8.2 : Berlin-Ouest

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Le pick-up des évadés de Borkum entra enfin dans le Berlin-Ouest intramuros

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Le pick-up des évadés de Borkum entra enfin dans le Berlin-Ouest intramuros. Ils longèrent d'abord des étendues boisées et, ensuite, des lieux de commerces - dont de nombreux restaurants - tantôt encore actifs, tantôt inactifs ; ils croisèrent également quelques monuments, tels que la colonne de la victoire, illuminés par des diodes qui enchaînaient les variations de couleurs.

<< Tout a changé ici ... >> observa Friedrich.

La voiture traversait l'artère du dix-sept Juin, bordée par des tilleuls.

<< Quel est le grand monument, là-bas ? interrogea Zoran.

— C'est la porte ... La porte du mur de Berlin. >>

L'imposant édifice acropolien qui se dressait au bout de la route était divisé en cinq passages constitués de six colonnes doriques ; celles-ci soutenaient le chevêtre couronné par une statue de cuivre représentant une femme conduisant un quadrige tiré par quatre chevaux ; ces piliers étaient traversés par deux plaques d'acier faisant office de double porte permettant un accès qui, comme l'avait précédemment expliqué l'ex-Lieutenant autrichien, était accordé lors de très exceptionnels rendez-vous diplomatiques. Le chat observa d'un air intrigué les hautes tours de couleur jaune qui longeaient le mur de Berlin à intervalles réguliers, soit tous les sept mètres.

Ils poursuivirent leur route jusqu'à ce que le sexagénaire finisse par déployer le volant afin de se parquer manuellement à proximité d'un jardin public. Ils continuèrent leur progression à pied et à patte en traversant le lieu d'agrément, croisant des passants à la face apathique et aux pupilles dilatées tout en évitant autant que possible d'apparaitre dans le champ visuel des quelques patrouilles militaires qui surveillaient la frontière.

<< Suivez-moi ... leur pria Friedrich. Nous aurons besoin de forces pour franchir le mur demain.

— Oui ... Et j'ai besoin de réfléchir à un plan ... >> émit le félin noir.


Une éclipse fut provoquée par la conjonction de la lune et d'une petite boule orange placée à trois centimètres de l'œil dextre d'Ingmar Larsson. L'officier était confortablement installé sur une chaise en osier, sur le balcon du second étage de la maison mitoyenne dans laquelle il avait pénétré la veille, face à une table façonnée avec la même essence et sur laquelle étaient posés son pistolet - semblable à un Glock 17 - , son chargeur et quelques cartouches dorées. Il était simplement vêtu d'un caleçon et d'un maillot de corps.

Il porta finalement le bonbon qu'il tenait entre le pouce et l'index à ses lèvres et le goba. Il s'accrocha un moment aux accotoirs du siège, contracta subitement ses paupières et inspira fortement. Il reçut un appel sur sa montre. Il releva la tête et haleta un long moment, jusqu'à paraître plus décontracté. Enfin, il décrocha.

<< Allô ? >> fit-il, la respiration encore saccadée.

Sania apparut sur l'affichage semi-holographique du cadran.

<< Commandant Larsson ... Il y a du nouveau.

— Allez-y.

— Vous allez bien ?

— ... Oui, Sania ... Qu'y a-t-il ?

— La police de la zone allemande m'a appelée.

— Ah oui ?

— Ils ont détecté un signal de détresse automatique émis par un vaisseau sous-marin en matinée, en mer du Nord. Il semblerait que ce soit l'appareil que nous recherchons. Il est possible qu'il se soit fait attaquer par les méduses bioniques qui gardent l'île-prison de Borkum.

— Borkum ...

— Oui. Ce n'est pas tout. L'hôpital universitaire d'Hambourg vient également de me contacter.

— Continuez ...

— Un détenu de l'île vient de leur être livré pour faire don de son corps à la science et aux nécessiteux ... Il a parlé aux hommes qui l'ont pris en charge d'un chat noir doté de la parole. L'un d'eux est un vieil ami du Professeur Ziyo et il est bien au courant de l'existence du félidé ... Il a eu le bon réflexe de nous appeler.

— Intéressant ... Ce détenu a-t-il été cuisiné ?

— Heu ... Oui. J'ai demandé d'en savoir plus avant sa neutralisation. Le félidé et le forçat auraient vraisemblablement aidé un autre détenu à s'évader de l'île. Il s'agit de Klaus Friedrich, un ancien officier autrichien emprisonné depuis une vingtaine d'années.

— D'où le chat connaitrait-il cet homme ? Pourquoi l'aurait-il aidé à s'évader ?

— Je l'ignore.

— Sania ... Trouvez-moi tout ce que vous pouvez sur ce Klaus Friedrich. Je veux tout savoir sur lui, en particulier les éventuelles connaissances qu'il pourrait encore avoir en zone allemande et autrichienne après vingt ans de captivité.

— Oui, Commandant. Je m'en occupe tout de suite.

— Très bien. Je vous prie de mobiliser Anselme et Izidor, j'aimerais les retrouver au plus tôt ... Il faudrait aussi que vous preniez contact avec les forces armées présentes dans la région.

— Oui, Sélène s'en occupe déjà.

— Bien. Bon travail. >>

Il raccrocha. Il parut cogiter quelques instants tout en se mordillant le bout d'un pouce puis chargea son pistolet.

<< Je vais te retrouver, sale bête ... Et je vais t'abattre comme un lapin ... >> prédit-il à mi-voix.

Il se leva du fauteuil.

KATZEN - Tome 1 : Mémoire morte [Wattys2021]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant