Thaïs (Chapitre 130)

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Je reste un instant estomaquée, silencieuse, le souffle coupé. Avant de retrouver ma colère et ma peur et de crier en réponse :

-Espèce de lâche ! C'est un peu ta faute si mon fils est dans cette situation quand même ! Et la seule chose que tu trouves à me proposer c'est...

Je veux m'approcher de lui et lui donner une gifle sans réfléchir mais il m'attrape le poignet au vol. Comme d'habitude, il me faut quelques secondes pour intégrer le choc de ses doigts glacés sur ma peau, alors même qu'il l'est beaucoup moins que les autres habitants de la ville.

Son regard pénétrant se pose sur le mien et pendant quelques secondes je ne trouve rien à dire avant d'articuler froidement :

-Lâche-moi.

Il laisse tomber ma main et je recule d'un pas, tachant de ne pas de nouveau me laisser submerger par mes émotions. Ergey semble lui aussi avoir du mal à se contenir et il lui faut plusieurs minutes avant de pouvoir me reparler :

-Tu ne m'as pas laissé terminer ma proposition. Je suis prêt à t'aider à retrouver Georges. Je pense qu'à deux, plus mes relations...

Sans aucun souci de lui faire du mal où pas je le coupe d'une voix toujours dure :

-Je croyais que personne ne t'appréciait ?

Un sourire carnassier étire ses lèvres et il rétorque :

-Bien sûr. Mais je suis le fils de leur chef. La plupart de mes relations me doivent quelques menus services...

Je détourne les yeux, écœurée, mais il poursuit déjà en redevenant trop calme pour camoufler ses émotions :

-Je n'ai pas envie de te cacher la vérité qui est que je dépends de toi. Les extrémistes te rendront bien ton fils contre ma tête... Mais tu n'auras peut être pas envie d'avoir à lui expliquer grâce à quoi il est encore en vie...

Je détourne les yeux. Ergey a choisi exactement la bonne méthode pour combattre ma haine et ma colère. Il ne m'a rien caché et m'a parlé avec franchise. C'était la meilleure façon de me lier les mains... Mais de toute façon, même face au pire des hommes, aurais-je pu le livrer à la mort ?

Je me détourne de lui pour faire quelques nouveaux pas dans la pièce jusqu'à atteindre le mur chauffant. Je m'y adosse un court instant, ferme les yeux, tout en devinant qu'Ergey et Steï me fixent l'un et l'autre, incapables de se regarder entre eux, avant de me redresser.

Je les dévisage tour à tour, puis reprends la parole plus fermement.

-Je vais accepter ta proposition Ergey. Mais tu as oublié mon mari dans ton histoire.

Les yeux d'Ergey brillent et il répond :

-Dans ce cas précis, les juges t'ont nommée responsable de la situation. Parce que d'après leurs informations, ils pensaient que tu me détesterais plus qu'Aevin.

Je ne réplique pas mais réponds presque calmement :

-Ils n'ont pas complètement tord. Je sais qu'Aevin ne s'interrogera même pas une seconde, parce que tu n'es pas directement coupable. Tandis que moi j'ai envie de t'écharper...

Je tourne mes yeux vers le hamac où je dormais encore ce matin en paix, convaincue que toute ma vie allait s'arranger, avant de revenir à Ergey. Il attend la suite de mon discours avec un intérêt mêlé de peur et de colère visible. Je poursuis :

-J'ai plusieurs conditions pour ne pas réclamer que tu échanges ta vie avec celle de mon fils. La première, que tu te débrouilles pour m'obtenir l'autorisation de sortir d'ici et de rejoindre mon mari, mon frère et ma fille. Et que l'on ne nous sépare plus. La seconde de mes conditions... Je veux que tu acceptes la présence de Steï dans cette équipe...

Intemporel T5 & 6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant