5.8 : Sterben

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Le groupe de crasseux se mit à marteler le nom du personnage à la face tatouée : << Sterben ! Sterben ! Sterben !

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Le groupe de crasseux se mit à marteler le nom du personnage à la face tatouée : << Sterben ! Sterben ! Sterben !

— Allez, Sterben ! Mets-lui sa raclée ! >> cria d'une voix rogommeuse le pouilleux dont une dizaine de piercings de surface étaient plantés sur le crâne.

Les deux vaincus, après s'être péniblement relevés, s'en allèrent rejoindre le rang des spectateurs hauts en couleur. L'ex-Lieutenant et le chef de bande se toisèrent l'un et l'autre.

<< Regarde où j'en suis, maintenant. Ils m'acclament tous.

— ... Tu ne m'impressionnes pas, moi. lâcha Friedrich. L'heure finit toujours par tourner pour tout le monde sur cette île ...

— Tu ne m'apprends rien ... Tant qu'à faire, c'est toi qui as récupéré la moto de ton chef après sa mort ... Où se trouve-t-elle ?

— Je n'ai rien à cirer de cette moto, Sterben ... Mais ne crois pas que c'est pour autant je vais te la donner ! Tout ce qui m'intéresse, c'est te régler ton compte une bonne fois pour toutes et t'humilier devant tous tes hommes !

— ... Demain matin, tu te réveilleras sur le phare, comme tous les abrutis de ton espèce ! >>

L'Autrichien laissa tomber sa poêle à terre et, présentant ses deux poings nus, se positionna en garde. Le chef de bande se craqua les doigts. Les spectateurs reprirent de plus belle : << Sterben ! Sterben ! Sterben ! >>

Les deux hommes se jetèrent l'un sur l'autre et commencèrent à échanger, bloquer et parer de violentes frappes en recourant à leurs quatre membres. Au fur et à mesure de l'affrontement, la scène nécessitait un élargissement de son espace, ce qui contraignait la bande à dilater le cercle. Le sexagénaire, après s'être vu administrer un coup de pied dans le torse qui provoqua son heurt contre la façade du restaurant, maintint son équilibre en s'accrochant à l'un des battants d'un contrevent ; il arracha alors celui-ci d'un coup sec et le fracassa sur la tête tatouée de l'ennemi. Sterben, légèrement étourdit, encaissa une pluie de coups de Friedrich, reculant toujours un peu plus avant de se faire littéralement expédier sur une automobile entièrement carbonisée. L'ex-Lieutenant, sans la moindre retenue, lui porta furieusement son talon dans la pommette gauche. Une seconde tentative fut repoussée par son opposant qui, d'une balayette, le fit choir. Le personnage à la face tatouée et amputée du nez se releva aussitôt et lui octroya ensuite plusieurs coups de pied dans les côtes. Profitant des difficultés qu'éprouvait le sexagénaire à se remettre en route, il détacha en un mouvement la portière de la carcasse carbonisée auprès de laquelle ils se trouvaient.

<< Qu'est-ce qu'il fait ? se demanda l'évadé du pénitencier liégeois.

— Ils sont complètement fous sur cette île ... >> observa le matou.

L'Autrichien chercha à se remettre sur ses jambes mais se prit de plein fouet le lourd élément de ferraille en pleine tête. Il s'écroula encore à terre. Le chef de bande relâcha l'énorme pièce détachée et, sans scrupule, réédita sa série de coups de pied contre son opposant exténué.

<< Alors ... Friedrich ... >>

Il se retourna, satisfait, afin de se faire de nouveau acclamer par son public. L'ex-Lieutenant exploita ce moment d'inattention pour le heurter rudement du pied au niveau de la fosse poplitée, ce qui provoqua le déséquilibre et la chute de l'ennemi. Le sexagénaire, toujours au sol, s'acharna contre la tête tatouée ; son adversaire, qui se protégeait de ses poings, parvint néanmoins à se relever après une roulade. Friedrich, qui semblait nettement plus souffrant et essoufflé que Sterben, fit de même. Il tenta alors un nouvel enchaînement de frappes mais son opposant les para toutes aisément avant de le repousser et de lui rendre la pareille. L'Autrichien, incapable d'éviter certains coups décisifs, dont un dans le plexus cœliaque et un autre en pleine face qui provoqua une légère giclée de sang, sombra finalement pour de bon à terre, pratiquement inanimé.

<< Alors ? Qui est le champion de Borkum ? hurla Sterben à ses supporteurs.

— C'est toi, Sterben ! >> soutint le pouilleux à la voix rogommeuse.

L'ovation reprit dans un déchaînement d'hystérie. L'homme au visage tatoué et au nez amputé levait les poings.

<< C'est fini ... Qu'allons-nous faire ? interrogea Zoran.

— Attendons qu'ils s'en aillent ... J'ai peut-être une idée pour sauver ce pauvre Friedrich ! >> confia le chat.

Le chef de bande saisit sauvagement l'ex-Lieutenant par le col, le regard menaçant. De minces filets de sang coulaient de la bouche et du nez du sexagénaire à sa merci.

<< Tu vas venir avec nous, à l'aérodrome ... Nous allons nous amuser un peu ... Et au lever du jour, tu auras une magnifique vue sur cette île !

— Bien dit, Sterben ! Ça fait des années que nous attendions tous ce moment ! >> lança l'un de ses sbires, clairement enthousiaste.

Le deux pouilleux qui s'étaient précédemment battus contre l'Autrichien s'emparèrent de lui, l'un d'eux profitant de l'instant pour lui porter une dernière gifle.

La bande quitta les lieux en remontant la rue perpendiculaire au restaurant afin de retrouver leur quadricycle. À l'aide des lourdes chaînes en acier brossé qui avaient précédemment servi au combat, Sterben attacha le pauvre Klaus Friedrich comme un saucisson, en position horizontale, sur son propre dos. Ils démarrèrent en riant aux éclats. L'animal et le l'ex-forçat les écoutèrent s'éloigner.

KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant