Mille et une vies. [Imagines]

Don't Let Them Know.

Allongés l’un contre l’autre dans cette chambre d’hôtel miteuse, les deux jeunes hommes pouvaient enfin être ensemble. À l’abri des regards, à l’abri des médias et à l’abri du management, ils n’avaient plus besoin de se cacher. Isolés du monde extérieur, ils pouvaient enfin être eux-mêmes. Ils n’avaient plus à prétendre de mensonges, ils n’avaient plus à faire semblant d’aimer qui que ce soit uniquement dans le but de plaire. 

« Je voudrais rester ici toute ma vie, murmura le bouclé, son menton posé sur la tête de l’aîné. 
— Dans cet hôtel merdique au milieu de nulle part? 
— Dans cette chambre où je peux enfin être avec toi. »

Et, triste réalité, Harry avait raison. Il n’y avait que dans un petit hôtel pourri et égaré qu’enfin ils avaient le droit de s’aimer. Il n’y avait que là où ils avaient le droit de se laisser aller à leurs sentiments. Partout, constamment entourés, ils avaient l’ordre de se cacher. Dans leur métier, avec le label pour lequel ils ont signé, être homosexuel était… Disons que c’était préférable de tout nier. Ont-ils quelque chose contre les homosexuels? Pas du tout, non! Ça n’a rien d’homophobe, au contraire! C’est seulement et simplement une question d’argent.

« Tout un tas de jeunes adolescentes pré pubères vous vénèrent, les mecs!, leur avait expliqué le patron de Modest!.Elles s’imaginent pouvoir vous marier un jour et, en attendant, elles achètent vos albums, vos tee-shirts, vos bottes… elles achètent n’importe quoi sur lequel vous êtes! Sans oublier qu’elles se ruinent pour des billets de concerts, ajouta-t-il après quelques secondes de silence.
— Et alors? Elles nous aiment pour nous, alors qu’on soit homosexuels ou pas…, avait tenté d’argumenter Harry.
— Si vous êtes gays…
— On l’est, coupa Louis. Ensemble.
— Oui, sauf qu’elles l’ignorent. En l’ignorant, elles pensent avoir des chances, mais si elles l’apprennent… Ne brisez pas leurs rêves, compris? Ne brisez pas leurs espoirs débiles et éphémères.
— Ne nous faites pas perdre d’argent surtout, marmonna Louis.
— Ne dîtes rien, c’est compris? Cachez-vous et n’en parlez pas surtout. »

Il y a maintenant plus de 4 ans qu’ils se cachent. Depuis plus de 4 ans, Louis prétend aimer Eleanor, sa jolie petite brunette avec qui il a reçu l’ordre de se promener pour donner l’impression qu’ils sont amoureux et heureux.Depuis plus de 4 ans, Harry prétend être un éternel célibataire qui se case uniquement durant les Fêtes. Depuis plus de 4 ans, ils ne peuvent plus se toucher, ni même se coller et encore moins être à proximité en public. Depuis plus de 4 ans, ils mentent à celles qui les ont toujours soutenus et qui les ont aidés à tout surmonter. Bien que le management pense le contraire, Harry est convaincu qu’elles pourraient surmonter leur homosexualité.

« On va devoir y aller bientôt, soupira Louis.
— Non, on reste, supplia Harry, refermant son étreinte autour de lui.
— On a pas le choix, Hazz…
— Ça semble pas te déranger tant que ça, toi, marmonna le jeune homme aux yeux vert émeraude.
— Qu’est-ce que tu veux dire?
— Toi, t’as Eleasud pour passer le temps et pour t’amuser, non?
— Harry, comment peux-tu dire que…
— Et toi, comment peux-tu penser à partir aussi vite? T’as envie d’aller la retrouver, c’est ça? Ta fausse petite-amie te manque maintenant?
— Le prend pas comme ça, murmura Louis. »

Mais Harry, ayant choisi de le prendre ainsi, desserra l’étreinte qu’il avait autour de Louis et lui tourna le dos, vexé, mais surtout blessé. Louis soupira, réalisant que, cette fois, son petit-ami n’allait pas. Il avait cru que ce n’était que de la jalousie, mais il prenait maintenant conscience que c’était beaucoup plus que ça. Bien sûr, Harry en veut probablement à Eleanor de passer autant de temps avec lui et l’envie sûrement également. Oui, mais encore…

« Tu sais que je t’aime, Harry, pas vrai? Tu sais que tu es le seul qui compte pour moi, n’est-ce pas? 
— …
— Tu sais que t’as pas à avoir peur, hein Harry? »

Mais Harry ne répondit pas. Harry ne voulait pas répondre, craignant d’éclater en sanglot après avoir dit ne serait-ce qu’un seul mot.Évidemment qu’il le savait! Mais est-ce qu’il y croyait? 

« Harry, arrête de m’ignorer comme ça, supplia le jeune brunet. Regarde-moi. 
— …
— Harold, insista Louis, grimpant sur le jeune homme afin d’éviter d’être de nouveau ignoré. 
— Quoi?
— Je t’aime.
— Je sais.
— Est-ce que tu m’aimes aussi?
— Est-ce que j’ai le choix?
— Harry, marmonna Louis. 
— Je t’aime aussi.
— Mais…?
— Mais j’trouve ça lourd.
— De?
— Notre relation qui doit demeurer cachée. Si tu savais à quel point te voir avec elle me fait mal…, murmura le bouclé aux yeux verts.
— Être avec elle me fait tout aussi mal, Hazz. À chaque fois que je dois prendre sa main, je pense à toi et je me dis que c’est la tienne que je devrais tenir entre mes doigts. À chaque fois que je dois l’embrasser, je me dis que ma bouche ne devrait avoir à toucher que la tienne. À chaque fois qu’elle me regarde, je me dis que jamais elle me regardera comme tu le fais toi. Oui, j’dois être avec elle, mais j’préférerais cent fois mieux être avec toi. 
— Pourquoi on se laisse faire comme ça?
— Parce que c’est ce que le management veut. 
— Mais est-ce que c’est ce qu’on veut nous? »

À ce moment, Louis réalisa à quel point cette situation était contrôlée. À cet instant, il réalisa à quel point ILS étaient contrôlés. C’est dans cette chambre d’hôtel que Louis prit la décision de ne plus se laisser dominer. C’est dans cette chambre pourrie qu’il fit le choix de sortir du placard. Parce que Louis a choisi…

« Tout ça va changer, Harry. 
— Qu’est-ce que tu…
— On va leur dire. On va le dire à tout le monde. »

… de vivre son amour au grand jour.