•Edilyn• (Chapitre 112)

875 162 45
                                    

J'ouvre d'une main ferme la porte-fenêtre pour laisser entrer un peu d'air dans mon appartement et aérer.

Je constate au passage que le temps s'annonce beau et agréablement chaud et repense aux événements des derniers jours, ce que j'avais évité de faire ces derniers temps.

C'est le moment de faire un bilan. Je m'assieds à mon bureau et prend un stylo que je garde entre mes doigts pour m'occuper.

J'ai gracié Marguerite et Gabriel... Bien. Je souris alors pour moi-même. Il me reste un moyen de taille de pression sur mon cher grand frère. Azylis est toujours recherchée, elle.

Je repense à l'homme que j'ai volontairement envoyé à ses trousses. Un tueur. Je me demande tout à coup ce que Gabriel ferait si je faisais du mal à Azylis. Se vengerait-il ? Perspective qui mérite d'être étudiée...

Je suis en revanche enchantée d'avoir délivré Marguerite. Quelque chose en elle me la rendait sympathique et parvenait à m'émouvoir. Je crois que bien malgré moi, je m'en serais affreusement voulu s'il lui était arrivé quelque chose.

Je ferme les yeux en pensant à Eric. Il ne m'a pas vraiment simplifié les choses celui-là...

A mon retour, j'ai rapidement découvert qui l'avait mis au courant de la situation. Quelle bêtise de ma part aussi de laisser le robot dans mon appartement...

En tout cas, Eric m'a demandé en plus la libération de Mahaut/Lydie. J'ai accepté.

C'est incroyable le pouvoir que peut avoir sur moi ce petit enfant. Il a réussit à me faire aimer d'une foule qui me détestait encore quelques minutes auparavant.

Sur le moment, j'ai sentis une joie et une gratitude si étranges m'envahir le cœur que je ne savais vraiment plus où j'en étais.

Maintenant encore, les doutes continuent de m'assaillir. Ce sont mes parents qui m'ont indirectement rendu mes certitudes. Ils n'ont pas la moindre envie de changer d'idée...

Je me retourne en entendant le "toc, toc" discret à ma porte.

-Oui, entrez !

La porte s'ouvre est l'un des multiples robots du palais entre. Celui-ci ressemble à un enfant de huit ans, malgré son air sérieux affiché au visage, aux cheveux blonds et au teint bleu.

Je me méfie maintenant de toute cette mécanique depuis que Mahaut a réussi à me rouler... Néanmoins, comme ils font tout dans ce fichu palais, c'est plutôt difficile de les éviter.

Le robot s'incline impeccablement avant de s'approcher et de prendre la parole.

-Le roi et la reine m'ont demandé de vous apporter ces documents. Ils comptent les publier dans la soirée, ou en tout cas en parler au public sans encore montrer les plans.

Je hoche la tête assez sèchement en guise de réponse et tend la main pour récupérer les papiers qu'il me tend.

Il claque des talons, salue, et fait tranquillement demi-tour avant de sortir de mon appartement. Un petit courant d'air fait valser les papiers que je viens de poser sur mon bureau et je me lève avec un soupir pour fermer la baie vitrée.

Une fois ceci fait, je reviens à ma table de bureau et ramasse les documents pour commencer à jeter un coup d'œil.

Dès le début de ma lecture, une grimace de colère m'échappe. Ce n'est ni plus ni moins que l'annonce solennelle de faire de ce royaume une république...

Je remarque alors une clause ajoutée au crayon au schéma initial. Je reconnais là parfaitement l'écriture de mon père.

Aucun membre de la famille royale n'aura le droit de se présenter aux élections avant cinq décennies.

Un sourire m'échappe. Il est prudent... Mais de toute façon, je ne compte pas me présenter. Car il n'y aura jamais de république.

J'écarte d'un geste franchement agacé les papiers et me tourne vers la glace murale.

Je souris avec amusement à mon reflet et rajuste d'un geste mécanique l'un des cercles d'or qui enserrent mes bras. J'aime beaucoup cette mode qui se veut "antique".

Mais mis à part quelques détails pratiques, j'avoue que j'ai actuellement autre chose à faire que de penser à ma garde-robe.

Je me lève de mon siège et me dirige d'un pas rapide vers la porte de mon appartement. Je sors et traverse d'un pas décidé une multitude de couloir.

Je monte les escaliers jusqu'a arriver à l'étage suivant et marche sans vraiment regarder devant moi. Je remarque alors que je suis arrivée à un couloir désert.

Mes yeux se posent sur la porte face à moi et je grimace. Qu'est ce qui me pousse alors à tourner le bouton de la porte ? Probablement tout et rien...

J'entre dans la pièce et referme silencieusement la porte derrière moi. Nous ne venons jamais ici mais la pièce est d'une propreté absolument impeccable. Les robots ménagers font leur travail à l'excellence.

Je m'assois sur le bord du lit et contemple les motifs des murs. J'ai toujours aimé cette pièce, notamment justement parce qu'elle dégageait une atmosphère un peu plus intime que le reste du palais.

Gabriel n'a jamais voulu avoir de suite, contrairement à tous les habitants du château. Il s'est toujours contenté de cette pièce pas si grande, avec une unique fenêtre.

Qu'est ce qui m'envahit en regardant les photos agrafées au mur ?

La nostalgie ? Le sentiment que je peux peut être encore tout changer ? Sur la table de nuit, à la place même ou mon frère l'avait laissé pour la dernière fois, brille son petit écran qui renvoie la lumière du soleil.

Je m'approche de la fenêtre et ferme les rideaux. Je me souviens avoir entendu dire que le soleil abîme les tissus. Je n'ai pas envie que quoi que ce soit de cette chambre soit à remplacer.

Sans même m'en rendre compte, je suis en train de tout observer pour pouvoir sourire en observant les témoins d'une époque qui me semble si lointaine.

Au plafond sont accrochés de petits avions, pour la plupart de vieux modèles plus du tout d'actualité aujourd'hui. Je me rappelle du plaisir que mon frère prenait à faire et à peindre ces maquettes...

Mon père l'aidait parfois et j'observais de loin, dubitative je l'avoue.

Je souris dans la pénombre avant de brusquement me rembrunir. Qu'est ce que je fais ici ? Pourquoi tous ces doutes trop soudain ?

Je me lève d'un geste brusque et me dirige rapidement vers la porte. Je sors dans le couloir et marche si vite que j'ai presque l'impression de fuir.

Mais je crois que ce n'est pas qu'une impression.

Intemporel T1 & 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant