All monsters are human - le dernier festin.

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**CET IMAGINE CONTIENT DES SCÈNES TRÈS MORBIDES, SANGLANTES ET DÉTAILLÉS EN LIEN AVEC LE CANNIBALISME. CETTE PARTIE POUVANT CHOQUER CERTAINS LECTEURS, VOUS ÊTES AVERTIES DE CE À QUOI VOUS VOUS EXPOSEZ.**

Ses révélations m’ont laissée...confuse et perplexe. Harry-Harold serait aussi Harald, l’homme qui a commis les pires atrocités de l’humanité. Je croyais avoir déjà vu tout ce qu’il y avait avoir, mais j’avais tort. Je croyais avoir entendu tout ce qu’il y avait à entendre, mais je me suis trompée. Je ne l’avais jamais vu, je ne l’avais jamais entendu. C’est une couleur que je ne n’avais jamais observé, et je ne parle pas de celle de ces yeux.

Il avait en fait raison. Se faire dévorer vivant, petit bout par petit bout… il n’y a vraiment rien de pire que d’être torturé et mangé vivant. Naïvement, je n’y ai pas cru. J’ai été aveuglée par les films de Disney et par leur vision du bien et du mal. J’ai gardé ma mentalité d’enfant, celle que j’ai acquise en regardant les dessins animés et dont je n’ai su me débarrasser. Inconsciemment, je pensais que les méchants, les vilains, les brutes, c’était les laids. Je croyais que les beaux étaient toujours les bons, que les biens habillés étaient toujours gentils. Hé oui, je croyais. Je ne crois dorénavant plus.

« Serait-on effrayée? »

         Ha, ha ha, ha, oui. Je le suis à un point comme pas possible, un point inimaginable. Je n’ai qu’une envie : partir. Fuir. Te fuir. Déguerpir loin de toi. Oublier que je t’ai rencontré, oublier que j’ai été en ta présence. Oublier et ne plus savoir. Tout effacer de ma mémoire. Mais je ne peux pas. Je ne peux pas, et je ne dois pas le lui faire voir. Il ne doit pas savoir. Lui témoigner ma peur serait pire que d’aller me jeter dans une piscine de requins avec un bras fraîchement arraché.

« Je devrais?

– Ce que j’ai fais n’est pas anodin.

– Vous aimeriez recevoir des applaudissements peut-être? Désirez-vous une médaille?

– Excusez-moi?

– Vous avez agis tel que vous l’avez fait (je ne voulais pas dire comme un monstre, c’aurait pu être considéré comme un jugement de valeur) seulement pour la gloire? Vous avez commis ces gestes dans le seul but d’être connu et craint?

– C’est ce que vous croyez?
– C’est ce que je vous demande.

– Alors c’est que vous avez tort.

– Dans ce cas, éclairez-moi.

– Lorsque j’étais jeune…

– Traumatisme d’enfance, diagnostiquais-je.

– Vous ne voulez donc pas entendre l’histoire que j’ai à raconter?

– Les traumatismes en bas âges se ressemblent tous, mon cher. Ne croyez pas que vous réinventez quoi que ce soit.

– Vous avez donc déjà entendu des histoires de gamins élevés à manger des orteils, puis des doigts et des bras en grandissant?

– Excusez-moi?

– Ma mère m’a nourri avec un mélange de lait et de sang, et ce, dès ma sortie de l’hôpital. Peut-être que le goût aurait été meilleur seulement avec du sang, ou juste avec moins de lait, mais ce n’était pas moi qui décidait. C’était tout de même bon, très nourrissant étonnement. Vous saviez que le plasma sanguin est rempli de glucoses et de lipides? C’est également bourré de protéines!

– Je suis contente de l’apprendre, répondis-je d’un ton presque neutre, essayant de cacher mon dégoût.

– Sauf qu’après un certain temps, un bambin a besoin de plus… Lorsque je suis devenu trop âgé pour me contenter que de liquide, mon père m’a gavé de purée de graisse ventrale, principalement de femmes. Quand j’ai eu mes premières dents, mes parents ont évolué – ont fait évoluer, plutôt – mon régime alimentaire. J’ai commencé à me sustenter de doigts et d’orteils avant de changer pour des mains complètes. À 7 ans, j’étais déjà capable de manger un bras d’adulte au complet!, s’exclama-t-il avec ce qui ressemblait à de la fierté. »

         J’en eus presque un haut-le-cœur. Je le sentis monter dans ma gorge avant de redescendre, et je dois dire que je n’ai pas du tout apprécié cette sensation, pas plus que la tournure que prenait notre conversation. Harry-Harold me parlait de son régime alimentaire qui est, soyons honnêtes, loin d’être ordinaire,  et ce, comme s’il me parlait d’un match de foot! N’a-t-il donc aucune émotion, aucun remord, aucune conscience? C’est ça! Il est psychopathe. Psychopathe et cannibale, quel beau mélange…

         Je secouai la tête pour reprendre mes esprits, pour chasser ce à quoi je pensais. Je me levai avec le besoin de me dégourdir les jambes, rajustant et lissant mon sarreau. Harry-Harold avait le regard posé sur mes cuisses, comme hypnotisé. Je le voyais se crisper comme un lion qui se prépare à attaquer, quelque peu retenu par la camisole que Wallace et ses comparses lui avaient enfilée.

« Vous faîtes de la musculation?, questionna-t-il d’une voix rauque, et je m’étouffai avec la gorgée d’eau que je venais de prendre.

– Je vous demande pardon?

– Votre chair semble si tendre, mais si vigoureuse en même temps…  Elle semble musclée tout en possédant un minimum de gras…  C’est ce que je préfère. Votre shampooing serait-il à la vanille? Cette odeur empli mes narines et aiguise ma faim. Mon appétit se fait de plus en plus tenace, dit-il, et sa voix se fit de plus en plus rauque. »

         Je soupirai en me tournant vers la fenêtre, mon regard orienté vers le paysage. Je réfléchissais à un moyen de soigner ce patient dégénéré, mais était-ce seulement possible? Je me creusais la tête à la recherche d’une solution lorsque je sentis un souffle chaud au creux de ma nuque. Une main se posa sur ma bouche, et des dents effleurèrent mon cou.

« Vous savez, Dr Grace, vous auriez dû laisser Wallace faire son travail, murmura-t-il contre mon oreille. »

         Avant de pouvoir faire quoi que ce soit, je me retrouvai ligotée sur ma propre chaise de travail avec la camisole de force qu’Harry-Harold aurait dû avoir sur le dos. Ses yeux étaient noirs, noir comme le néant. Il m’était impossible d’y déceler son iris. Sa bouche formait un espèce de rictus mauvais et effrayant.

         Je sentis ses dents transpercer la peau de ma cuisse droite, m’arrachant un cri de douleur inaudible à travers la paume de sa main. Mon sang coulait sur son menton et dégoutait sur moi. Sa bouche mordait toujours plus loin, toujours plus profond et toujours plus violement. Il semblait ravi de me regarder souffrir, et je suis certaine qu’il y prenait plaisir.

         Tranquillement, la douleur s’apaisa. Comment était-ce possible? Je ne sentais plus ma cuisse. À vrai dire, je ne sentais plus rien du tout. Mes yeux étaient lourds et pesant – je n’arrivais plus à les maintenir ouvert pour regarder la scène. Je me sentais comme en train de flotter dans le néant. Bientôt, je fus aspirée dans ce néant qui m’engloutit totalement.

Mille et une vies. [Imagines]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant