Une canonnade effrénée avait lieu dans l'ancien commissariat du petit village isolé et peu peuplé d'Allemagne de l'Est pour lequel aucun renfort, jusqu'ici, ne s'était encore manifesté. Les hussards polonais défendaient leur vie et leur position avec leurs armes d'infanterie et des grenades à main ou tirées par des modules montés sous certains canons. Ils avaient tenté de dresser une barricade dans la cage d'escalier, au niveau du second étage, à l'aide de trois tables, de chaises, d'une armoire à rideaux, d'une vieille fontaine d'eau fraîche et de ses réservoirs encore remplis, en vain ; les monstres mécatroniques empruntaient les moindres brèches, couraient sur les murs et bondissaient en tous sens ; l'intelligence artificielle aidant certainement, ils s'avéraient nettement redoutables dans le conflit. Les hussards tombaient comme des mouches sous les décharges des fusils à foudre dorsaux des reptiles d'acier, tandis que d'autres, parfois, parvenaient à mettre ceux-ci hors d'état de nuire avant d'être à leur tour neutralisés. L'étranger en treillis d'automne et à la cagoule grenat, pendant ce temps, progressait d'un pas lent mais assuré dans l'établissement au fur et à mesure que les effrayantes machines gagnaient du terrain.
Les six Polonais qui occupaient le principal bureau du troisième étage vinrent se positionner tactiquement dans le couloir, dans l'attente de l'ennemi. L'ex-forçat, qui entendait forcément la fusillade se rapprocher, sortit quelques secondes de sa cachette pour s'emparer d'un fusil à foudre laissé dans la pièce avant de retourner se mettre à l'abri.
Le félin noir, à partir de la table de bureau, avait accès aux retransmissions de l'ensemble des caméras de sécurité de l'établissement. Il remarqua deux dragons s'introduire dans son cachot, peut-être pour vérifier son éventuelle présence. Apparemment à l'aise avec l'outil informatique, il se débrouilla pour que la lourde porte coulissante de l'étroite et obscure pièce se referme subitement derrière eux, les emprisonnant à leur tour.
Trois reptiles, à deux doigts de parvenir au dernier étage, tiraillaient des éclairs électriques magenta en direction des Polonais chargés de protéger les deux étrangers. Le matou exécuta une commande, déclenchant les extincteurs automatiques à eau qui propulsèrent de puissants jets du plafond ; ces monstres d'acier, sous l'effet de la pluie, furent ainsi mis en court-circuit au moment où ils déchargeaient. Cependant, très rapidement, une nouvelle vague de robots contourna le problème en courant sur les murs et se jeta en masse sur l'ennemi au corps à corps. L'un d'eux, luttant contre le hussard lunetté après avoir encaissé une balle de pistolet dans une patte, s'agrippa à lui et provoqua sa chute dans l'escalier. Górski vida le chargeur d'un Beryl sur un dragon mécatronique et, parvenant enfin à lui exploser la tête, revint aussitôt se réfugier dans l'espace de travail qu'il occupait précédemment afin de recharger son arme pendant que d'autres soldats le couvraient ; il éteignit l'éclairage artificiel dans la foulée. Il ne remarqua pas Zoran, toujours caché. Le chat, lui, avait disparu.
Quand il eut placé son nouveau chargeur dans son Beryl, la fusillade s'interrompit brusquement, laissant place à un silence inquiétant. Il renversa la table de travail sur laquelle étaient étalées quelques ailes aux plumes de cygne synthétiques et se protégea derrière la surface. Il suait à grosses gouttes. Il entendait les pas légers de deux ou trois dragons se rapprocher.
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KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]
Science-FictionGAGNANT WATTYS 2021 ⭐ Un mystérieux chat noir pourchassé par l'armée libère un jeune prisonnier ayant participé, quelques années plus tôt, à la dernière guerre des Balkans. Au fur et à mesure d'une traque qui se poursuivra au travers de l'Europe et...