Ysaïne (Chapitre 75)

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Mon cœur bat trop vite dans ma poitrine et je me surprends à regarder dans les réserves de l'aéronef s'il n'y a pas quelque part une cigarette.

J'en trouve une et je la prends entre mes doigts nerveux tandis que nous survolons les tours avant de la présenter devant un petit orifice dans le tableau de bord. Une petite flamme en jaillit aussitôt et je porte à mes lèvres la cigarette. La fumée envahit le cockpit et je me mords violemment les lèvres.

Je tremble presque en sentant l'aéronef amorcer la descente. Il fait entièrement nuit et j'ai eu du mal à ignorer les feux d'artifice devant le palais et les lumières de la procession. Mais je sais que ma place n'est pas là-bas, même si je n'oublierai jamais le sourire unique de Saldya. C'est à cause d'elle que je suis de nouveau ici...

L'aéronef se pose sur la route au milieu des gravats au même endroit que la dernière fois. Heureusement que la procession de va pas jusqu'ici... Je descends rapidement, écrase sous mon talon ma cigarette, et prends mon sac dans l'engin. Je suis à peine debout à deux mètres de l'appareil qu'une voix m'interpelle :

-Halte !... Qui êtes-vous ?

La nuit cache mes traits et j'enfonce mes mains dans ma veste. C'est le moment de vérité. Je peux encore repartir, reculer... Mais je me décide à me retourner vers l'homme qui m'apostrophe à quelques mètres dans le noir. Je savais bien qu'il y avait une chance que ce soit encore lui qui monte la garde ici. Le lieutenant de ma mère. Je n'arrive toujours pas à l'admettre. Mais il ne peut pas me voir distinctement et je l'entends dire de nouveau avec colère :

-Je ne me répéterai pas une troisième fois. Les recrues nous rejoignent rarement en pleine nuit. Qui êtes vous ?

Je pousse un soupir avant de lâcher :

-Ysa. Ysa d'Estona.

Je me refuse à dire l'autre nom. Il y a un silence, puis la lumière aveuglante d'un écran qui éclaire brusquement la rue. Christian s'avance lentement vers moi et lorsqu'il reconnaît mes traits, il éteint son appareil et pose une main sur mon épaule.

-C'est... C'est sympa d'être revenue.

Je retire sa main de mon épaule d'un geste brusque. Il me fait soudainement penser à Idwin et quelque chose me serre un peu trop la gorge en croisant ses yeux sombres. Je murmure :

-Mais j'ai des conditions. Je ne veux pas être...

Un silence. La nuit est si sombre. Christian ne me laisse pas le temps de poursuivre et tourne déjà les talons après m'avoir fait signe de le suivre. Il murmure quelques mots dans son écran au passage pour qu'on vienne remplacer sa garde et j'accélère le pas pour rester juste derrière lui.

De nuit, tout est beaucoup plus impressionnant. Lorsque j'arrive devant le bas de l'immense tour, la porte du hangar est fermée mais une petite sur le côté s'ouvre pour nous laisser passer et un homme salue Christian au passage. Il m'adresse un regard curieux mais je me contente de continuer d'avancer derrière mon guide, redoutant de plus en plus la visite qui va suivre.

J'ai la gorge un peu serrée lorsque nous entrons dans la salle de transfert. Et beaucoup plus lorsque j'arrive au dernier étage. Il n'y a plus de gardes devant la porte et je vois dans l'ombre Christian froncer les sourcils. Mais il entre d'un pas calme dans l'appartement en passant son bras sous un détecteur. Je pénètre derrière lui dans le salon qui fait aussi office d'entrée et la porte se referme derrière moi.

Je ne peux m'empêcher d'ouvrir de grands yeux. Tous les meubles sont brisés, saccagés, il ne reste rien d'ordonné dans la pièce. Tout ce qui pouvait se diviser en plusieurs morceaux semble l'avoir été. Christian me jette un coup d'œil puis laisse tomber quelques mots :

Intemporel T5 & 6Où les histoires vivent. Découvrez maintenant