« Clary, je t'avais dit d'appeler ma mère par son prénom pour pas l'offenser!
-Tu te rends compte à quel point c'que tu dis est ridicule, Louis? Tu me reproches d'être polie!
- Elle s'est sentie hyper vieille toute la soirée!
- Oh mon dieu, soupira Clary. »
Les mains crispées sur le volant, je tentais de garder les yeux fixés sur la route. Les bras croisés sur sa poitrine, ma petite-amie faisait de son mieux pour éviter mes yeux. Elle soupira de nouveau afin d'exprimer son exaspération devant la situation.
« Je t'avais pourtant clairement fait comprendre qu'il ne faut jamais dire Madame Tomlinson!, insista-t-il.
- J'étais stressée et ça m'a échappé, c'est pas la mer à boire!
- Si ça l'est!
- Louis, putain!
- Quoi moi?
- Je t'avais dit que j'étais pas prête pour rencontrer tes parents, c'est toi qui as insisté en disant que ça allait bien se passer!
- Parce que je croyais que ça se passerait bien! »
J'ai donné un coup sur le volant, énervé. Je voulais que mes parents voient Clary, je voulais qu'ils l'apprécient. Je voulais qu'ils voient à quel point elle est merveilleuse, charmante et attachante. Je voulais qu'ils l'aiment aussi. Mais...
« Maintenant, ma mère va croire que t'es une snob.
- Parce que j'ai fait preuve de politesse en la vouvoyant? C'est complètement con!, s'exclama-t-elle.
- C'est peut-être con, mais ça reste ça. Putain, j'voulais que ma famille t'aime moi!
- Louis, calme-toi.
- Je suis très calme! »
Mais mes jointures contractées semblaient dire le contraire. Mon corps crispé semblait prétendre que je mentais. Mes muscles tendus semblaient insinuer que je ne disais pas la vérité. J'admets que je n'avais rien de calme - et « rien »est ici un euphémisme de taille. Je criais sur ma petite-amie pour avoir été polie. Ridicule, pas vrai? Sur le coup, je pensais seulement à l'opinion que ma famille allait avoir sur elle. Sur le coup, je ne l'ai pas écoutée. J'agissais de manière stupide, mais je ne m'en suis pas rendu compte. J'ai continué à agir comme un con. Je suis resté enfermé dans ma colère, je suis resté énervé.
Pour l'une des rares fois à Londres, il neigeait. Évidemment, il fallait que ce soit cette journée-là... Il neigeait même beaucoup. Le vent soufflait, réduisant la visibilité de la route qui était déjà mauvaise. Sans réaliser, mon pied a appuyé davantage sur la pédale d'accélération, motivé par ma colère injuste.
La neige, le vent, la chaussée glissante et mouillée, l'auto que j'ai fait accélérer... Tout ça n'est qu'un beau mélange qui a contribué à ce qui est arrivé.
« Louis, tu devrais ralentir.
-...
-Louis, tu devrais penser à freiner un peu.
-...
-Louis, ça commence à devenir dangereux, a-t-elle dit, et sa voix se faisait toujours un peu plus aigüe à chaque fois. Des températures hivernales comme ça, c'est ce qui cause les accidents.
-T'en fais pas, je gère. »
Ou du moins je le croyais. Je croyais aussi que la courbe était moins prononcée, mais... mais elle se trouvait à l'être à l'extrême. J'allais vite, et la route n'était qu'un mélange de glace, de neige et de névasse (sloche) par endroits. Qui plus est, je n'étais pas habitué à ça, pas comme Clarissa. J'ai tenté de freiner, ce qui n'a rien donné. Les pneus d'hiver que nous avons en Angleterre ne font pas le poids face à des températures comme ça.
J'ai tenté de redresser la voiture qui déviait rapidement vers le champ, sans succès. Je ne pouvais rien faire pour nous éviter le garde-fou, et nous l'avons donc percuté. Tout est devenu noir, mais j'ai cru m'entendre crier : « Clary! » avant de perdre conscience et de sombrer dans l'obscurité.
*
« Allez petit, n'abandonne pas!, cria une voix avant que je ne ressente un courant électrique me passer à travers les membres. »
J'ai entendu une machine se mettre à biper ainsi que plusieurs cris de personnes soulagées. Je me sentais bizarre. J'avais l'impression d'être un étranger dans mon propre corps. Je ne me souvenais plus de ce que j'avais fait lors de cette journée, aucun souvenir de rien. Lorsque j'ouvris les yeux, la lumière me brûla les yeux. Je ne voyais que des murs blancs, des appareils bruyants et des gens en uniformes. Tout m'indiquait que je me trouvais dans un hôpital, mais rien ne m'expliquait pourquoi. Clary saurait probablement...
Et c'est en pensant à elle que tout m'est revenu. Le dîner chez mes parents, la dispute dans l'auto, le virage... Et l'accident. Le moment où la voiture a fracassé le garde-fou. La glissière de sécurité a transpercé une partie de la portière du côté passager où Clary était assise. Je me suis relevé avant d'être stoppé par une infirmière.
« Vous devez rester allongé, vous avez besoin de repos, m'a-t-elle dit avec douceur.
- Où est Clary? Comment va-t-elle, est-ce qu'elle va bien? Je veux la voir, où est-ce que...
- Votre petite-amie est..., commença-t-elle avec hésitation.
- Non, c'est impossible, je... Je veux la voir.
- Mais monsieur, elle est...
-Je veux la voir!, insistais-je en haussant la voix. »
Elle a jeté un coup d'œil à une autre infirmière qui a hoché la tête. En soupirant, elle s'est dirigée vers une table de réanimation, celle qui se trouvait à ma droite. Elle m'a jeté un regard interrogatif avant de soulever le drap blanc. Je me suis penché pour mieux regarder, et je l'ai vue. Elle était étendue là, sans vie. Le bas de son corps était... Je n'arrive même pas à trouver les mots pour vous le décrire.
« Clary, non..., murmurais-je en essayant de m'extirper du lit. »
J'étais faible, trop pour que mes jambes me soutiennent. Je me suis agrippé au rebord de son lit de métal avant de me fracasser le crâne sur le sol. J'ai entendu les médecins retenir leur souffle, craignant que je me chope une commotion cérébrale. Je me suis relevé à la hauteur du corps sans vie de ma petite-amie.
« J'suis désolé, bébé, chuchotais-je en caressant ses cheveux, les larmes coulant sur mes joues. J'suis désolé de pas t'avoir écouté... »
VOUS LISEZ
Mille et une vies. [Imagines]
Fiksi RemajaReccueil de plusieurs segments de vies de différents personnages dans des situations particulières. Parfois tristes, parfois romantiques, parfois violentes, ces histoires sauront peut-être vous émouvoir. Elles peuvent vous faire rire, elles peuvent...