Mégaclès Arkoudas arriva à la hauteur de son père et de son formateur. Il remarqua sans tarder l'étonnante agitation qui avait lieu dans la petite pièce dans laquelle il passait habituellement ses nuits.
<< Où étais-tu ? questionna Hélios.
— ... Que se passe-t-il ?
— On m'a volé quelque chose. expliqua Knut Moen.
— ... Que vous a-t-on pris ? >>
Il les dévisagea.
<< ... Des documents.
— C'est-à-dire ? >>
Le Général fit discrètement signe au neurobiologiste de se taire.
<< Nous en reparlerons plus tard. >> dit-il.
Le jeune homme resta de marbre, un mutisme qui pouvait potentiellement relever du dédain. Le chef d'État-Major des forces armées de la Suggestion parut froissé. Les trois personnages en blouson de cuir évacuèrent enfin de la chambre.
<< Il n'y a rien. >> informa Panchev.
Knut Moen et Hélios Arkoudas s'échangèrent un regard. Le Général adressa un bref rictus forcé à son fils avant de s'en aller, sans ajouter un mot, en compagnie du scientifique échevelé et des policiers militaires. Tandis que Mégaclès les observait s'éloigner, son condisciple métis sortit de la pièce et le rejoignit.
<< ... Mais qu'est-ce qu'ils nous voulaient ? >>
Le neveu d'Aurore et de Sélène le laissa sans réponse.
Le félidé de guerre se retrouva de nouveau dans le jardin du Wawel, se mouvant furtivement entre une haie et un rosier couvre-sol ; il photographia sous plusieurs angles la maison de garnison et les hussards ailés aux alentours à l'aide de ses yeux-caméras. Il se posta dans l'ombre d'un arbuste finement taillé et filma quelques soldats ailés en train d'effectuer leur tournée sur un sentier à proximité, ajoutant des annotations et des tracés de trajets à ses précieuses données. Il se faufila entre deux arbrisseaux et indexa les différentes mini-caméras de sécurité éparpillées qu'il détectait à courte et moyenne distance en passant dans un mode de visionnement thermique.
À l'intérieur du château royal, il reconstituait dans sa mémoire informatique le plan de sol sans épargner les passages secrets. Il passait de pièce en pièce, effleurant les lecteurs muraux et autres écrans tactiles adjacents à différentes portes les uns après les autres ; il en profitait alors pour enregistrer tous les codes et autres moyens d'accès. Il s'était fatalement introduit dans les bureaux du service informatique du lieu, dérobant aisément un maximum de données et concluant sa visite par l'injection de quelques virus et autres chevaux de Troie.
L'Hetman Emil Marek, aux côtés du Roi Boleslas le Victorieux, tapota une suite de numéros sur un écran tactile discrètement encastré au pied d'un mur - juste au-dessus d'une plinthe - , provoquant le coulissement d'une porte inattendue ; il s'agissait d'un buffet vitré qui donnait accès à un passage imperceptible.
<< Ce dispositif fonctionne à merveille, Votre Majesté ... Je suppose que l'incident informatique d'hier soir n'était qu'un léger dysfonctionnement, cette porte ne peut pas être bloquée ...
— J'ai bien compris ... Je serais bien la dernière personne à emprunter ce passage ...
— Je ne pourrai pas vous laisser le choix en cas de problème. >>
L'animal, caché sous une commode à quelques pas, enregistrait soigneusement la scène.
Pendant qu'il rêvassait à ces souvenirs, inconscient, deux femmes affublées d'une blouse bleue ciel et d'un masque chirurgical le sortirent d'une petite cage de transport et le déposèrent délicatement sur une table d'examen.
Le fils de Boleslas et d'Hedwige dessinait une couronne ornementale sur une paroi de son étroit et sombre cachot en frottant dessus le caoutchouc constituant la semelle de l'une de ses bottes préalablement ôtée d'un pied. En dessous du croquis, il rédigea en Polonais la légende suivante : Ici se trouvait le vaillant Casimir, Prince de Pologne. Il se rassit ensuite sur son matelas sordide posé sur une simple planche de bois. Il observa sans réagir un rat avec lequel il partageait visiblement des rations ; en effet, il avait laissé quelques bouts de pains sur le sol humide de la cellule à défaut de les conserver dans sa gamelle. De temps en temps, il lui arrivait d'entendre des reptiles d'acier circuler dans le couloir longeant son cachot ; il pouvait les distinguer au travers du vasistas rayé de barreaux de sa porte en acier. La seule source de lumière à laquelle il avait accès passait par même ce châssis ; des tubes fluorescents allumés en permanence étaient disposés tout le long du passage.
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KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]
Science FictionGAGNANT WATTYS 2021 ⭐ Un mystérieux chat noir pourchassé par l'armée libère un jeune prisonnier ayant participé, quelques années plus tôt, à la dernière guerre des Balkans. Au fur et à mesure d'une traque qui se poursuivra au travers de l'Europe et...