne vont tout de même pas me laisser mourir ici ! >> s'exclama-t-il, inquiet.

Le matou donna un vif coup d'accélération à l'appareil pointé sur les gardiennes de l'île qui étaient à deux doigts d'attaquer le pauvre homme et, facilité par la supercavitation, remonta à fond de train jusqu'à la surface.

Klaus Friedrich fut indubitablement ébahi par le saut phénoménal de l'énorme poisson jaune qui, comme un violent coup de poing remontant, heurta les deux méduses les plus proches de lui, allant jusqu'à déchirer l'ombrelle de l'une d'entre elles.

<< Maintenant ! >> hurla le chat.

Le félin noir s'éjecta sans plus attendre du vaisseau dans les airs par la portière dont il venait d'enclencher l'ouverture immédiate. Zoran la referma aussitôt, quand la machine fut retombée à l'eau. L'ex-Lieutenant, au même moment, prit du recul par rapport à la masse de liquide visqueux et possiblement toxique qui jaillissait de la cloche natatoire qui venait d'exploser ; bien heureusement, sa propagation se doublait d'une rapide dissolution.

Le chat venait d'atterrir sur le sommet de l'ombrelle d'un cnidaire. Un autre jeta sur lui ses tentacule artificielles mais il les trancha en quelques vifs coups de griffes et, après s'être enrobé de la lumineuse enveloppe brunâtre qu'il avait utilisé la veille sous la Meuse - soit sa technologie à effet d'électrolyse augmentée, comme il l'avait expliqué - , incisa le support transparent sur lequel il était posé ; son dispositif lui permettant de respirer en plongée le protégeait assurément de la substance visqueuse qu'il venait de libérer.

Zoran, les pieds baignant dans l'eau salée qui était parvenue à s'infiltrer dans la cabine avant la refermeture de la portière, vit le vaisseau sous-marin se faire assaillir par les tentacules de trois méduses ; elles commencèrent à se le disputer ; le garçon, terrifié, s'accrocha à son siège pour se protéger des secousses.

<< Faites vite ! >> souhaita-t-il en pensant indéniablement à ses deux associés d'évasion.

Friedrich, tout en nageant à reculons, trancha quelques appendices offensifs. Le lumineux félin marron retomba soudainement sur son épaule.

<< Elles sont trop nombreuses ! cria le sexagénaire déjà bien essoufflé. Regarde ! D'autres sont en train d'arriver par dizaines et Zoran va se faire broyer ! C'est fini pour nous !

— Non ! Faites ce que je vous dis ! >>

Le chat s'élança alors sur la première méduse qui chargeait sur eux et, pendant que l'ex-Lieutenant autrichien s'occupait de lutter contre des tentacules qui parvinrent finalement à le saisir, incisa partiellement son ombrelle ; protégé par son enveloppe brune, il plongea dans la substance visqueuse et potentiellement toxique avant de saisir le processeur du cnidaire ; il s'agissait, comme il l'avait expliqué la veille à l'ex-forçat, du cœur de fonctionnement des gardiens bioniques. Cherchant encore à se débattre, la méduse se précipita sous l'eau, comprimant le pauvre Friedrich dans ses appendices. L'ex-Lieutenant, à présent privé de tout mouvement, était de fait incapable de se libérer. Le matou parvint à se concentrer sur le composant électronique malgré les remous.

Les tentacules se décontractèrent, relâchant enfin le sexagénaire qui, sans demander son reste, remonta hâtivement à la surface. Il sortit la tête hors de l'eau et constata que la centaine de cnidaires qui se ruaient sur eux ou qui s'y apprêtaient s'immobilisèrent quelques secondes avant de rebrousser chemin. Le submersible, que certains d'entre eux venaient de se disputer, flottait à présent tranquillement sur la masse liquide malgré sa coque en partie dégradée. Le chat émergea à son tour des flots, à présent redevenu entièrement noir.

<< Hein ? fit l'Autrichien.

— J'ai piraté le processeur de la méduse qui nous attaquait en faisant croire à ses collègues qu'elle nous avait neutralisé ... Un simple signal envoyé sur leur réseau ...

— ... >>

Ils nagèrent jusqu'au vaisseau sous-marin où les attendait le garçon au pantalon de visibilité. Tous trois étaient à bout de souffle.

KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant