Pompière, policière, ambulancière, ce sont tous des métiers dangereux et risqués. Tout le monde le sait. Ceci dit, ce ne sont pas les seuls. Être intervenante dans un centre de détention, que ce soit pour les mineurs ou les majeurs, c'est tout aussi héroïque. Moi, je ne suis pas une superhéroïne, ni une pompière, ni une policière et encore moins une infirmière auxiliaire. Moi, je ne suis qu'Aria, une femme de ménage qui bosse dans un asile, le SunnysideHospital. L'ironie est que, malgré l'apparence pittoresque du bâtiment, qui a presque l'air d'un charmant manoir, le soleil ne brille pas là-bas. C'est l'enfer.
Je travaille de soir, lorsque les visites autorisées sont terminées et que le personnel a été réduit. En clair, je fais le ménage quand il n'y a presque plus un chat pour salir ce que je nettoie. Des détenus, du personnel soignant, quelques gardiens et moi. Pas plus que ça. Il n'y a que les fous, enfermés, qui sont nombreux ici. Une cinquantaine de prisonniers gardés par 3 policiers, pouvant être soignés par 5 infirmières, et il y a moi qui ne les vois pas – et je préfère ça ainsi. Belle moyenne tout de même. Ce n'est pas bien grave, il n'y a jamais de problème, jamais rien qui se passe.
Février, la période des catastrophes en Nouvelle-Zélande. Beaucoup de vent, d'orages et même d'ouragans qui éclatent, un peu comme ce soir. C'est une puissante cascade interminable qui coule des nuages noirs. Le vent souffle et se fait entendre bruyamment entre les murs de béton de Sunnyside, résonnant et tremblant contre les parois, mêlé aux bruits de tonnerres. En sifflotant calmement, je déambule dans le couloir vide de l'aile ouest avec mon balai, aile déserte qui, allez savoir comment, trouve toujours le moyen d'être salie. La poussière qui s'accumule sur les murs froids et sur le plancher taché de sang depuis des années, les bruits qui résonnent, tout contribue à ajouter à l'atmosphère sinistre déjà présente dans l'asile. Les lumières grésillent, mais j'essaie de ne pas y porter attention.
« Comment ça se fait qu'il y ait toujours pleins de saletés ici hein?, que je grogne tout bas. »
Soudainement, les lumières ne se contentent plus de grésiller, elles s'éteignent. Complètement. Je me retrouve dans le noir total. J'ai peur. J'angoisse. Un asile, ce n'est pas l'endroit le plus rassurant, alors là... L'espace de quelques secondes, l'obscurité m'entoure, jusqu'à ce que le générateur reparte et, du même coup, en rallume quelques-unes. Je me remets à mieux respirer. Sur mon walkie-talkie, la voix de Boden, le chef de nuit, se fait entendre.
« Aria, rentre immédiatement au sanctuaire, qu'il ordonne d'une voix autoritaire.
– Négatif, je suis pas dans l'aile est.
– Ramène tes fesses, Aria, j'rigole pas. C'est dangereux ici, les pannes électriques.
– Relaxe, Wallace, j'suis pu dans le noir. T'as quand même pas peur du noir, n'est-ce pas? Si c'est le cas, est-ce que tu te mets à crier quand tu te vois dans le miroir?
– Aria, c'est pas drôle, bien que cette blague était marrante. Le système électrique fait défaut. Tout le système... rentres te réfugier... danger...
– Quoi? Ça coupe, Wallace, je t'entends pas.
–... portes... cellules...
– Hein?
– Cours... »
Mon cerveau associe les bribes de phrases, les mots entendus ici et là, et comprend que quelque chose ne va pas. Les cellules, seraient-elles ouvertes? Leurs portes seraient-elles déverrouillées? C'est impossible, tout est bien protégé, sécurisé, programmé et organisé... Dans l'ordinateur central... qui fonctionne à l'électricité. Sans doute y a-t-il eu un court-circuit provoqué par la panne de courant et que donc... Donc on s'en fiche, non? Ce n'est pas le bon moment pour s'interroger sur le comment du pourquoi de cette situation. Là, je dois trouver une façon pour réussir à m'abriter sans avoir à traverser le bâtiment au complet pour rentrer au QG. C'est donc plantée au beau milieu du couloir que je me mets à réfléchir à une stratégie – je suis invisible, OK? Invisible...
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Mille et une vies. [Imagines]
Novela JuvenilReccueil de plusieurs segments de vies de différents personnages dans des situations particulières. Parfois tristes, parfois romantiques, parfois violentes, ces histoires sauront peut-être vous émouvoir. Elles peuvent vous faire rire, elles peuvent...