Une faim...de loup?

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Allongé dans l'obscurité de ma chambre, j'attends. J'attends que la nuit tombe à l'extérieur, j'attends que mes parents dorment pour pouvoir sortir sans être vu ni entendu, pour pouvoir redevenir celui que je suis. Dehors, les derniers rayons de soleil qui colorent le ciel disparaissent derrière le voile bleuté. Tout est noir. Bientôt, je serai libre d'être qui je suis.

*

Il est presque minuit lorsque je quitte enfin ma tanière, mon repaire. Les rues sont désertes, pas une âme n'erre sur les trottoirs en ce mardi soir. Tout le monde dort, bien au chaud sous leurs draps. Demain, ils se lèveront pour aller travailler, dès les premiers signes du jour qui perceront à travers les rideaux de leur chambre. Il ne m'en faut qu'un, qu'une, peu importe tant qu'un être vivant et humain croisera mon chemin.

Je me promène dans les rues de Sydney, je guette la raison de ma sortie. Encore une fois, j'attends. Mes pas me guident vers le sud, vers la partie plus pauvre de la ville. Là où personne ne remarque rien. Les policiers ne s'aventurent que rarement dans le coin, ils ne sont pas les bienvenus. De toute façon, ils auraient trop de travail tellement la criminalité est élevée par là-bas. Je ne m'y aventure pas trop, je reste à la frontière qui sépare les deux modes de vie des habitants. Adossé au mur d'une ruelle, je veille. Je m'impatiente. J'essaie de garder mon calme malgré la faim qui tenaille mon estomac, je me rassure en me répétant que cette sensation sera bientôt chassée.

Une cigarette entre les lèvres, je passe le temps. J'inspire la fumée toxique qui arrive à me détendre avant de la souffler hors de mon corps. Je suis calme. Je me sens apaisé. Jusqu'à ce qu'un bruit attire mon attention. Un bruit de pas sur le trottoir. Restant dans l'ombre, je m'avance vers la rue afin de voir qui fait ce bruit. Mon regard se pose sur une fille. Une jeune femme, probablement dans la vingtaine à en juger par ses courbes prononcées. Elle est peu vêtue, ce qui est surprenant étant donné la fraîcheur de la nuit. Une prostituée, sans doute. Elle fera l'affaire si elle n'est pas trop intoxiquée.

Je la regarde franchir la ligne invisible entre les deux côtés de la ville, elle se dirige vers le nord de Sydney, là où je vis. Sa démarche est trop stable pour qu'elle ait consommé quoi que ce soit, donc elle doit être sobre. Je la suis, maintenant une certaine distance entre nous afin de ne pas être repéré. Lorsque je la vois s'aventurer dans le bois qui mène à la plage, j'exulte presque de bonheur. Elle est en train de me donner l'occasion parfaite.

J'accélère le pas pour me rapprocher de mon repas. Mes pieds foulent le sol de roche sans faire un seul bruit, c'est comme si je l'effleurais à peine. Lorsque je suis assez près, je sens son parfum. Elle a une odeur florale, très douce et pourtant très enivrante. Je ne peux m'empêcher de saliver. Je suis tellement distrait que je suis à deux doigts de m'enfarger contre une branche qui traîne au milieu du chemin. Je me rattrape à la dernière seconde, et j'ignore comment j'ai réussi à demeurer silencieux pendant tout ce temps. Je reprends mes esprits et me concentre sur ce que j'ai à faire.

Je me décide à sauter sur la fille. Je l'attaque de dos et la plaque au sol. Elle se met à hurler, en vain. Personne ne peut l'entendre au milieu de ses bois. Elle tente de se débattre, mais je suis plus lourd qu'elle. Mon poids sur le sien empêche tout mouvement de sa part. Avec l'aide d'un gros caillou, je l'assomme. Un coup sur le crâne suffit à lui faire perdre conscience, et c'est tout ce qu'il me fallait pour pouvoir accomplir ce pourquoi je suis sorti cette nuit.

Mon estomac crie famine, mon corps entier tremble d'excitation. Lorsque je caresse sa cuisse de mes dents, mon corps entier frissonne. Sans plus attendre – comme si j'en étais capable rendu à ce stade –, j'enfonce ma dentition dans sa chair. Le sang se met à couler alors que la peau n'est plus là où elle devrait être. Elle est dans ma bouche. Je m'étouffe presque avec cette bouchée, que j'ai prise un peu trop grosse. Je me reprends avec une plus petite croquée, tout aussi délicieuse et juteuse. Tout ce sang rend l'ensemble beaucoup plus harmonieux, moins caoutchouteux et moins sec. Je goûte au mollet, et je dois avouer que je suis légèrement déçu. Ce n'est que du muscle. Il n'y a pas de gras, pas de chair et beaucoup moins de sang, elle a les mollets trop musclés et pas assez gros. Je retourne donc à la cuisse, où je me régalais. Le feu dans mon estomac s'apaise, mais je ne m'arrête pas. C'est sans doute de la gourmandise, mais tant pis. Cette prostituée est étonnement délicieuse, je ne m'attendais pas à un goût aussi sucré de la part d'une femme qui traîne dans un milieu aussi sale et illégal. La dernière prostituée que j'ai mangée était amer, j'en ai eu mal au cœur pendant trois jours. Mais elle...

Je remonte sa camisole afin de voir son ventre, mais je vois bien qu'il est trop mince pour moi. J'ai peur de planter mes dents dans son foie ou quelque chose comme ça tellement il y a l'air d'avoir peu d'espace entre sa peau et ses organes. Je mets de côté mon goût pour l'exploration et termine ce que j'ai commencé. Je dévore ses cuisses comme si c'était du poulet, et je me régale. Je ne pense à rien d'autre qu'à l'effet que produit sa chair sur ma langue. Sa peau colle parfois à mon palet, mais je m'en fiche. C'est si bon.

Lorsqu'il ne reste plus rien sur ses cuisses, qu'il n'y a plus le moindre bout de peau sur ses os, je m'arrête. Le ventre plein, je peux rentrer chez moi avec l'esprit tranquille. Je suis repu, je le serai pendant quelques jours. Rendu là, tout sera à recommencer. 

Mille et une vies. [Imagines]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant