Ysa (Chapitre 9)

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Changement du prénom de Harry en Esteban. (Une idée d' ewilan53  :p)

J'écarte violemment un homme de mon passage et me remets à courir. Allons bon, où est-elle passée ? Essoufflée, le cœur au bord des lèvres, je pousse un juron qui fait se retourner quelques passants. Je commence à sentir la panique me gagner.

Qu'est-ce-qui me prend de tout à coup me préoccuper d'une gamine ? Et en plus une princesse ! Mais je ne supporte pas malgré moi l'idée de la laisser seule dans cette foule dangereuse.

Je regarde partout autour de moi mais ne la retrouve pas des yeux. Mais j'entends tout à coup un cri devant moi et me dirige instinctivement dans cette direction.

Une femme est debout devant Saldya et la regarde avec des yeux ronds de surprise. Cette dernière semble s'être arrêtée, déroutée. Sans réfléchir, je me précipite en avant et prends par le bras la gamine qui cherche à m'échapper avant de lancer un sourire un peu crispé à l'inconnue et de lancer :

-Ah je suis heureuse que vous ailliez retrouvée ma sœur, elle a disparu dans la foule et je n'ai jamais été aussi inquiète de ma vie... Vraiment, merci.

Je tire avec moi Saldya et l'entraîne de nouveau cette fois-ci en vérifiant bien qu'elle ne peut m'échapper. La dame derrière nous tente de dire :

-Mademoiselle, vous êtes certaine que ce n'était pas...

Je serre les dents et nous nous éloignons pratiquement au pas de course. Plus que quelques mètres et on serra devant ma tour...

-Eh là, vous !...

Je ne me retourne pas et resserre mes doigts sur le poignet de Saldya. Leçon de la journée : ne plus jamais accepter de jouer le rôle d'ange gardien.

J'y suis enfin. Je passe d'un geste nerveux le bras devant le capteur de la porte piétonne -que personne n'emprunte jamais en général- et je rentre à l'intérieur avec Saldya. Quelques minutes plus tard, nous sommes toutes les deux dans mon appartement et je ferme la porte en poussant un vif soupir de soulagement.

Je porte la main à mon front et essuie d'un geste mécanique quelques gouttes de sueur avant de remettre dans mon dos mes cheveux sombre en effleurant mes anneaux d'or au passage. Saldya reste immobile dans la petite pièce de séjour et ne me quitte pas des yeux. Rompant un désagréable silence, je me décide à dire :

-A quoi pensais-tu en partant ?

-J'en ai assez que l'on me dise chaque jour que les gens me détestent. Pourquoi tu as dit que tu étais ma sœur ?

-Pour te protéger...

Elle hausse les épaules avant de lever le doigt vers la grande glace murale derrière moi.

-On se ressemble.

-Oh ça non, ça m'étonnerait beaucoup...

En disant cela, je me retourne pour faire face à mon reflet. A ma grande surprise, vite rattrapée par un désagréable sentiment sur lequel je ne parviens pas à mettre un nom, l'enfant a raison. Nous nous ressemblons de manière étonnamment frappante.

Si elle a des cheveux blonds et des yeux bleus, nous avons la même forme de visage et les mêmes traits. Mais je secoue la tête, mal à l'aise.

-Un drôle de hasard...

Elle lève les yeux vers moi et murmure :

-En fait, c'est à Maman que tu ressembles...

Je ne trouve rien à répondre. L'image de la glace ne me rassure pas. La seule chose qui doit vraiment nous différencier est notre tenue vestimentaire... Je secoue la tête et me force à changer de sujet même si les coïncidences de ce genre sont plutôt troublantes.

-Saldya, tu me promets de rester ici jusqu'à demain matin ?

Elle pousse un léger soupir avant de poser les yeux sur la fenêtre.

-Je suis prisonnière ?

-Un peu.

-Comme d'habitude...

Et, sans que je lui ai rien dit, elle gagne ma chambre et je la vois se diriger vers un fauteuil ou elle se recroqueville sur elle-même. Je tire la porte, certaine qu'elle préfère au fond être seule. Mais une boule s'est formée dans ma gorge : elle ressemble tellement à ce que j'ai vécu dans mon enfance...

Je n'arrive pas à me rappeler les premières années de ma vie. Mais je me souviens en revanche de mes peurs, de mes cauchemars, de cette sensation d'étouffer dans une prison dorée... Je ne voulais pas faire partie de la mafia.

Un rire amer m'échappe avant que je ne me ressaisisse. Allons, tout cela pour un petit bout de princesse qui ignore tout de la vie ?

Je sors alors de ma besace la paire de boucle d'oreille. Mon acquisition de la soirée...

-Miaouuuuu...

J'éclate d'un joli rire en baissant la tête vers le sol. Mon chat choisit ce moment pour s'approcher de moi et se frotter entre mes jambes. Moi, je m'approche de la glace et ôte mes anneaux d'or pour mettre mes nouvelles boucles d'oreille à la place.

Elles me vont à ravir même si je garde une préférence pour les autres... Mes yeux brillent dans la pièce faiblement éclairée. Je me penche vers le sol et caresse pensivement mon chat avant de murmurer pour moi-même :

-Tu sais, j'ai bien envie de passer à des vols de plus grande envergure...

***

Pile à l'heure celui-là. Je me lève de mon siège à regret pour aller ouvrir la porte et regarde mon visiteur entrer avec un léger sourire narquois.

-Le maire de la ville vient en personne ?

-Ne riez pas, je suis accompagné des gardes noirs qui attendent près de deux aéronefs sur la plus proche plateforme. La petite est ici ?

Je dévisage quelques secondes le jeune homme tiré à quatre épingles avant de dire avec un léger sourire :

-Et mon invitation pour la soirée ?

Il lève les yeux au ciel. Maintenant qu'il n'a plus peur pour la princesse et qu'il a vu mon modeste appartement, monsieur se permet d'être désagréable...

-Passez-moi votre bras...

Je m'exécute en silence et il sort un petit appareil de sa poche avant de le braquer sur mon bras gauche.

Biiip...

-C'est bon, je viens de modifier votre carte informatique. Vous pourrez entrer. De toute façon, la reine voudra vous parler en personne... Mais où est la princesse ?

Je n'ai pas le temps de répondre que la porte de ma chambre s'ouvre déjà et que Saldya murmure :

-Ici...

Le visage du jeune homme s'illumine d'un sourire respectueux et il répond :

-Parfait. Tu me suis ?

Saldya s'avance et me jette un coup d'œil au passage. Esteban est déjà sur le pas de ma porte. Mais l'enfant, juste avant de sortir à sa suite, me lance après une légère hésitation :

-Merci...

Et la porte se referme me laissant sur une impression étrange d'inachevé. Je regarde mon bras avec une légère hésitation. Une soirée au palais... Ai-je envie de voir la reine ? Ou surtout de revoir cette enfant alors que j'ai l'impression de ne pas l'avoir aidée alors qu'elle le demandait ?

Intemporel T5 & 6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant