Intemporel T1 & 2

Gabriel (Chapitre 177)

Mon bras devient rapidement bleu comme toutes les fois ou j'active les puces électroniques.

Ouvrir cette porte... Cela ne devrait normalement pas être possible. J'entends alors une explosion derrière nous et Thaïs me rejoint avec Maly en hurlant :

-Dépêche-toi, la plateforme est en train de sauter ! On nous canarde !

-Ne t'inquiète pas on va... On y arrive !

Lorsque mon bras passe devant les détecteurs, les portes s'ouvrent comme par magie. Ou plutôt, technologie. Mais je me méfie atrocement. Est-ce un impardonnable oubli ou un nouveau piège d'Edilyn ?

De toute façon, nous n'avons pas trop le choix et je me met à courir derrière Thaïs et Maly qui viennent de s'engouffrer dans l'ouverture et d'entrer à l'intérieur de la tour.

Une fois que je les ai rejoint et que les portes se referment derrière nous, je reste un instant saisi de surprise devant le calme du lieu.

Le dépôt d'armes est à feu et à sang à sa base... Mais ici, au deux centième étage, seul le silence règne. Un étrange silence. Nous sommes dans une petite salle ronde d'où partent deux couloirs aussi impeccables que déserts. Je me tourne vers Maly et Thaïs pour soudain découvrir que nous avons toujours avec nous la panthère. Elle me toise d'un regard méfiant qui me laisse moi aussi plutôt sur le qui-vive. Enfin, il va bien falloir que je m'habitue à sa présence...!

-C'est quoi la suite du plan ?

La panthère pousse un léger grondement et je lutte contre moi-même pour garder un visage parfaitement stoïque. Je déteste les animaux en tous genres... Enfin, Dynamite vient de me sauver la vie alors je ferais bien de réviser au moins mon jugement sur la partie concernant les dragons... Je laisse échapper un faible soupire et Thaïs me répond rapidement.

-On a pas trop le choix... Il faut qu'on trouve l'endroit où sont conservées les armes...

-L'armurerie quoi... J'y suis déjà venu étant enfant, ça me revient maintenant.

-Tu pourrais la retrouver ? Et vite ?

-Non, mes souvenirs ne sont pas assez précis. Mais de toute manière, je pense que ça va aller plutôt vite. Il y a deux couloirs, on a qu'à les emprunter l'un après l'autre et on trouvera forcément ce qu'on cherche...

Maly intervient tout à coup en levant les yeux vers nous.

-D'accord, mais ce ne serait pas plus rapide si on se séparait ?

Thaïs répond rapidement, les mâchoires crispées dans une grimace anxieuse. Sa main frotte mécaniquement l'endroit où se trouvait précédemment son bracelet.

-Non, sinon nous ne serons pas de taille à en imposer à qui que ce soit...

Elle me jette un léger regard et je devine ses pensées. Le fait que je sois le prince pourrait bien jouer en notre faveur... Les hommes hésiteront à tirer. Enfin, sauf si Edilyn m'a tendu un piège bien sûr. Pourtant, l'étage semble toujours plutôt désert. Étonnement désert...

-Prenons le couloir de gauche alors...

Maly esquisse un sourire.

-Pourquoi le gauche ?

Je lève les yeux au ciel en guise de réponse et me met en marche, bientôt suivi de Maly et de Thaïs. Nous n'avons aucun plan, mais j'aimerai beaucoup réussir à mettre en œuvre l'idée de Thaïs : faire sauter le dépôt d'armes. Le seul problème dans tout ça, c'est que je ne vois pas trop comment nous pourrions juste espérer rester en vie...

Le couloir tourne lentement en arc de cercle et nous nous retrouvons bientôt au centre devant une lourde porte métallique. Je m'immobilise aussitôt.

Thaïs ne peut s'empêcher de jeter un regard derrière et devant nous. Elle prend rapidement la parole.

-Il y a quelque chose qui ne va pas là... Comment ça se fait qu'il n'y est personne ? Je veux bien croire que...

Elle s'arrête et je ne trouve rien à répondre. La lourde porte de l'armurerie est en train de lentement coulisser sur le côté pour nous laisser entrer. Maly hausse les épaules avec un sourire.

-Je crois qu'on aura même pas besoin de ton bras cette fois-ci Gabriel... Ou je me trompe ou on cherche depuis le début à nous attirer ici. Le piège est plutôt astucieux.

Je sens une sueur froide me couler dans le dos devant cette porte qui s'ouvre inexplicablement. Je n'ai jamais été un héros. Si j'ai un honneur, je cherche avant tout a être utile à quelqu'un. Et pas à mourir pour ma sœur.

J'empoigne fermement Thaïs par le bras et hurle :

-Demi-tour, dépêche toi !

-Où veux tu qu'on aille ?

-Je ne sais pas, mais n'importe où sera mieux qu'ici !

Dès le début de la conversation, je me suis mis à courir et Thaïs m'a suivie. Je me retourne et jette un coup d'œil derrière moi. Maly court au même niveau que la panthère...

Mais au bref cri de colère mêlée de surprise que pousse Thaïs, je stoppe net ma course et regarde devant moi. Visiblement, le couloir n'est plus aussi désert qu'au début. Une colonne de garde nous barre la route. Fusils pointés contre nous.

-Halte ! Nous avons l'ordre de tirer si vous n'obéissez pas... Mains en l'air !

Nous levons lentement les mains au dessus de notre tête. Je comprends tout à coup l'étrange sensation que me donnait le bâtiment. Trop impeccable, trop désert... Tout cela était depuis le début un superbe coup monté. Mais pourquoi se donner autant de mal ? La réponse me vient immédiatement à l'esprit : ce serait si facile que tout dégénère tout à coup et que nous soyons tous liquidés... A moins que je ne me trompe ? Qu'Edilyn ait bien d'autres idées ?

Je dévisage alors le garde qui vient de parler. Il a environ quarante ans et son regard est plus focalisé sur la panthère de Thaïs. Ses cheveux grisonnants, sa tenue impeccable, son air d'autorité me frappent. Je suis à peu prêt certain qu'il était déjà au palais lorsque j'y étais encore.

Je m'approche d'un pas. Tous les fusils se lèvent et je sens les doigts se rapprocher des gâchettes. C'est ma dernière carte... Et je n'aurai pas d'autre chance.

-Nous sommes sans armes ! Allez-vous tirer sur votre prince ?...