•Azylis• (Chapitre 93)

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Je suis debout dans ma chambre, actuellement occupée à boucler ma ceinture verte.

J'ai choisis une robe cintrée, vert pâle, et je porte un liguins et des bottes blanches assorties. Je rassemble mes cheveux légèrement bouclés en une demi queue de cheval et me laisse ensuite retomber sur le lit d'un geste impatient.

J'attends la reine... Car de mon côté, je suis vraiment fin prête.

Elle surgit tout à coup en poussant d'un geste sûr la porte de ma chambre sans prendre la peine de toquer.

De toute façon, c'est vraiment actuellement le cadet de mes soucis. Mais je fronce les sourcils. Elle est suivie d'un homme de quarante ans aux cheveux légèrement grisonnants. A sa blouse blanche, je jurerai qu'il s'agit d'un médecin.

Je me relève précipitamment, légèrement inquiète malgré moi.

-Pourquoi un médecin ?

La reine fait un geste pour me calmer tandis que l'homme referme la porte avant de s'assoir tranquillement sur la première chaise venue. C'est lui qui prend la parole pour me répondre.

-Bonjour mademoiselle. Je suis le docteur Devin, vous avez donc vu assez juste. Mais je pense qu'une fois que la reine vous aura expliqué la raison de ma présence, vous comprendrez tout à fait.

Je n'ai pas envie de perdre mon temps ici mais après tout ce que la reine a fait pour moi, le minimum est quand même de l'écouter quand elle réclame mon attention.

-Allez-y alors, je vous écoute.

Elle est aussi pressée que moi et décide d'aller immédiatement droit aux faits.

-Tu te rappelles comment on a retrouvé Gabriel ?

Je fronce les sourcils, ne comprenant pas bien où elle veut en venir.

-Oui, grâce aux robots traceurs mais je ne...

Je palis tout à coup. Ces robots disséminés partout qui enregistrent en temps réel tous les déplacements de la population... Je demande tout à coup d'une voix franchement mal assurée :

-Vous voulez dire qu'ils peuvent me retrouver de la même façon ?

Cette simple idée me révolte et me fait plus peur que ce que je voudrais bien avouer. La reine hoche la tête avant de reprendre rapidement.

-Effectivement, c'est là où je voulais en venir. Mais il existe une façon de dérouter les robots traceurs.

Je sens mon cœur se mettre à battre follement dans ma poitrine.

-Quelle solution ?

Le médecin sourit et c'est lui qui prend la parole.

-Vous fabriquer une fausse identité.

Je fronce les sourcils une nouvelle fois. Je ne comprends pas vraiment.

-Mais il ne s'agit pas de papiers à présenter ici... Ces robots, comment fonctionnent-ils ?

La reine me répond aussitôt.

-C'est justement là où nous voulons en venir. Pour que l'on ne te retrouve pas, il suffit que pour les robots tu deviennes quelqu'un d'autre. Tant que ta nouvelle identité reste secrète, il n'y a aucun risque qu'on te retrouve grâce à ça.

-Mais comment dérouter les robots ?

Cette fois-ci, la reine prend un ton nettement plus grave.

-La seule solution consiste à t'injecter une puce électronique qui enverra un signal aux robots et qui transformera ainsi ton identité.

Je palis. Je n'ai aucune envie d'avoir dans mon corps un élément étranger, qui plus est, quelque chose qui m'oblige à faire entièrement confiance à la reine ou à n'importe qui d'autre.

-Il y a forcément une autre solution et...

La voix du médecin résonne dans la pièce. Elle est presque sévère.

-Il n'y a pas d'autres solutions. Mais si vous ne voulez pas, libre à vous, mais vous ne resterez pas une semaine de plus en liberté ici. De plus, je ne sais pas si c'est important pour vous mais vous mettez tous ceux qui vous aident en danger.

L'argument porte et je tressaille. Je sens bien que je vais devoir accepter mais leur idée ne me plait vraiment pas.

-Et vous faites comment pour m'implanter ce fichu truc électronique ?

Le médecin sourit aimablement.

-Une simple piqure avec une seringue et...

Devant ma mine dégoûtée, il arrête son discours.

-Ça pose un problème ?

Je déglutis devant la question directe de la reine. Bien sûr que non ça ne devrait pas poser de problèmes... Mais je garde un souvenir absolument affreux de ma dernière piqûre.

Je retiens un mouvement instinctif de ma main pour tâter ma cicatrice à l'épaule. Je déteste l'idée d'être passée si près d'oublier la totalité de mes souvenirs. Je réponds pourtant d'une voix calme.

-Non, c'est bon, allez-y, préparez votre matériel de torture...

Le médecin ne relève pas ma pitoyable plaisanterie et je me tourne vers la reine pendant qu'il sort de sa sacoche une seringue similaire à celle qui m'a piquée il y a seulement quelques jours.

-Majesté, j'ai plusieurs questions à vous poser... Comment ces fleurs sont-elles arrivées ici déjà ?

Je désigne à la reine le bouquet qui continue de faire battre mon cœur chaque fois que je le vois. J'ai l'impression que ce sont nos derniers moment de tranquillité ou je peux vraiment lui poser mes questions.

Elle esquisse un sourire gêné et pique un léger fard. Elle rougit ! L'idée m'amuse. Elle répond après un petit silence.

-Lorsque nous t'avons récupérée, tu étais par terre, immobile. L'un des gardes que nous tenions en joue pour qu'il ne donne pas l'alerte tenait dans ses mains ce bouquet et la carte. Il m'a dit qu'il avait juré de te les donner.

Elle fait une légère pause avant de reprendre.

-Je...enfin... J'étais curieuse et j'ai lu ce qui était écrit. Ça m'a profondément émue... J'ai pris sur moi d'emporter avec nous le bouquet et la carte. Je suis vraiment désolée d'avoir été aussi indiscrète et je...

Je la coupe rapidement.

-Ce n'est pas grave, j'ai vraiment été heureuse de les trouver à mon réveil...

C'est drôle mais je ne lui en veut pas. Sa gêne montre bien que ce n'est pas dans ses habitudes de surprendre les secrets des autres.

Je souris pour moi-même. La reine a de toute évidence l'espoir secret que je lui en dise un peu plus. Mais moi, je sais que je n'ajouterai rien. C'est trop précieux pour partager, l'amour.

Le docteur s'avance alors vers moi et me fait signe de m'assoir sur le lit. Je m'exécute.

En quelques minutes, je sens l'aiguille s'enfoncer dans ma peau. Je me tourne vers la reine pour lui poser la seconde question qui m'inquiète depuis quelques temps :

-Où sont Mahaut et mon dragon, Dynamite ?

Je vois une ombre passer sur son visage. Le médecin retire la seringue. Ces fichus robots traceurs ne pourront plus jamais dire ou je suis.

Je ne m'y attendais pas mais c'est en fait un véritable soulagement.

La seule ombre au tableau est celle-ci : la reine ne m'a pas encore répondu.

C'est donc une mauvaise nouvelle qui m'attend...

Intemporel T1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant